Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
Vous m'aviez dit que vous faisiez passer les vingt-mille livres de Modène à Milan, et on n'en a fait passer que la moitié. Des trois cent mille livres qui devaient être soldées à Ferrare, il n'a été soldé que la moitié. Quant à Livourne, bien loin de nous présenter de l'argent, on nous offre de cinq à six cent mille liv., portées sans aucune forme légale. La compagnie Flachat, qui a toutes les ressources de l'armée, qui a tous les fonds, qui fait tous ses services en promesses, est la seule qui ait les moyens de pourvoir aux besoins urgens du moment. Faites qu'elle verse dans la caisse du payeur général de l'armée quinze cent mille liv. Vous devez fournir à nos besoins, et depuis deux mois, l'ordonnateur crie que tous les services manquent.
Je vous prie donc, citoyen commissaire, de songer que toute l'armée est en mouvement, que nous sommes en présence de l'ennemi, que le moindre retard peut nous être funeste ; occupez-vous donc à faire fournir à l'ordonnateur l'argent qui est nécessaire : nous sommes ici à la veille des plus grands événemens. Si la quatre-vingt-troisième demi-brigade, aujourd'hui soixante-quinzième, était partie de Marseille, conformément à l'ordre que j'ai donné, nous n'aurions rien à craindre, mais trois mille hommes de bonne troupe de moins, dans des circonstances comme celles-ci, sont pour nous un terrible malheur.
La quarantième même arrive bien tard : il paraît que tout au plus le premier bataillon arrivera à temps ; cependant, comme nous avons quelques bataillons en route, je vous prie d'expédier un courrier au général Kellermann, pour le requérir et le prier de faire filer ce qu'il y a de disponible. Toutes les troupes de l'Empire sont arrivées en poste avec une célérité surprenante ; ils paraissent vraiment décidés à faire de grands sacrifices, et nous, on nous a livrés à nous-mêmes : de belles promesses et quelques petits corps de troupe sont tout ce qu'on nous a donné.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Verone, le 14 brumaire an 5 (4 novembre 1796).
Au chef de l'état-major.
Le général Masséna a évacué aujourd'hui Bassano, à cinq heures du matin, l'ennemi se trouvant en force à Castel Franco. La soixante-quinzième doit être arrivée, à cette heure, à Vicence. Le général Augereau est déjà à Montebello : indépendamment des hussards du premier régiment, ce général aura encore le vingtième de dragons, fort de trois cent cinquante hommes. J'ai donné au général Meynier le commandement de Verone, au général Kilmaine le commandement depuis le fort de la Chiuza jusqu'à Rovigo, ainsi que celui de Mantoue ; il se tiendra à Verone. Picot, qui est parti à minuit de Padoue, et qui a été jusque dans les postes ennemis, m'assure qu'ils ne sont pas plus de 8 à 9,000 hommes. Aucune de leurs patrouilles n'a encore paru à Padoue. Arrangez-vous bien avec le général Vaubois pour qu'il exécute comme il faut les dispositions du plan. J'espère que cette fois nous pourrons, d'un seul coup, donner du fil à retordre. Si cette lettre vous rencontre en chemin, faites-en part au général Vaubois, et par Dieu recommandez-lui de ne pas ménager les courriers. Cet adjoint peut continuer jusque chez le général Vaubois et me renvoyer Louis. Je ne serai pas fâché que le citoyen Junot reste jusqu'à l'attaque de demain. S'il est convenu qu'on doive attaquer demain, qu'il fasse en sorte que j'aie des nouvelles trois fois dans la journée.
En passant la Chiuza, donnez un petit coup d'oeil, et assurez-vous qu'il n'y manque pas de munitions de bouche ; assurez-vous aussi de la situation du pont et de l'espèce de garde qu'on y fait, cela toutefois autant que la nuit vous le permettra.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Vérone, le 15 brumaire an 5 (5 novembre 1796).
Au général Baraguay d'Hilliers.
Nous sommes en présence de l'ennemi, qui a passé la Piave. Vous sentez combien nous avons besoin de troupes ; activez donc la marche de tous les dépôts et de tous les bataillons qui nous arrivent, bien entendu que vous prendrez des mesures pour que les fusils qui sont à Crémone soient répartis aux dépôts de Lodi et de Cassano, et que tous les soldats qui nous viendront soient armés. Vous dirigerez les dépôts des divisions d'Augereau et de Masséna sur Verone, où ils prendront de nouveaux ordres à l'état-major ; les dépôts de Mantoue à l'ordinaire, et les dépôts de la division du général Vaubois, à
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