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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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les capotes, les uniformes, dans une sorte d’étuve dont la vapeur
emplissait une partie d’un hangar attenant à l’atelier. Le matin suivant, les
charretiers de Revelli pouvaient livrer des uniformes propres, presque neufs, à
la caserne des chasseurs. Seuls les soldats, quand ils passaient la vareuse ou
la capote, découvraient une pièce rectangulaire, comme un stigmate sur leur
poitrine ou dans leur dos.
    — Monsieur Revelli, vous êtes extraordinaire, disait le
colonel Mathieu. Vous êtes précis, et ceux qui gagnent la guerre, sont les gens
précis et ponctuels. Est-il possible, excusez-moi.
    Il s’appuyait au dossier de son fauteuil, l’inclinant vers
l’arrière.
    — Excusez-moi, répétait-il, mais je ne réussis pas à
croire que vous soyez d’origine italienne, ce sont des fantaisistes, j’ai bien
connu leurs officiers.
    — Je suis français, répondait Revelli.
    — Bien sûr, mon cher, bien sûr. Voulez-vous que je vous
présente au général ?
    Revelli ne put refuser. Il y eut d’abord une entrevue de
quelques minutes.
    — C’est vous monsieur Revelli ? commençait le
général Tourmelin. Le colonel Mathieu me dit que vous êtes l’homme des
miracles, comment faites-vous ? Quelle est votre stratégie ?
    Mais il n’écoutait pas la réponse : « Merci pour
nos soldats, monsieur », continuait-il. Revelli fut aussi convié à un
déjeuner offert par le général, aux personnalités civiles de la ville.
Cinquante couverts dans l’une des grandes salles de la caserne. Le député
Merani, le maire Girard, Helena Hollenstein et Elisabeth d’Aspremont du Comité
d’aide et de secours aux blessés. Helena assise loin de Carlo, mais ils se
regardaient longuement, cependant que le général Tourmelin prononçait son
discours : « Je rappellerai une parole de votre maire, cette guerre,
me disait-il, est une guerre sainte. Depuis, il a été frappé dans ce qu’il
avait de plus cher. Il a donné son fils à la France. Mais tous les martyrs,
tous nos héros sont des saints, car la France du droit et de la justice, combat
contre la barbarie et je voudrais, au nom des soldats, vous remercier
d’apporter votre aide, vous qui êtes ici, à tous les combattants. Votre comité… »
    C’est Helena qui, à la fin du déjeuner, alors que les
invités se répartissaient en groupes, vint vers Carlo.
    — Décidément, dit-elle, nous nous retrouvons.
    Il semblait à Carlo qu’elle était transformée, plus grande
même, la poitrine élargie, les gestes plus calmes.
    — Longtemps, j’ai eu très peur de vous, continuait
Helena.
    Il se taisait.
    — J’ai une fille, dit-elle. Elle est en Suisse avec son
père. Et vous ? On ne parle que de vous dans cette ville, l’entreprise, la
société de transports, votre usine.
    Elle allumait une cigarette.
    — Je campe au milieu de mes blessés, à l’hôtel
Impérial, venez nous visiter.
    Son visage se crispa.
    — Vous verrez la guerre. Il faut l’avoir vue.
    Un officier s’approcha : « Ma chère Helena, si je
vous raccompagnais… »
    Helena sourit à nouveau.
    — Vous n’êtes plus pour moi un sauvage, dit-elle en
saluant Carlo, vous vous êtes civilisé ou bien, je ne sais pas…
    Carlo partit seul, renvoyant la voiture, traversant la ville
à pied pour se rendre à l’atelier. Il était à leur table. Il les avait imaginés
si puissants. Il les regardait de si loin. Maintenant, il était assis parmi
eux, les touchant du coude : « Vous vous êtes civilisé », disait
Helena. Ils étaient comme ces bulles de savon que faisait Alexandre, on les
touche, elles ne sont plus qu’une goutte sur le bout du doigt. Des arbres
creux. Une belle écorce.
    Place Garibaldi, il entra au café de Turin. La même sciure
sur le sol, les mêmes odeurs. Quelques soldats. En remontant la rue de la
République, les pouces enfoncés dans les poches de son gilet, il chercha à se
souvenir de l’adresse de son frère Vincente. Peut-être le 42. Il s’arrêta
devant le porche. Des enfants jouaient dans la cour. Une petite fille d’une
dizaine d’années sautait à la corde. Carlo fut sûr qu’il s’agissait de la
dernière fille de son frère, mais comment s’appelait-elle ? Il hésita un
moment. Elle ressemblait à Mafalda avec ces cheveux bruns bouclés.
    Leur dire quoi à Vincente, à Lisa ? Dante devait être
soldat. Rien à leur dire.
    Carlo arriva tard à l’atelier. Dans la cour, il y avait un
tas d’uniformes, qu’un ouvrier

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