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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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des dilettantes,
de ceux qui savent profiter de l’existence comme on dit.
    — Je ne sais que travailler, ajoutait Christiane. Nous
sommes tous comme ça dans ma famille, c’est notre maladie. Mon frère, Roland,
nous sommes différents, mais le travail lui et moi, sacré.
    Elle retrouvait Roland dans la salle à manger des parents.
Ils s’observaient.
     
    Elle avait imaginé qu’ils iraient ensemble marcher au bord
de la mer, sur cette Promenade où souvent ils avaient couru, et elle se souvenait
de ces matins – était-ce un récit qu’on lui avait raconté plus tard –
quand Roland lançait la voiture d’enfant et Christiane criait en serrant les
montants.
    « Qu’es-tu devenu, que s’est-il passé pendant ces
années ? » diraient-ils de la même voix, au même instant. Elle avait
rêvé. Ils ne réussissaient qu’à échanger les mots de passe de l’indifférence.
    Parfois, quand en fin de semaine elle rendait visite à ses
parents, qu’elle se garait sur la Promenade, qu’elle s’approchait à pied de
leurs fenêtres, elle entendait la voix de Roland, assurée et forte, coupée de
temps à autre d’un rire satisfait :
    — Alexandre me laisse les mains libres. Après le
chantier du port, je leur ai fait gagner au moins…
    Il donnait un chiffre, le répétait jusqu’à ce que Dante ou
Denise, chacun à leur manière, le commentent. Elle demandait d’un ton gourmand :
    — Tu as un pourcentage sur les bénéfices ?
    Dante, inquiet, interrogeait :
    — Tu ne prends pas trop de risques ?
    Roland riait encore :
    — Je n’ai même pas eu besoin de le demander, disait-il.
Alexandre me l’a proposé.
     
    Alexandre Revelli n’avait jamais aimé ces conversations
âpres avec les promoteurs, ces réunions de chantiers où il fallait tenir tête,
feuilleter le cahier des charges, mentir, gueuler, taper du plat de la main sur
le schéma de chauffage :
    — Vous m’aviez dit, pour les tuyaux. Vous allez me
respecter ça, n’est-ce pas ?
    Roland le remplaçait. Robert Merani, jeune diplômé,
l’assistait pour l’architecture. Alexandre, lui, dirigeait l’agence, concevait
ces villages qui ressemblaient à des roches creusées que les vagues effleurent,
ou bien inventait ces formes nouvelles, ondulations de béton et d’alvéoles qui
couraient le long du rivage.
    — Si vous me faites confiance… lui disait Roland.
    Il prospectait les terrains à vendre sur les collines,
rachetait les vieilles serres, les terrasses à œillets sur les coteaux du Var.
    — Vous verrez, dans quelques années, avec le nouveau
plan d’urbanisme, le prix va tripler.
    Souvent Alexandre, en l’écoutant, se souvenait de Carlo
Revelli : la similitude de caractère entre Roland et Carlo paraissait s’accentuer,
la sève irriguait d’abord le fils de Dante.
     
    Quand Yves revenait de Marseille, Alexandre s’approchait de
lui, regardait par-dessus son épaule la revue de médecine que feuilletait son
fils, lui touchait du bout des doigts la tête.
    — Pourquoi chirurgien ? murmurait-il. Roland va
diriger l’entreprise.
    — Si ça l’amuse, disait Yves en levant les yeux.
    Nathalie se rapprochait d’eux. Sonia lisait, allongée sur le
tapis.
    — Roland, reprenait Alexandre, j’ai décidé de l’intéresser
aux bénéfices, parce que… (il s’interrompait) mais je n’arrive pas à le
comprendre, l’argent ne l’intéresse pas. Il veut s’affirmer. Une véritable
frénésie.
    — Une maladie, disait Yves.
    — Ton grand-père Carlo lui ressemblait, murmurait
Nathalie.
    — Une manière de s’exprimer, disait Alexandre.
    — Ou de se mutiler. (Yves se levait.) Je veux rester
entier, ajoutait-il.
    Il fermait la revue, embrassait sa mère, se penchait sur
Sonia, la bousculait en riant, puis se tournait vers son père :
    — Tu ne crois pas que le désir de pouvoir, ou bien l’envie
de posséder sont des besoins primitifs, des façons si médiocres, si élémentaires
de s’exprimer ?
    Cette phrase qui comblait Alexandre justifiait ses choix, si
bien qu’il osait à peine répondre, qu’il hochait la tête timidement.
    — Peut-être, disait-il, mais Roland n’a pas eu nos
facilités.
    — Personne ne l’accuse, répondait Yves. Intéresse-le
aux bénéfices. Sa fille sera plus calme. Je vais voir Sam, disait-il encore.
    Nathalie et Alexandre se regardaient cependant que les pas
de leur fils résonnaient dans la ruelle déserte.
    — Et Christiane, demandait

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