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[Napoléon 3] L'empereur des rois

[Napoléon 3] L'empereur des rois

Titel: [Napoléon 3] L'empereur des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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plaindre, c’est un effet de ma mauvaise étoile.
     
    Il rentre en compagnie de Murat, qu’il a vu faire sa cour à la reine. Elle se distrait en lisant « l’histoire du passé », rapporte Murat. Et quand Murat lui a répondu que « l’époque présente offre aussi des actions dignes de mémoire », elle a murmuré : « C’est déjà trop pour moi que d’y vivre. »
    Napoléon se tait. Cette femme est restée digne, maîtresse de la conversation, la dominant même, revenant sans cesse au sujet qui l’obsède : Magdebourg.
    La belle reine de Prusse à laquelle, malgré tout, il ne fera aucune concession !
    Il éprouve le désir de raconter comment, lorsqu’il lui a offert une rose, elle a retiré sa main en disant : « À condition que ce soit avec Magdebourg », ou bien comment il l’a priée de s’asseoir « parce que rien ne coupe mieux une scène tragique, car quand on est assis, cela devient comédie ».
    Il écrit à Joséphine.
    « Mon amie,
    « La reine de Prusse a dîné hier soir avec moi. J’ai eu à me défendre de ce qu’elle voulait m’obliger à faire encore quelques concessions à son mari ; mais j’ai été galant, et me suis tenu à ma politique. Elle est fort aimable. J’irai te donner des détails qu’il me serait impossible de te donner sans être bien long. Quand tu liras cette lettre, la paix avec la Prusse et la Russie sera conclue et Jérôme reconnu roi de Westphalie, avec trois millions de population. Ces nouvelles sont pour toi seule.
    « Adieu, mon amie, je t’aime et veux te savoir contente et gaie.
    « Napoléon »
    Ce sont les dernières heures qu’il passe en compagnie du tsar. Les traités sont signés, la Prusse est dépecée, humiliée. La Russie préservée. Les deux nations s’engagent à agir contre l’Angleterre.
    « La plus grande intimité s’est établie entre l’empereur de Russie et moi, écrit Napoléon à Cambacérès, et j’espère que notre système marchera désormais de concert. Si vous voulez faire tirer soixante coups de canon pour l’annonce de la paix, vous êtes le maître. »
    Il accompagne Alexandre jusqu’à la barque qui va le conduire sur la rive droite du Niémen. C’est le temps des adieux. Il voudrait que ce moment se prolonge. Il sait trop qu’une fois éloignés de lui les hommes, et le tsar, comme l’un quelconque d’entre eux, échappent à son influence, se dérobent. Et qu’il faudra compter avec le travail de sape des agents de Londres à Saint-Pétersbourg.
    Il veut se rassurer, dit à Alexandre :
    — Tout porte à penser que, si l’Angleterre ne fait pas la paix avant le mois de novembre, elle la fera certainement quand, à cette époque, elle saura les dispositions de Votre Majesté, et qu’elle verra la crise qui se prépare pour lui fermer tout le Continent.
    Peut-il être sûr d’Alexandre ?
    Il passe en revue avec lui les régiments de la Garde personnelle du tsar.
    — Votre Majesté me permettra-t-elle de donner la Légion d’honneur au plus brave, à celui qui s’est le mieux conduit dans cette campagne ? demande-t-il.
    Un grenadier est désigné. Napoléon lui accroche sa Légion d’honneur sur la poitrine.
    — Grenadier Lazaref, tu te souviendras que c’est le jour où nous sommes devenus amis, ton maître et moi.
    Il étreint Alexandre.
    De qui peut-on être sûr ?
     
    Autour de lui, quelques voix s’inquiètent déjà. On ne peut se fier à Alexandre, lui répète-t-on.
    Il hésite, convoque le général Savary. Il le fixe. L’homme est un fidèle parmi les fidèles. Il l’a montré au moment de l’arrestation et de l’exécution du duc d’Enghien.
    — J’ai confiance dans l’empereur de Russie, lui dit-il, nous nous sommes donné réciproquement des marques de la plus grande amitié après avoir passé ici vingt jours ensemble, et il n’y a rien entre les deux nations qui s’oppose à un entier rapprochement.
    Il s’approche de Savary, lui pince l’oreille.
    — Allez y travailler.
    Savary sera l’ambassadeur de Napoléon à Saint-Pétersbourg. Et il faudra bien que les salons l’acceptent, lui, le général accusé d’être le responsable de la mort du duc d’Enghien.
    — Je viens de faire la paix, continue Napoléon. On me dit que j’ai eu tort, que je serai trompé ; ma foi, c’est assez de faire la guerre. Il faut donner le repos au monde.
    Il marche autour de la pièce.
    — Dans vos conversations à Pétersbourg, ne parlez jamais de

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