Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
une croisade en Terre sainte : les derniers Francs avaient plié bagage depuis quarante ans. Peu importe, Humbert lance des préparatifs qui suffisent à le ruiner définitivement. Homme de foi, il entend néanmoins continuer sur la voie du salut : il émet le vœu de vendre sa province au pape. La transaction échoue. C’est donc par pur hasard que Philippe VI de Valois, roi de France, fait l’affaire. Elle est scellée par le traité de Romans (1349). La vente s’éleva à 200 000 florins, somme coquette. On ignore si Humbert en profita ou non. Il se fit moine dominicain, dans l’idée de devenir évêque de Paris d’abord, puis pape : il mourut avant d’être l’un et l’autre, nul ne sait donc s’il avait l’intention, une fois sur le trône de saint Pierre, de récupérer au profit du bon Dieu son premier patrimoine. Dans ce cas, à l’heure qu’il est, nos Dauphinois seraient peut-être italiens.
La Bretagne
Pour acquérir telle ou telle province, les mariages comptent pour beaucoup : on oublie l’obstination qu’il faut pour qu’ils réussissent enfin à produire le résultat qu’on en attend. Déplaçons-nous en Bretagne. Officiellement, son duc est vassal du roi de France, mais ceux qui se succèdent ont toujours été assez puissants pour secouer la tutelle quand elle leur pèse et toujours très tentés de s’en émanciper franchement. À la fin du xv e , le duc s’appelle François II. Il n’a pas de fils mais deux filles, dont l’aînée est la célèbre duchesse Anne (1477-1514). Elle est un parti très convoité. Le père est tenté par l’alliance anglaise. On fiance donc la fille à un prince de Galles. Il meurt. On trouve un autre héritier anglais, le mariage ne se fait pas. Changement de cap : Anne épouse, mais par correspondance, un autre héritier fort doté, Maximilien d’Autriche. Nous le connaissons déjà, c’est lui qui a épousé Marie de Bourgogne, la fille de Charles le Téméraire, dont il est tout juste veuf. Rage du roi de France, Charles VIII (le fils de Louis XI) : il avait déjà les Habsbourg à l’est, du côté de la Franche-Comté. Il les aurait en plus à l’ouest ! C’est impensable. Ses juristes ressortent donc un traité fort opportun qui interdit à l’héritière de Bretagne de se marier sans l’accord du trône capétien. On ne lésine pas pour le faire appliquer : l’armée est lancée sur la Bretagne. L’époque était d’un romantisme tout relatif, c’est après le siège de Rennes que Charles enlève Anne et l’épouse, sans même attendre l’annulation de son union avec Maximilien. Nouveau coup du sort : il meurt jeune, sans laisser d’enfants (tous sont morts avant lui) et c’est un de ses cousins qui devient roi sous le nom de Louis XII. Que faire de notre Bretonne ? La mariée était trop belle, un autre traité avait prévu le coup : la pauvre est contrainte d’épouser aussi le nouveau roi de France. De ce mariage naît une fille, Claude de France. Pour être tout à fait sûr de son avenir et de celui de sa dot, on donne un nouveau tour d’écrou à l’alliance française. Anne n’est pas d’accord, mais elle est repartie s’occuper de sa Bretagne et on se passe bien de son avis. On marie donc Claude au jeune Angoulême, celui qui est destiné à son tour à devenir roi de France sous le nom de François I er . Il faut attendre la mort de Claude pour que la vieille Armorique soit définitivement rattachée au royaume. On peut donc écrire que la Bretagne est devenue française par mariage, mais il ne faut pas oublier qu’il en aura fallu trois.
La Flandre, province perdue
Curieusement, les histoires de France aiment les provinces acquises et oublient celles qui furent perdues. La Catalogne, après le partage de Verdun de 843, était dans l’orbite de la Francie occidentale, mais elle devint assez rapidement autonome. Le comté de Flandre, en revanche, vaste territoire qui irait de l’actuel département du Nord à la Hollande, resta durant des siècles sous la dépendance du roi de France. Le peuple flamand, on en a parlé déjà, n’accepta jamais vraiment cette tutelle, et plus d’une fois il fallut lancer l’armée pour venir à bout de ses révoltes. Par ailleurs, on l’a vu plus haut, le mariage de Philippe le Hardi avec l’héritière de ce comté va modifier la donne, en créant une partie des États de par-deçà de la gigantesque Bourgogne quasi indépendante. Une telle
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