Napoléon
près de toi que celles d’un amour passionné, mais d’un amour qui veut ton coeur avant tout. Tu finiras par m’aimer car il sera tout pour toi, entends-tu bien ?
Napoléon poursuit sa cour pressante et, nous le savons par les lettres qu’il adressera à Marie et qui sont reproduites ici pour la première fois. Craignant que son écriture soit parfaitement illisible, il dicte ces lignes qu’il se contentera de signer et de dater : mercredi 28 à 11 heures du matin :
« Madame,
« Vous étiez triste lundi au cercle, cela m’a peiné... Je vous ai écrit deux fois mais tout le monde est parti, et mes lettres ne vous sont pas arrivées... Je désire, Marie, vous voir ce soir à huit heures. Allez chez votre amie, celle dont vous m’avez parlé. Une voiture viendra vous y prendre...
« J’espère et j’ai besoin de vous dire ce soir tout ce que vous m’inspirez et toute la contrariété que j’ai éprouvée...
« Mille baisers sur les lèvres de ma Marie. »
Le lendemain, il lui écrit encore {12} :
« Madame,
« La personne qui vous remettra cette lettre est celle dont je vous ai parlé. Elle vous dira tous les sentiments que j’ai pour vous, Marie, et me donnera de vos nouvelles... Votre lettre est charmante, je baise la belle main qui l’a écrite, le coeur qui l’a dictée, et les beaux yeux que j’aime à la folie. »
Nouvelle lettre {13} , datée sans doute de cette semaine où il met tout en oeuvre pour qu’elle lui cède :
« Madame,
« Vous étiez hier au soir ravissante à voir ; je vous ai trouvée un peu silencieuse. Où étaient vos pensées ?... Comment vous portez-vous ce matin ?.... Je vous verrai ce soir pour vous dire mille et mille fois mi amo. N’est-ce pas que votre coeur y répond ? Marie un baiser sur vos yeux, ils sont cependant bien méchants ! »
Mais, une fois de plus, au lendemain d’un nouveau tête-à-tête où rien ne s’est encore passé, à son réveil, on remet à Marie, de la part de l’Empereur, un bouquet dé diamants, accompagné de ces lignes :
« Marie, ma douce Marie, ma première pensée est pour toi, mon premier désir est de te revoir. Tu reviendras, n’est-ce pas ? Tu me l’as promis. Sinon, l’aigle volerait vers toi ! Je te verrai à dîner, l’ami le dit. Daigne donc accepter ce bouquet : qu’il devienne un lien mystérieux qui établisse entre nous un rapport secret au milieu de la foule qui nous environne. Exposés aux regards de la multitude, nous pourrons nous entendre. Quand ma main pressera mon coeur, tu sauras qu’il est tant occupé de toi, et pour répondre tu presseras ton bouquet ! Aime-moi, ma gentille Marie, et que ta main ne quitte jamais ton bouquet ! N. »
— Il n’y a pas de réponse, déclare-t-elle de nouveau.
Et elle jette à terre l’écrin de maroquin rouge où se trouve le bijou.
— Ces diamants ! Je n’en veux pas ! Me prend-il pour une fille !
Le soir même, au dîner, l’Empereur pâlit. Marie n’a pas mis à son corsage son présent. La jeune femme a peur de la scène qu’elle sent monter. Avec un pauvre sourire, elle met la main à l’emplacement où le bouquet devrait se trouver et Napoléon s’apaise. Il fait le même geste que Marie. L’orage est passé – momentanément. Dès le repas expédié, il se retire dans un petit salon et fait convoquer Mme Walewska par Duroc.
— Vous voilà enfin ! Je n’espérais plus vous voir.
Mais laissons le soin à Marie Walewska de raconter la scène puisque nous pouvons publier ce texte pour la première fois :
« Il me débarrassa de mon manteau et du chapeau et me plaçant dans un fauteuil il me dit :
— Allons ! comment vous justifierez vous des crimes que je vous impute ? Pourquoi avoir cherché à m’inspirer le sentiment que vous ne partagez pas ? Pourquoi avoir refusé jusqu’à mes lauriers ? Qu’en as-tu fait ? J’y attachais tant d’intéressants moments et tu m’en as privé. Ma main n’a pas quitté mon coeur et la tienne était immobile. Une seule fois seulement tu as répondu à mon signal. Oh Marie ! tu ne m’aimes pas ! et cependant je t’aime avec passion ! D’où cela vient-il !
« Et il se frappa le front avec un geste de rage. Après un moment de silence que je n’osais interrompre :
— Voilà bien une Polonaise ! C’est vous qui m’affermissez dans l’opinion que je porte sur cette nation.
« Je recouvrai la parole pour m’écrier :
— Ah ! de
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