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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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vaccin sur moi.
    «— Il n’en est pas question. Toi, tu es
retenue pour une autre expérience. Mais si tu ne veux pas me donner ton fils, tue-le.
    Sarah alluma une autre cigarette, les traces
de ses joues devenues rouges illuminaient son visage pâle.
    «— Je restai éveillée toute la nuit, serrant
contre moi mon bébé. Au petit matin, épuisée, je m’endormis. À mon réveil l’enfant
avait disparu. Devant moi Rosa Schaeffer me regardait en souriant.
    «— As-tu passé une bonne nuit ? Sans
doute puisque te voilà debout.
    «— Où est mon fils ?
    «— Ton fils ? Ah oui, ton fils. Ne
t’inquiète pas, il va bien.
    «— Rendez-le moi.
    «— On te le rendra mais à une condition.
    «— Laquelle ?
    «— Cette nuit, une Tzigane a mis au
monde une petite fille. Elle est difforme mais se porte bien. Nous ne pouvons
la laisser vivre, elle doit mourir. C’est toi qui vas la tuer.
    «— Moi !
    «— Oui, en échange de la vie de ton
fils.
    « Je la regardai incrédule : je
devais tuer un enfant pour sauver le mien. J’éclatai de rire.
    «— Cela te fait rire, tant mieux.
    « Elle sortit me laissant bouleversée, mais
riant comme une folle. Peu après, Schwester Ingrid entra, portant un
paquet d’où sortaient les cris d’un nouveau-né, suivie par le docteur Schaeffer
tenant mon petit garçon par les pieds… Je poussai un hurlement et me précipitai
vers lui.
    «— Ne bouge pas ou je lui fracasse la
tête contre le mur.
    « Je m’arrêtai net.
    «— Tue la petite fille et je te le
rends.
    « Scbwester Ingrid me tendit le bébé. Je ne remarquai aucune difformité apparente. Quand il
fut dans mes bras, une tendre lassitude m’envahit. Ses abondants cheveux noirs
avaient la douceur de là soie. Machinalement je posai un baiser sur la petite
tête. Les deux femmes me regardaient, attentives.
    «— Tue-la, me dit presque tendrement
Rosa Schaeffer,
    « Je secouai la tête en lui tendant l’enfant.
    «— Tue-la ou je tue ton fils.
    Sarah haletait, les mains crispées sur sa
poitrine. Tout bas, tremblante, Léa lui dit :
    — Arrête, ne dis plus rien, tu te fais
mal.
    — Ce n’est pas le mal que je me fais
que tu redoutes, mais celui que je peux te faire, dit Sarah, d’une voix
sifflante.
    Debout l’une en face de l’autre, les deux
amies s’observaient. Sarah se détourna et continua.
    — Mon fils, toujours tenu à bout de
bras par le docteur Schaeffer, le sang à la tête, s’étouffait.
    «— Tue-la.
    «— Je ne peux pas.
    « Elle balançait mon bébé dont les cris
devenaient de plus en plus faibles, le visage de plus en plus rouge. Alors je
pris le cou de la petite fille entre mes doigts et je serrai…
    Glacée, paralysée, Léa avait du mal à
retenir ses nausées.
    —  à ce moment-là, une femme à moitié nue, ensanglantée, surgit avec des hurlements
tels qu’ils suspendirent mon geste. Elle m’arracha l’enfant. Alors, avec
horreur, je regardai ma main… La Tzigane pressant son nouveau-né sur elle nous
regardait avec fureur en reculant vers la porte ; elle ne l’atteignit
jamais. Une rafale de mitraillette la coupa presque en deux. Quant au bébé, je
m’approchai du petit corps, je me fis la réflexion : « elle est toute
chaude… »
    « Je posai doucement le cadavre sur
celui de sa mère. Pliée en deux, je me mis à vomir. Rosa Schaeffer me regardait,
ses yeux étincelaient de joie mauvaise, un rictus tordait sa bouche. Je tombai
à genoux…, je me traînai jusqu’à elle tendant mes mains vers mon fils.
    «— Donne-le moi !
    « Elle rit.
    «— Ne t’inquiète pas, je vais te le
donner.
    « Je sentis mon corps frémir de joie, d’une
joie démente : je me relevai… elle fit tournoyer le bébé…, de plus en plus
vite… je criai, tentai de l’attraper… elle me repoussa du pied et… fracassa la
petite tête contre le mur.
    Accablée, recroquevillée sur elle-même, Léa
glissa sur le sol. De la bave coulait le long du menton de Sarah, son crâne
rasé était mouillé de sueur, ses yeux secs fixaient un coin de la pièce. Elle s’y
dirigea d’une démarche d’automate, se baissa, fit le geste de ramasser quelque
chose, mit ses bras en berceau et alla vers un canapé, berçant le vide en
chantonnant une berceuse allemande. Elle s’assit avec précaution et, toujours
berçant, dit d’une voix douce :
    — Dors, mon petit, dors. Comme tu es
beau… tu dois avoir faim… tiens mon chéri… bois.
    Ouvrant

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