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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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tel ministre, influa sur la politique étrangère, contrôla la politique tout court, représenta si bien le règne qu’on finit dans l’opinion du temps et la mémoire qu’on en garda par lui faire porter la responsabilité de ses pires défauts. Cette femme eut effectivement beaucoup d’influence auprès d’un très mauvais monarque. On en arriva à tordre le raisonnement pour en arriver à ce sophisme : voyez à quoi le pouvoir est conduit quand il est sous l’influence d’une femme.
    Elle ne fut pas la seule sur la liste noire des grandes impopulaires. Une autre après elle fut encore plus haïe : Marie-Antoinette, l’Autrichienne conspuée par le peuple, celle que l’on appelait Madame Déficit à cause de sa propension (réelle) à creuser des trous un peu plus profonds dans des caisses déjà vides. Deuxième exemple qui tombait à pic pour discréditer un peu plus l’Ancien Régime et justifier ce à quoi le nouveau, après 89, va aboutir : exclure les femmes de la vie publique de la cité.
    Soyons bien clair : le procès qui est fait en particulier à nos deux antihéroïnes n’est pas sans fondement. La Pompadour, protégeant les arts et les artistes (Voltaire en tête), fut un vrai mécène. Elle ne fut pas une politique de grande ampleur, ne songeant qu’à servir son clan, jouant des carrières sur des caprices, poussant la France à un renversement d’alliances catastrophique juste avant la guerre de Sept Ans, se piquant de stratégie militaire, à laquelle elle ne connaissait rien : on prétend qu’elle suivait les mouvements des armées en posant ses mouches sur les cartes pour y faire des repères. Et dépensière avec ça. Il lui fallait des résidences et des palais, dont le plus célèbre, offert par le roi, se trouve toujours à Paris, rue du Faubourg-Saint-Honoré : l’Élysée.
    Marie-Antoinette le fut encore plus. Ses malheurs pendant la Révolution la transformèrent : elle n’entendit rien aux aspirations profondes du pays, elle poussa à des décisions catastrophiques mais elle eut, au moment de la prison, du procès, de l’échafaud, une attitude d’une indéniable dignité. Que d’inconséquence, que de frivolité avant 89 ! Elle joue, elle dépense, elle rit, elle s’amuse sans rien comprendre de ce qui se passe dans le pays dont elle est reine et fait tout pour l’empêcher de changer. Elle prend part à la cabale contre le réformateur Turgot et sa vertueuse volonté de mettre un peu d’austérité à la tête de l’État : il a osé demander au roi de refuser les pensions énormes qu’elle espérait pour sa grande amie la Polignac. Turgot est remplacé par Necker. Elle se déchaîne contre Necker parce que, en rendant publics les comptes du royaume, l’impudent a osé publier aussi le détail des dépenses de la Cour.
    Et après ? En quoi toutes les femmes devraient payer pour deux exemples ? L’injustice du raisonnement tient bien sûr à ce qu’on fait porter les défauts de deux individus à un genre tout entier. Louis XV était un gouvernant encore plus pathétique que ne l’était sa favorite ; les aristocrates bornés qui formaient la Cour au temps de Louis XVI étaient encore plus acharnés que la reine à faire barrage au changement : tous étaient des hommes. Personne n’en a jamais déduit qu’il aurait donc été raisonnable d’écarter à jamais le genre masculin d’un pouvoir dont tout montre qu’il est incapable de le gérer.
    Bien entendu, les raisons profondes qui expliquent la domination masculine sont complexes et viennent de loin : ni notre marquise ni notre reine ne suffisent à l’expliquer. Mais leurs exemples serviront beaucoup pour le justifier au passage. 1789 veut rompre en tout point avec tous les vices qui ont conduit la France à sa perte : le gouvernement des femmes est de ceux-là. Pour ne plus jamais revoir de Pompadour, faisons simple : renvoyons toutes les femmes « aux devoirs de leur sexe », la cuisine et les enfants jusqu’à la fin des temps.
    Aurait-on regardé au-delà de nos frontières, on aurait pu s’apercevoir pourtant du nombre impressionnant de femmes d’État que compta ce siècle. Après Pierre le Grand, et pendant près de cent ans, la Russie fut presque en continuité gouvernée par des tsarines, jusqu’à Catherine II, la « Grande Catherine ». L’Autriche et la Hongrie connaissent au temps de Louis XV leur plus grande souveraine, l’impératrice Marie-Therèse –

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