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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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l’avait jamais condamnée à mort.
    Elle était si naïve que ce nom, qu’elle prononçait comme ultime argument de défense, elle n’imaginait pas qu’à lui seul il la condamnait.
     
    Les centurions témoins de ses derniers instants en ont fait le récit avec autant d’émotion que s’ils avaient participé pour la première fois à un crime.
    Ils ont attaché Octavie.
    Ils lui ont ouvert les veines des quatre membres. Le sang retenu par la violence de son effroi ne coulait que lentement.
    Ils l’ont alors plongée dans un bain bouillant. Et c’est la chaleur qui l’a tuée.
     
    On lui a coupé la tête et on l’a apportée à Rome, Poppée voulant s’assurer de sa mort, se repaître de ces chairs boursouflées, de ces yeux sur lesquels personne n’avait abaissé les paupières.
    La plèbe a pleuré.
    Les sénateurs ont ordonné des actions de grâce pour remercier les dieux d’avoir protégé l’État et l’empereur.
    — Sa mère, sa sœur-épouse, son frère et son père adoptif, Burrus, Rubellius Plautus, Sulla…, a énuméré Sénèque. Pourquoi nous épargnerait-il ? Néron va tuer au gré de ses peurs et de sa fantaisie. Nul ne pourra dresser la liste des victimes. Il y a celles qu’il aura désignées et celles que ses proches lui auront offertes dans l’espoir de lui plaire, de montrer qu’ils sont prêts à tous les crimes pour le servir.
     
    Combien de jours me restait-il à vivre ?
    Cette question, Sénèque ne se la posait jamais.
    Je n’avais pas sa sagesse. Quand j’apprenais que Pallas, l’affranchi, avait été assassiné non parce qu’il représentait une menace, mais parce que ses biens tentaient Néron, ou qu’un autre affranchi, Doryphore – l’un de ses amants parmi les plus débauchés –, avait été empoisonné parce qu’il était opposé au mariage de Néron avec Poppée, ou que Romanus, l’accusateur de Sénèque, avait été tué parce que ses calomnies étaient si grossières qu’elles avaient fini par se retourner contre Néron, j’étais sûr que la mort était devenue l’impératrice de Rome et l’inspiratrice de Néron.
    Et qu’elle me frapperait donc.
    Mon seul espoir était qu’elle se retournât d’abord contre Néron comme un piège tendu par les dieux.
     
    Or, cette année-là, la foudre frappa le gymnase que Néron avait fait construire. Il brûla et la statue de Néron qui s’y trouvait fut fondue et transformée en lingot de bronze informe.
    Était-ce le présage annonçant la mort du tyran ?
    Quelques jours plus tard, la ville de Pompéi, qu’Octavie avait pu voir au dernier jour de sa vie depuis l’île de Pandateria, était détruite par un tremblement de terre.
    Était-ce un nouveau signe que la vengeance des dieux se préparait ?
    J’ai voulu le croire.

 
     
     
     
     
HUITIÈME PARTIE

 
     
34
    Sénèque m’a mis en garde.
    Nous marchions dans son jardin.
    Je lui décrivais l’un de ces présages qui me paraissaient annoncer le proche châtiment de Néron.
    Son silence m’irritait. J’insistais : savait-il que Tigellin avait transformé Rome en véritable geôle ?
    Chaque citoyen était surveillé. Des cohortes de prétoriens, des cavaliers germains de la garde impériale parcouraient la ville, prêts à disperser toute manifestation de la plèbe, à arrêter et à tuer ceux que les espions leur désigneraient.
    Un peloton de soldats avait été placé autour des ruines du gymnase détruit par la foudre et l’incendie afin d’empêcher que l’on ne vît la statue de Néron, tel un corps démembré, masse noire ensevelie sous les décombres. Néron et Tigellin avaient compris le signe des dieux et entendaient le dissimuler, l’effacer.
    Et lui, Sénèque le sage, dont je devinais le scepticisme, qu’en pensait-il ? Oserait-il contester le sens de ce présage ?
     
    Sénèque s’est arrêté devant la statue d’Apollon, mais il paraissait s’intéresser davantage aux arbres qui l’entouraient et que l’hiver avait dénudés. D’un mouvement du menton, il me montrait les cyprès serrés les uns contre les autres, trois par trois.
    — Ce sont les arbres qui font la fierté de la maison romaine, me dit-il en me dévisageant avec une commisération mêlée d’ironie. Ils résistent aux saisons, aux illusions et aux désespoirs qu’elles suscitent. Ni l’ivresse du printemps et de l’été ni la tristesse et l’angoisse de l’automne et de l’hiver ne les atteignent. Ils demeurent verticaux,

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