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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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ses
juments sous lui. Il a la sensibilité d’un… d’un troupeau de bœufs, conclut-il.
    Sigismondo ne semblait avoir aucune difficulté à soutenir la
femme évanouie, et les deux hommes contemplèrent son visage.
    — J’ai donné l’ordre à tous les nains de se rassembler
dans la salle des gardes orientale. Mon intendant s’en occupe et l’orfèvre
devra identifier celui qui est venu le voir. Vous y veillerez. J’attends Son
Éminence Pontano, qui va m’expliquer, j’en suis certain, pourquoi Bandini n’a
pas restitué la fille de Di Torre, et chercher à marchander la vie de son fils.
    Cecilia Di Villani se mit à s’agiter dans les bras de Sigismondo
et à pousser de petits gémissements égarés. Devant cette mauvaise comédie le
duc lui lança un regard bleu furieux, puis les quitta.
    Sigismondo modifia sa prise, se pencha pour rassembler le
nombre considérable des jupes de la dame et les prendre sous son bras, se
redressa et sortit. Elle prononçait des paroles confuses et sa tête était venue
se nicher contre son épaule lorsqu’il atteignit l’antichambre où il la déposa
sur un banc capitonné. Le petit page, consterné, fut aussitôt auprès d’elle.
    — Je vous laisse entre de bonnes mains, madame, dit
Sigismondo. Vous devez m’excuser. J’ai rendez-vous avec des nains.
    Le petit page s’empara de l’éventail suspendu à la ceinture
de sa maîtresse et lui éventa le visage avec une telle vigueur que les cheveux
blonds voletèrent en tous sens.
    L’orfèvre avait revêtu une robe d’étoffe bleu marine pour
venir au palais, et il gardait les mains enfouies dans ses manches comme pour
les tenir au chaud ; les mains d’un orfèvre en activité sont souvent
vilainement abîmées. Il était conscient de l’endroit où il se trouvait, et l’arrivée
inopinée de Sigismondo ne le rassura pas.
    Debout devant la salle des gardes, l’intendant du duc tournait
le dos à la porte, faite d’un impressionnant assemblage de chêne. Il était
encadré par deux hommes de la garde, vêtus d’une livrée à manches noires et
portant des hallebardes. En voyant Sigismondo, il ouvrit la porte avec des
précautions qui trahissaient une certaine appréhension.
    Si l’intendant connaissait sans doute le nombre de nains
présents à l’intérieur, la première vision qu’on avait de la salle donnait l’impression
qu’elle en contenait un nombre infini. Ils occupaient le moindre centimètre carré
du sol, se serraient debout sur les bancs entourant la salle, assis en rang d’oignons
sur la table.
    Il y en avait des deux sexes, de tous les âges et, jusqu’à un
certain point, de toutes les tailles. Tous étaient mécontents, et la plupart ne
se privaient pas de le faire savoir.
    Ils étaient tous en noir et portaient, ou agitaient, même
ceux de sexe masculin, des fichus, dont certains leur avaient été remis par l’intendant.
    Ils s’écartèrent de la porte et demandèrent à ce dernier la
raison de leur présence. L’entrée de Sigismondo provoqua un relatif apaisement,
mais qui ne dura point.
    Il fallut qu’un garde frappe plusieurs fois par terre avec sa
hallebarde pour rétablir un silence vibrant de récriminations.
    — Si vous vous étiez tenus tranquilles plus tôt, fit l’intendant
d’un ton plaintif, j’aurais pu vous expliquer que…
    Il ne put en dire plus. Babel se déchaîna. Sigismondo, qui
jusque-là observait la scène en silence, se pencha vers un nain âgé qui se
tenait à peu près tranquille. Celui-ci se mit alors debout sur le banc et leva
les bras. Quand le reste de l’assistance le vit, le vacarme s’apaisa peu à peu.
    — Voilà qui est mieux ! dit l’intendant. Bon. Il
se passe qu’une bague appartenant à la duchesse, Dieu ait son âme…
    Il fut interrompu par un « Amen » respectueux, mais
chacun à présent lui prêtait attention.
    — … a disparu. Ou plutôt, avait disparu. Il se trouve en
effet qu’on l’a revendue ce matin à cette estimable personne ici présente, et
qu’un de ses collègues l’ayant identifiée…
    — Quel rapport avec nous ? s’enquit une voix menaçante.
    Un grand silence s’instaura, un silence total. À peine entendait-on
cligner une paupière.
    — Je ne pourrai jamais vous expliquer si je suis constamment…
    — La personne qui a apporté la bague était de votre taille,
intervint Sigismondo.
    Seuls les bras levés du vieux nain empêchèrent une explosion
de protestations

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