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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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dénoncer certains des
meneurs si j’avais eu plus de présence d’esprit. Mais il n’y aura aucune difficulté
à cela, beaucoup de gens pourront les identifier.
    — Ils ne reviendront donc pas ce soir ?
    — Je vais m’assurer qu’il y a une garde suffisante autour
de l’usine. J’ai rendez-vous avec le capitaine Hanbury dans une demi-heure au poste.
    — Il te faut d’abord une tasse de thé.
    — Du thé ! Oui, je ferais sans doute bien d’en prendre.
Il est six heures et demie et j’en ai peut-être pour un bon moment. Ne restez pas
debout à m’attendre, maman.
    — Parce que tu crois que je vais aller me coucher sans savoir
si tu es bien rentré, hein ?
    — Ah, peut-être pas, en effet.
    Il hésita quelques secondes.
    — Mais si j’ai le temps, je passerai à Crampton après mon
entretien avec les policiers, ainsi qu’avec Hamper et Clarkson.
    Leurs regards se croisèrent et ils se regardèrent fixement quelques
instants.
    — Pourquoi veux-tu passer à Crampton ? demanda-t-elle.
    — Pour prendre des nouvelles de Miss Hale.
    — Je vais envoyer quelqu’un. Williams doit porter le lit
à eau qu’elle était venue demander. Il prendra de ses nouvelles.
    — Je dois y aller moi-même.
    — Tu ne vas pas te déplacer seulement pour cela ?
    — Non, pas seulement. Je tiens à la remercier pour la façon
dont elle s’est interposée entre la foule et moi.
    — Pourquoi es-tu descendu, d’ailleurs ? C’était te
jeter dans la gueule du loup !
    Il lui lança un regard perçant, vit qu’elle ne savait pas ce
qui s’était passé dans le salon entre Margaret et lui ; et il répondit par
une autre question :
    — Vous n’aurez pas peur de rester ici sans moi en attendant
que j’obtienne de la police une garde ? Ne vaudrait-il pas mieux envoyer Williams
chercher des agents maintenant, pour qu’ils soient là quand nous aurons fini de
prendre le thé ? Il n’y a pas de temps à perdre. Je dois être parti d’ici un
quart d’heure.
    Mrs Thornton sortit. Ses domestiques furent surpris par
les ordres confus et hésitants qu’elle donna, alors que d’habitude, ils étaient
nets et précis. Mr Thornton resta dans la salle à manger, s’efforçant de réfléchir
à ce qu’il avait à faire au poste de police et pensant en réalité à Margaret. Tout
lui semblait flou et vague, sauf... hormis... excepté... le contact de ses bras
autour de son cou, cette douce étreinte qui le faisait rougir et pâlir lorsqu’il
y repensait.
    Ils auraient pris le thé en silence s’il n’y avait eu Fanny,
qui ne cessa de décrire ses propres émotions, l’angoisse qu’elle avait éprouvée,
surtout lorsqu’elle les avait cru partis, puis le malaise et les tremblements qui
l’avaient saisie des pieds à la tête.
    — Oh, assez ! dit son frère en se levant de table.
La réalité m’a suffi.
    Il se disposait à quitter la pièce lorsque sa mère l’arrêta en
lui posant une main sur le bras.
    — Tu reviendras avant d’aller chez les Hale ? demanda-t-elle
d’une voix basse et inquiète.
    — Je sais à quoi m’en tenir, marmonna Fanny pour elle-même.
    — Pourquoi ? Tu penses qu’il sera trop tard pour les
déranger ?
    — John, reviens auprès de moi ce soir, ce soir seulement.
Il se fera tard pour Mrs Hale. Mais ce n’est pas pour cela que je t’en prie.
Tu iras demain... rentre ce soir, John !
    Elle avait rarement demandé une faveur à son fils, car elle était
beaucoup trop fière pour cela, mais jamais elle n’avait demandé en vain.
    — Je rentrerai directement dès que j’aurai terminé ce que
j’ai à faire. Tu me promets de prendre de leurs nouvelles ? De ses nouvelles ?
    Mrs Thornton ne fut pas une compagne très bavarde pour Fanny,
ni une auditrice attentive pendant l’absence de son fils. Mais à son retour, ses
yeux et ses oreilles étaient à l’affût de tous les détails qu’il pouvait donner
sur les mesures visant à garantir sa propre sécurité et celle des ouvriers qu’il
avait décidé d’employer, si venaient à se reproduire les violents désordres de la
journée. Son objectif était clair. Ceux qui avaient pris part à l’émeute devaient
naturellement s’attendre à subir châtiments et représailles. Tout ceci était nécessaire
pour assurer la protection de la propriété et pour que la volonté du propriétaire,
coupante et nette comme une lame d’épée, parvienne à ses objectifs.
    — Maman ! Vous savez ce que

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