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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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l’histoire de Rome !
    Et, tout cela, pourquoi ?
    Au début, je n’ai entendu personne accuser directement Néron.
    Il était à Antium, loin de l’incendie, et était revenu en hâte. Sa maison, qu’il disait « transitoire », avait été en partie détruite. Comment l’aurait-il désiré, même s’il la trouvait trop exiguë, alors qu’elle était immense, longue de plus de cinq mille pas, avec des portiques, des parcs, des bassins ?
    Comment l’accuser d’avoir mis le feu à Rome simplement parce qu’il n’aimait ni ses rues étroites, ni sa puanteur, ni le désordre des constructions de cette ville ?
    Et cependant la rumeur se répandait avec l’incendie.
    On avait vu les esclaves de Néron abattre des murs de pierre qui résistaient aux flammes, mais dont il voulait depuis longtemps la destruction.
    On disait que, revenu d’Antium, cet homme, qui avait semblé vouloir sauver, en les accueillant dans ses jardins et au champ de Mars, ceux qui avaient tout perdu, s’était empressé de gravir le mont Esquilin, de monter au sommet de la tour de Mécène, et, en habit de théâtre, avait chanté, joué de la lyre, récité l’un de ses poèmes qui racontait la « prise de Troie » détruite par le feu.
    Et Néron s’était dit charmé par la beauté des flammes.
    Mais il avait aussi fait venir d’Ostie des bateaux chargés de grain, et il avait forcé les marchands à le vendre à trois sesterces le boisseau pour que les survivants puissent ainsi se nourrir.
     
    Qui était-il, un monstre ou un empereur généreux ?
     
    Calmé au bout de six jours et sept nuits, le feu avait connu un nouveau départ. Et les premières flammes de ce second incendie avaient jailli en bordure des propriétés de Tigellin, l’inspirateur et l’exécuteur des crimes de Néron.
    On s’était souvenu que l’empereur, lors d’une de ses fêtes, avait fait représenter sur scène un embrasement, et qu’il en avait paru tout exalté. En entendant le vers d’Euripide : « Moi mort, puissent la terre et le feu se confondre ! », il s’était exclamé : « Mais non, que ce soit de mon vivant ! »
    Et n’était-ce pas lui qui, évoquant les origines troyennes de sa famille, celle de César, s’était écrié : « Heureux Priam, roi de Troie, qui a pu voir de ses yeux son empire et sa patrie périr à la fois ! »
    Avait-il ainsi sacrifié la mémoire et les temples de Rome, et des dizaines de milliers de ses habitants, pour jouir d’un spectacle, accorder sa lyre, sa cithare, sa voix au grondement du brasier et aux cris de souffrance, tout en détruisant des constructions, quelles qu’elles fussent, qui gênaient ses projets, sa volonté de reconstruire Rome à sa guise, de bâtir un palais, une Maison dorée, une Domus aurea enfin aux dimensions de sa gloire, de son pouvoir d’empereur du genre humain ?
    Il voulait une nouvelle Rome aux larges avenues en perspective, aux portiques alignés jusqu’à se perdre à l’horizon.
    Et c’était donc pour cela qu’il aurait fait incendier Rome. À moins qu’il n’eût simplement utilisé les circonstances, chevauché la Fortune qui arasait les quartiers de sa ville afin qu’il pût y élever ses palais, y dessiner sa ville, Néropolis !
     
    J’ai senti la colère monter en ville, d’abord parmi la plèbe frappée par la mort de tant de citoyens pauvres ; chacun parmi elle avait un fils, une femme, un père que les flammes voraces avaient engloutis. En même temps, ces pauvres hères avaient perdu les quelques biens qu’ils possédaient. Mais Néron avait interdit que les survivants se rendissent sur les ruines pour tenter d’y retrouver le cadavre d’un proche ou les débris d’un patrimoine. Il avait promis de faire enlever les cadavres et les décombres.
    On pensa qu’il voulait par là ramasser le butin que l’incendie lui avait ainsi procuré.
    On l’accusa de dépouiller ceux dont il avait provoqué la ruine ou la mort.
    On assista sans ferveur aux cérémonies expiatoires qu’il fit organiser pour apaiser les dieux, supplier Vulcain, Cérès et Proserpine.
    On murmura qu’il avait été abandonné des dieux qui avaient détruit la ville, ses palais, ses temples, ses trophées, à moins qu’il n’eût été lui-même l’incendiaire.
    Aussi les matrones et les prêtres qui imploraient les divinités n’y pouvaient-ils rien.
     
    Ainsi persistait, dans cette ville dont les décombres fumaient encore, la rumeur qui faisait

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