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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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là-bas.
    — Il paie ?
    Revelli hésitait.
    — Il paie bien ? interrogeait de nouveau Ritzen.
    — Pas mal, mais c’est pas ça, pas seulement ça. Nous,
ici, on nous a toujours méprisés. Moi, je suis arrivé ici, qu’est-ce que j’avais ?
Dix ans ? J’ai donné ça.
    Ritzen ne regardait pas, il imaginait Revelli montrant son
bras mutilé.
    — Je suis français, je l’ai payée, ma naturalisation,
et comment ! Je me plains pas, mais quand les Italiens montrent qu’ils ont
des couilles comme tout le monde, merde, monsieur le Commissaire, je dis tant
mieux.
    Des couilles. Livio Maurizio, Avvocato, délégué pour la
France de l’association culturelle Dante Alighieri, passait la frontière, très
officiellement. Les guardie de Finanza se mettaient au garde-à-vous, sur le
quai de la gare de Ventimiglia, saluaient le commendatore Livio. Chaque fois
qu’un inspecteur téléphonait de Menton à Ritzen : « Votre client,
monsieur le Commissaire, Livio, il est rentré », Ritzen savait qu’il y
aurait quelque chose. Un restaurant qui brûlait à Cabris.
    — Ils se réunissaient là-bas, vous comprenez,
expliquait Luigi Revelli. Ce soir-là, ils ont manqué les frères Sori, mais ils
reviendront, ça je le sais.
    — Et toi, tu as marché avec eux ?
    — Moi ? Je suis pas fou, monsieur Ritzen, je
voulais vous en parler, tout ce que j’ai fait, et ça je pouvais pas faire
autrement, vous savez qu’à San Remo…
    Luigi Revelli avait ouvert une boîte à l’entrée de San Remo, La Costa azzura.
    — Je suis obligé. La Costa azzura, s’ils
veulent, ils me la ferment. Moi, je l’ai payée. Je suis un commerçant, monsieur
le Commissaire. Seulement, vous, eux, ce genre de commerce, vous le laissez pas
tranquille. Mon frère, l’entrepreneur, celui-là, quand il construit le Grand
Hôtel des Iles, personne l’emmerde, c’est un monsieur. Moi, j’ouvre une boîte,
et hop ! j’ai les flics dessus, les fascistes là-bas, vous ici, et
monsieur le Député Merani. Quoi, donner à boire, fournir des putes aux types,
pourquoi c’est plus mal que de construire des chambres, et franchement,
qu’est-ce qu’ils vont faire, les clients ?
    Il s’interrompait, reprenait son souffle.
    — Les milliardaires dans les chambres du Grand Hôtel ?
Baiser avec des putes qui passent même pas la visite.
    — Tu as marché, répétait Ritzen.
    Il apercevait les employées qui sortaient des Galeries
Lafayette, envahissaient la rue. Chaque jour, cette vie rythmée dont Ritzen, de
la fenêtre, suivait le déroulement lointain, figuration d’un opéra dont le
livret s’écrivait ici, dans ce bureau.
    — Mais non, je vous dis non !
    Luigi frappait avec son crochet sur le sol. Il devait être
penché en avant, les yeux suivant les rainures du plancher, la main gauche
serrée sur le crochet d’acier, comme pour le réchauffer.
    — Alors ? interrogeait Ritzen. Il y a eu
l’incendie du restaurant Sole à Cabris, le cambriolage des locaux de la Fratellanza
antifasciste. Tu veux que je continue ? Cette bombe qui n’a pas explosé
devant la porte des frères Sori, boulevard de la Madeleine.
    — J’ai pas marché, monsieur le Commissaire, mais je
connaissais des gars qui, eux, étaient prêts, des clients du Castèu, de
mon hôtel, et, ça vous étonnerait, même pas pour de l’argent, des purs,
monsieur Ritzen, des gens comme il faut, qui en ont marre de ce qui se passe
ici. Mussolini, il a pas que des ennemis.
    Ritzen, plus tard, Revelli ayant quitté le bureau, mais son
parfum trop fort prolongeait sa présence, reconnaissait cette sensation qu’il
avait chaque fois qu’il tenait une nouvelle pièce du puzzle, comme si l’on
pinçait sa peau, ou bien quand un fruit trop acide irritait les gencives,
faisait naître un frisson.
    Il notait sur une feuille, d’une écriture hachée, les noms, DARNAND Joseph, transporteur. MERANI Charles, fils du député Joseph MERANI,
étudiant en droit. Ils avaient rencontré Livio à Menton, et ils étaient
prêts, en échange de quelques armes et de fonds, à offrir leur concours.
    — Darnand, c’est pas n’importe qui. Renseignez-vous. Il
les a toutes, les décorations, et il y a les autres. Le fils Merani, c’est n’importe
qui ? Le député, c’est votre ami. Interrogez-les ? Pourquoi vous les
arrêtez pas ?
    Ritzen regardait les noms. Renaudin entrait. Ritzen
froissait la feuille de papier. Pas de rapport, pas encore.
    — Quelle heure

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