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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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l’épopée napoléonienne, me l’a écrit : « La duchesse de Sagan n’aimait pas l’Empereur, et c’est sans doute pour lui plaire que Metternich a inventé une phrase que Napoléon n’a jamais prononcée. » D’ailleurs, à Sainte-Hélène, lorsque l’un de ses compagnons rappellera au proscrit que le bruit courait « dans les salons » que Lannes était mort en le maudissant, l’Empereur haussera les épaules :
    Quelle absurdité ! Lannes m’adorait, au contraire ! Il est vrai que dans son humeur fougueuse, il eût pu laisser échapper quelques paroles contre moi ; mais il était homme à casser la tête à celui de qui il les aurait entendues.
    L’Empereur pleura en entendant Lannes murmurer :
    Dans quelques heures, vous aurez perdu votre meilleur ami, l’homme qui vous a le plus aimé...
    Il devait survivre durant trois jours encore. « Ma cousine, écrit le 31 mai, Napoléon à la duchesse de Montebello, le maréchal est mort ce matin des blessures qu’il a reçues au champ d’honneur. Ma peine égale la vôtre ; je perds le général le plus distingué de mes armées, mon compagnon d’armes depuis seize ans, celui que je considérais comme mon meilleur ami... »
    « En déjeunant, en dînant, en mangeant sa soupe, raconte Roustam, les larmes coulaient dans sa cuiller. »

    Le 17 mai, quatre jours avant la bataille d’Essling, Napoléon avait lancé, de Schoenbrunn, un décret annexant Rome et les États pontificaux à l’Empire. Quelque temps auparavant, il avait dicté sa volonté :
    Que l’on aille présenter au Pape l’ultimatum suivant : « Ou bien le Pontife accepte d’adhérer à une ligue offensive et défensive contre les ennemis de la France, ou bien ce sera la rupture. » Si le Pape refuse, c’est qu’il veut la guerre, or, le premier résultat de la conquête, c’est le changement de gouvernement !
    Et le Pape avait refusé.
    Le matin du 10 juin, le pas des patrouilles françaises qui sillonnent la Ville Éternelle paraît à Pie VII plus martial encore que de coutume. Sans cesse les estafettes passent au galop... Soudain, une décharge d’artillerie fait trembler les vitres et, au château Saint-Ange, l’étendard pontifical descend lentement. Puis les trois couleurs françaises montent victorieusement le long de la hampe. Le Pape peut entendre venir jusqu’à lui les cris des hérauts :
    — Romains, vous êtes appelés au triomphe sans avoir partagé le danger... Parcourez les annales de votre histoire : ce ne sont plus depuis longtemps que celles de vos mésaventures... Unis à la France, vous êtes aujourd’hui forts par elle ; les maux dus à votrefaiblesse ont pris fin... Romains, vous n’êtes pas conquis mais réunis...
    Le décret daté de Schoenbrunn entrait en vigueur. Rome est devenue ville française. Pie VII, penché à sa fenêtre, ressent un vertige en entendant les paroles qui arrachent de ses mains débiles et impuissantes la ville sainte qu’il a reçue en dépôt. Des larmes montent à ses yeux. Une porte s’ouvre. C’est son ministre, le cardinal Pacca, qui se jette dans ses bras en poussant un cri de douleur :
    —  Consummatum est !
    Pie VII répond avec ses armes. D’abord, une protestation : « Ils sont donc enfin accomplis les desseins ténébreux des ennemis du Siège apostolique. Après l’envahissement injuste de la plus considérable partie de nos domaines, nous nous voyons dépouillés, sous d’indignes prétextes et avec la plus grande injustice, de notre souveraineté temporelle avec laquelle notre indépendance spirituelle est étroitement liée... »
    Doit-il envoyer la bulle Quum memoranda, la bulle d’excommunication ? Pacca prend la parole :
    — Très Saint-Père, élevez vos yeux vers le Ciel, puis donnez-moi vos ordres et soyez sûr que ce qui sortira de votre bouche sera la volonté de Dieu...
    Celui qui, quelques années auparavant, n’était qu’un pauvre moine, se met à genoux puis signe le texte prononçant contre Napoléon l’excommunication majeure.
    La nouvelle de la réunion de Rome à l’empire français, qui va se matérialiser par ces mots : Département des Bouches du Tibre, chef-lieu Rome, fera peut-être davantage considérer Napoléon par l’Europe comme l’homme à abattre, mais contrebalancera quelque peu la nouvelle de l’échec d’Essling. L’homme, capable d’un trait de plume de ravaler au rang de préfecture la Ville éternelle, n’était point un

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