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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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dressa comme sous le coup d’un
aiguillon. Une nouvelle fois la magie opérait : la même bouffée de bonheur,
une envie irrésistible de se blottir contre lui, de ne plus penser à rien. Il
venait vers elle à grandes enjambées avec sur les lèvres un sourire conquérant
et heureux.
    Sans se soucier de ses camarades qui s’étaient
levés, il avait saisi Léa et la tenait fort, serrée dans ses bras.
    — Enfin, ma jolie, je te tiens. Tu m’as
manqué. Je ne pensais pas que tu me manquerais autant. Laisse-moi te regarder… malgré
ce vilain uniforme, tu es ravissante.
    Léa ne disait rien, se laissait emporter par
un tendre bien-être ; surtout, ne pas bouger, laisser sa chaleur se mêler
à la sienne, sentir son corps contre le sien. Sa main sur ses cheveux qui descendait
vers sa nuque, la prenait comme on prend un petit animal, chiot ou chaton. Ce
geste la soumettait à lui plus sûrement qu’aucun autre et il le savait. Qu’avait-elle
eu besoin de le lui dire un jour de confidence amoureuse ? Une toux
discrète les ramena à la réalité.
    — Mon commandant…
    — Oui, Bernier, asseyez-vous.
    — Nous avons invité mademoiselle Delmas
chez les Anglais.
    — Vous avez bien fait. Où habites-tu ?
    — Dans un immeuble réquisitionné pour
la Croix-Rouge, sinistre et froid, où nous sommes parquées comme des
pensionnaires avec interdiction de sortir passé 21 heures.
    — On va arranger ça. Tu dépends de qui ?
    — De Laureen Kennedy.
    — Laureen ! c’est une vieille amie.
Je ne savais pas qu’elle était là. Je la reverrais avec plaisir. C’est une
femme charmante, un peu folle. Tu t’entends bien avec elle ?
    — Ça va. Elle m’agace un peu avec les
Américains par-ci, les Américains par-là. Elle ne jure que par les États-Unis. Pour
elle, l’Europe est un pays de sauvages et la France, après l’Allemagne quand même,
est le plus dégénéré de tous. Ça m’énerve.
    — Cela ne m’étonne pas, chauvine comme
tu es, fit Tavernier en éclatant de rire.
    Que c’était bon d’entendre rire ! Léa
avait l’impression qu’elle n’avait plus entendu rire depuis qu’elle était à
Nuremberg. D’autres se firent sans doute la même réflexion car autour d’eux on
les regardait d’un air à la fois réprobateur et surpris.
    — Je crois qu’on n’apprécie pas trop, lui
chuchota-t-elle à l’oreille.
    — Hélas, mon cœur, tu as raison. On ne
peut pas leur en vouloir. Pourtant la vie continue, il faut réapprendre à vivre,
à rire, à s’amuser et à s’aimer, dit-il en lui prenant la main.
    Léa ne demandait pas mieux ; quitter
ces lieux mortifères et partir loin sous des cieux plus doux, dans des pays où
les habitants ne connaissaient pas la guerre. Elle rêvait sans doute ; quel
pays n’avait jamais connu la guerre ? Aucun, bien sûr.
    Quand elle vit
François Tavernier, Laureen Kennedy se précipita vers lui avec un empressement
qui sembla suspect à Léa. Avaient-ils été amants, ces deux-là ? Non !
la manière dont ils s’étreignaient évoquait plutôt celle de vieux copains de
collège ou de caserne. C’était du genre : « Comment vas-tu-yau de
poêle et toi-le à matelas. » Mais cette bouffée de jalousie l’inquiéta. N’était-elle
pas plus amoureuse de lui qu’elle ne le croyait ? Léa savait aimer
François mais son instinct lui disait de se méfier ; que de cet homme elle
aurait le meilleur mais le pire aussi et le pire, Léa n’en voulait pas – d’où
cette attitude à la fois d’abandon et de réserve, presque de froideur, qui
déroutait Tavernier chaque fois qu’il la retrouvait.
    Dans cette relation si forte, elle croyait
se méfier de lui ; en fait, c’était d’elle. Pourquoi n’arrivait-elle pas à
s’abandonner sans arrière-pensées ? Il ne lui était venu de lui que de
choses bonnes. De quoi avait-elle peur ?
    Laureen Kennedy accorda la permission de
minuit à la condition qu’il viendrait dîner le lendemain en sa compagnie pour « parler
du bon vieux temps ». Tavernier accepta et dit qu’il passerait prendre Léa
à 18 heures et qu’il comptait qu’elle se fit belle.
    — Entrez, entrez,
soyez les bienvenus, dit en français une voix avec un fort accent anglais.
    L’officier britannique qui leur ouvrit la
porte resta bouche bée, comme statufié, une bouteille de champagne au bout de
son bras levé.
    — George ! s’exclama Léa.
    Dans sa joie de revoir George McClintock, elle
se jeta

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