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[Napoléon 3] L'empereur des rois

[Napoléon 3] L'empereur des rois

Titel: [Napoléon 3] L'empereur des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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parti que celui de la masse, martèle Napoléon. Ne cherchez donc qu’à réunir. Ma politique est de compléter la fusion. Il faut que je gouverne avec tout le monde sans regarder à ce que chacun fait. On s’est rallié à moi pour jouir en sécurité. On me quitterait demain si tout rentrait en problème.
    Il aperçoit Marie-Louise qui, sur le perron, entourée de ses dames, semble l’attendre. Il abandonne Savary, va vers elle d’un pas rapide.
    Elle veut jouer au billard.

35.
    Il brandit la lettre. Il a envie de pousser un cri. Il s’approche de Méneval, lui donne plusieurs tapes sur l’épaule, puis lui tire l’oreille. Il veut voir immédiatement le grand maréchal du palais, Duroc. Lorsqu’il est seul, il s’approche de la fenêtre, l’ouvre, et cette douceur de la matinée de juin, ces senteurs de la forêt de Saint-Cloud l’émeuvent tout à coup. Il entend Méneval qui rentre accompagné de Duroc, mais il ne peut bouger. Il reste appuyé à la croisée. Il a serré la lettre dans son poing.
    Il ne l’a lue qu’une fois, mais il en connaît chaque mot. Ils ont cette douceur qu’avait la voix de Marie Walewska. Elle murmure que son fils est né le 4 mai, dans le château de Walewice. Il porte le nom d’Alexandre Florian Joseph Colonna. Il a la forme du visage de son père, son front, sa bouche, et les cheveux d’un noir de jais. Elle ne demande rien. Elle est heureuse. Elle attend. Elle espère pour son fils Alexandre.
    Il voudrait les serrer contre lui, proclamer sa joie, les présenter à tous, même à Marie-Louise. Où serait le mal ? Il y a plusieurs vies dans sa vie, et il peut toutes les vivre, en protégeant ceux qui l’ont aimé, qu’il a aimés. Il se tourne vers Duroc. Il rit. C’est Duroc qui lui a présenté Marie Walewska, c’est lui qui sera le dépositaire du secret.
    Il s’approche du grand maréchal du palais.
    — Un fils, dit-il d’une voix forte.
    Il veut que Duroc prépare l’installation de Marie Walewska et d’Alexandre à Paris. Il dotera son fils mieux qu’il n’a doté le comte Léon, le premier de ses fils. Mais pouvait-il être tout à fait sûr de Louise Éléonore Denuelle de La Plaigne ? Et il en est allé de même avec sa fille Émilie, dont la mère est Mme Pellapra.
    — Deux fils, murmure-t-il, et il rit encore.
    Dès que Marie sera installée à Paris, dans l’hôtel de la rue de la Victoire, elle sera présentée à la cour comme issue de l’une de ces familles polonaises qui sont toujours les alliées de la France. Le docteur Corvisart veillera sur elle et l’enfant.
    Il marche dans le cabinet de travail. Que de vies dans sa vie ! Il se sent mutilé d’avoir ainsi à en dissimuler certaines. Pourquoi ? Il est comme un grand fleuve qui coule dans des paysages différents, qui côtoie des berges douces ou abruptes. Mais il est toujours le fleuve, de la source jusqu’à l’embouchure.
    Il sort d’un pas rapide. Si Marie Walewska était à Paris, il lui rendrait visite régulièrement comme à une amie, comme à la mère de son fils. Et en quoi cela changerait-il la vie de Marie-Louise ?
    Il veut l’unité de toutes ses vies. Il ne peut vivre comme si son destin était éclaté en morceaux séparés. Il est un.
     
    Il chevauche en compagnie d’un seul aide de camp jusqu’à la Malmaison. Il retrouve avec émotion jusqu’aux parfums de fleurs. Tout est d’un calme mort qui l’inquiète. Il interpelle un valet de pied qui s’affole en le reconnaissant. Il lui prend le bras, le secoue.
    — Où est Joséphine ? Elle n’est pas levée ?
    Il est impatient de la voir, inquiet.
    — Sire, la voilà qui se promène dans le jardin.
    Il aperçoit la silhouette blanche dans sa robe légère, les cheveux relevés sur la nuque. Il a envie de la prendre dans ses bras.
    Il court vers elle, l’embrasse.
    Il a plusieurs vies.
     
    Il les conserve toutes, toujours aux aguets.
    Il ordonne, préside aux Conseils des ministres chaque jour.
    Où le mènerait-on s’il se laissait conduire ?
    Savary, le ministre de la Police, n’a pas l’habileté et la souplesse de Fouché. Il voit partout des complots jacobins. Il les démantèle, mais, même si je suis l’époux d’une Habsbourg, ce n’est pas les ci-devant que je cherche à favoriser. Je suis le fondateur d’une noblesse et d’une dynastie, et non pas le rameau greffé au vieux tronc de l’Ancien Régime. Je prends la sève des arbres séculaires pour faire croître ma branche

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