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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Architecto, architecte français, répétait
Alexandre.
    Retrouvant les villes, les parades du régime, ils se
souvenaient du visage brun des enfants, leurs paupières comme un liséré noir,
vibrant.
    Ils rentrèrent à Nice plus vite qu’ils ne l’avaient prévu.
Nathalie, alors qu’ils dînaient avec son père, tentait de lui expliquer :
    — Cette misère, disait-elle, ces gosses. La terre, des
pierres, l’eau manque. Et le fascisme, rien, il ne fait rien.
    Gustav Hollenstein avait un geste de la main. Fatalisme.
Indifférence.
    — La misère ? Il y a toujours deux faces, partout,
en Italie. Ici.
    Alexandre avait touché le genou de Nathalie pour qu’elle se
taise, mais elle avait un mouvement de révolte :
    — Accepter, toujours ! disait-elle.
    Gustav Hollenstein ne répondait pas à sa fille, laissait un
silence, puis, tourné vers Alexandre :
    — Ce mariage de votre sœur, Mafalda, grandiose. Votre
père a le sens de l’opéra. Le repas, un premier acte, quand le chœur entre en
scène. J’observais votre père – Gustav Hollenstein s’interrompait. Ne
croyez pas, continuait-il, que j’y mets de l’ironie. Au contraire. J’ai
beaucoup d’admiration pour Carlo Revelli. Il faut imaginer. Mon beau-frère
Karenberg m’a raconté par bribes cette vie. Au début, quand votre père est
arrivé ici, sans rien, je trouve ça… Cela vaut la conquête des Indes, vous
savez ? Il faut de l’héroïsme aussi. Alors, l’opéra, pourquoi pas ?
    Alexandre faisait une moue.
    — Je comprends, disait Hollenstein. Nathalie, elle
aussi, me reproche de ne pas avoir changé le monde, mais si, mais si.
    Gustav prenait le poignet de Nathalie :
    — Tu es l’accusation. Je plaide les circonstances
atténuantes. Après, après seulement, verdict – Hollenstein se tait
longtemps, reprend – Changer ? Je suis prêt à accepter que le monde
change, mais encore faut-il que ce soit possible. Qui vous dit que vos pères
n’ont pas essayé ?
    Alexandre mal à l’aise. Et Nathalie le sent :
    — Et cette Katia Lobanovski, papa, tu vas vivre avec
elle ?
    — Tu m’y autorises ?
    Elle hausse les épaules, le regarde. Il semble ne plaisanter
qu’à demi :
    — Moi ? Mais je suis heureuse.
    — Voyez-vous, Alexandre, dit Gustav Hollenstein en se
levant, la richesse, quel plaisir et quelle duperie ! Ma fille s’en va, je
suis seul. Il me faut une autre fille, n’est-ce pas ?
    Nathalie se lève à son tour. Elle voudrait qu’il cesse de
parler. Quelque chose glisse avec les mots anodins, qui ne l’est pas, qui la
trouble.
    — La richesse, un plaisir pour les vieux, ajoute Gustav
Hollenstein.
    Il sort de la salle à manger, se dirige vers le salon.
    Nathalie prend Alexandre par la main, l’entraîne vers le
balcon. Elle a besoin de rester seule avec son mari, ne fût-ce qu’un instant,
pour entendre battre avec lui la mer.
21
    La lampe, sur la façade plongée dans l’ombre, creusait une
cavité claire vers laquelle marchait Jean Karenberg.
    Il imaginait son père, écrivant quelques mots sous la lampe
au socle de bronze, se levant, passant sur la terrasse. Et peut-être, en ce
moment, accoudé à la balustrade, guettait-il son fils, ayant entendu le moteur
de la moto, ne veillant peut-être que pour cela, ces conversations du milieu de
la nuit qu’ils avaient, passionnées, souvent vaines, Jean, toujours surpris de
la vivacité de cet homme de soixante-dix ans, de sa vigueur. Mais, brusquement,
Frédéric Karenberg le plus souvent, comme s’il avait craint de l’emporter, et
il disait à Jean : « Peut-être as-tu raison ? »
    — Tu ne te couches pas ? interrogeait Jean, voyant
que son père allumait un nouveau cigare.
    — Les vieillards ne doivent pas dormir, pas tout de
suite.
    Jean montait dans sa chambre. Il s’endormait souvent sans
avoir la force de se dévêtir complètement. Etouffé de fatigue. Chaque jour il
se promettait de refuser ces tâches politiques nouvelles qu’on lui confiait.
Puis, Barel ou Barnoin, eux-mêmes épuisés, l’un, instituteur, l’autre,
chauffeur de taxi, s’adressaient à lui : « Jean, toi, tu… » Cela
signifiait : toi qui n’as pas besoin de gagner ta vie, toi, tu peux,
c’est-à-dire tu dois. Jean Karenberg acceptait. Il limait le sommeil, une heure
ici, une heure là. Son corps grinçait comme une dent qu’on use. Ça résonne
jusque dans la tête, et le regard se trouble.
    Le matin, il s’imposait de travailler pour

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