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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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ils n’y arrivent pas. Tes Revelli, tes parents, je
sais pas quoi, les logements qu’ils construisent au port, ils me sous-traitent
pour les plâtres, ils sont en retard, j’ai pensé à toi, tu prends tes gars et
tu vas là-bas.
    — Les autres, reprenait Antoine, ça me dit rien de les
rencontrer, si je vois Roland sur ce chantier du port, ce gosse qui commande.
    — Qu’est-ce que ça fait ? disait Giovanna. Roland
ou un autre. Il vaut mieux que ce soit Roland.
     
    Roland était rentré d’Algérie après six mois passés là-bas
et ils l’avaient retrouvé, à la fin de l’année 57, dans son nouvel appartement,
pour le baptême d’Elsa. Jeanne, sa fille dans les bras, allait de l’un à
l’autre.
    — Il faudrait qu’on se voie davantage, disait-elle à
Antoine et Giovanna, venez dîner un soir.
    Alexandre Revelli s’était approché.
    — On ne se connaît pas, à peine, on est cousins
germains pourtant, le même âge, non ?
    — Vous, disait Antoine, moi (il montrait ses mains) je
suis resté un ouvrier, rien qu’un ouvrier.
    — On pourrait se tutoyer, répondait Alexandre. Vous
savez, ouvrier, patron, on est quand même tous des Revelli. Mon père, vous
l’avez connu ?
    Alexandre s’interrompait, la gène naissait en lui à l’évocation
de Carlo Revelli, de cette inégalité qui s’était créée entre les familles et
contre laquelle, il le savait bien, il pouvait si peu.
    — Il faudrait que vous veniez me voir, continuait-il.
Vous êtes du métier, on peut travailler ensemble. Je rencontre souvent
Violette, votre sœur. Elle devrait d’ailleurs être ici ce soir.
    Il faisait mine de la chercher, en profitait pour
s’éloigner, intimidé tout à coup par le regard d’Antoine, son visage marqué, la
peau fanée de ceux qui travaillent depuis toujours en plein air, qui sont comme
de vieilles roches crevées par les embruns.
    Denise rejoignait Antoine et Giovanna :
    — Ils sont bien ici, disait-elle en montrant
l’appartement. Je n’aurais pas meublé comme ça, mais l’appartement est beau.
Vous savez que Roland a la responsabilité des chantiers ? Ça, il est ambitieux,
il tient de moi, parce que son père, enfin vous le connaissez. Heureusement,
Roland ne lui ressemble guère.
    Roland les avait raccompagnés en voiture et Giovanna
parlait, percevant entre Antoine et son neveu une certaine réserve proche de l’hostilité.
    — Tu t’occupes des chantiers, alors ? avait
demandé Antoine comme ils arrivaient.
    — Je commence, disait Roland. J’ai soixante logements
près du port.
    Il était sorti de la voiture, se tenait adossé à la
carrosserie, sans bouger.
    — Elle est jolie, Elsa, dit Giovanna. Elle ressemble, à
cet âge c’est bien tôt, mais elle ressemble à Jeanne.
    — Je ne voulais pas d’enfant, dit Roland.
    Il avait parlé d’une voix brutale, inattendue. Jusqu’alors
distant, il livrait tout à coup à son oncle et à sa tante son intimité, comme pour
leur donner dans un élan le plus vrai de lui-même, tout en restant lointain, en
ne faisant pas un geste vers Antoine, au moment où celui-ci s’écartait de la
voiture, disait : « Peut-être tu me commanderas ? »
embrassant Giovanna sans ajouter un mot. Elle se retournait comme elle passait
le seuil parce qu’il faisait hurler le moteur de la voiture en démarrant
brutalement.
     
    Antoine maintenant apercevait Roland qui était descendu de
la bétonnière. Quelques ouvriers parlementaient avec lui, les autres s’étaient
assis autour du foyer et avec des chiffons retiraient du bac de tôle les
gamelles chauffées.
    Roland bientôt se trouva seul avec le chef de chantier. Il
allait et venait les mains derrière le dos et de temps à autre il avait un mouvement
nerveux qui soulevait ses épaules, dégageait le cou.
    Un plâtrier vint s’asseoir près d’Antoine, s’appuyant à l’autre
poutre, laissant lui aussi ses jambes pendre dans le vide.
    — Il y a grève demain, dit-il.
    — Qu’est-ce qu’il a répondu ?
    Antoine allumait une cigarette, désignait Roland qui
continuait de marcher.
    — Grève politique, de toute façon de Gaulle passera, ça
sert à rien, seulement à perdre de l’argent.
    — Et les autres ?
    — Le délégué a dit qu’il fallait avertir de Gaulle, que
le fascisme en France, on le laisserait pas faire.
    Antoine remit le couvercle de la gamelle, pivota, se leva en
appuyant ses deux mains sur la dalle de béton.
    — Le fascisme, ils parlent

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