Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
se résoudre à punir aussi sévèrement toute une ville pour le crime de quelques prêtres ? J'ai envoyé chez eux cinquante officiers que j'avais faits prisonniers, pour qu'ils allassent éclairer leurs compatriotes, et leur faire sentir les dangers qu'une extravagance pareille à celle-ci leur ferait courir. J'ai fait, ce matin, venir tous les moines, tous les prêtres ; je les ai rappelés aux principes de l'Évangile, et j'ai employé toute l'influence que peuvent avoir la raison et la nécessité, pour les engager à se bien conduire : ils m'ont paru animés de bons principes ; j'ai envoyé à Ravennes le général des camaldules, pour éclairer cette ville, et éviter les malheurs qu'un plus long aveuglement pourrait produire ; j'ai envoyé à Cézène, patrie du pape actuel, le P. don Ignacio, prieur des bénédictins.
Le général Victor continua hier sa route, et se rendit maître de Forti ; je lui ai donné l'ordre de se porter aujourd'hui à Cézène. Je vous ai envoyé différentes pièces qui convaincront l'Europe entière de la folie de ceux qui conduisent la cour de Rome. Je vous enverrai aussi deux autres affiches, qui vous convaincront de la démence de ces gens-ci ; il est déplorable de penser que cet aveuglement coûte le sang des pauvres peuples, innocens instrumens et de tout temps victimes des théologiens. Plusieurs prêtres, et entre autres un capucin, qui prêchaient l'armée des catholiques, ont été tués sur le champ de bataille.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Forti, le 15 pluviose an 5 (3 février 1797).
Au directoire exécutif.
Je vous fais passer, citoyens directeurs, le mémoire que m'envoie le citoyen Faypoult ; vous frémirez d'indignation, lorsque vous y verrez avec quelle impudence on vole la république. Je donne les ordres pour que l'on arrête le citoyen Legros, contrôleur de la trésorerie, et le commissaire des guerres Lequeue ; j'engage le citoyen Faypoult à faire arrêter à Gênes les citoyens Paillaud et Peregaldo. Vous ne souffrirez pas, sans doute, que les voleurs de l'armée d'Italie trouvent leur refuge à Paris. Pendant que je me battais et que j'étais éloigné de Milan, le citoyen Flachat s'en est allé, emportant cinq à six millions à l'armée, et nous a laissés dans le plus grand embarras. Si l'on ne trouve pas de moyens d'atteindre la friponnerie manifestement reconnue de ces gens-là, il faut renoncer au règne de l'ordre, à l'amélioration de nos finances et à maintenir une armée aussi considérable en Italie.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Bologne, le 18 pluviose an 5 (6 février 1797).
Proclamation.
L'armée française va entrer sur le territoire du pape ; elle protégera la religion et le peuple.
Le soldat français porte d'une main la baïonnette, sûr garant de la victoire, et offre, de l'autre, aux différentes villes et villages paix, protection et sûreté... Malheur à ceux qui la dédaigneraient, et qui, de gaîté de coeur, séduits par des hommes profondément hypocrites et scélérats, attireraient dans leurs maisons la guerre et ses horreurs, et la vengeance d'une armée qui a, dans six mois, fait cent mille prisonniers des meilleures troupes de l'empereur, pris quatre cents pièces de canon, cent dix drapeaux, et détruit cinq armées.
ART. 1er. Tout village ou ville, où, à l'approche de l'armée française, on sonnera le tocsin, sera sur-le-champ brûlé, et les municipaux seront fusillés.
II. La commune sur le territoire de laquelle sera assassiné un Français sera sur-le-champ déclarée en état de guerre ; une colonne mobile y sera envoyée ; il y sera pris des otages, et il y sera levé une contribution extraordinaire.
III. Tous les prêtres, religieux et ministres de la religion, sous quelques noms que ce soit, seront protégés et maintenus dans leur état actuel, s'ils se conduisent selon les principes de l'Évangile, et, s'ils sont les premiers à le transgresser, ils seront traités militairement, et plus sévèrement que les autres citoyens.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Pezaro, le 19 pluviose an 5 (7 février 1797).
Au directoire exécutif.
Le général Bernadotte m'écrit de Metz pour m'annoncer que les six demi-brigades venant de l'armée de Sambre-et-Meuse, qui, au compte du général Moreau, devaient être de deux mille quatre cents hommes chacune, ce qui devrait faire quatorze mille quatre cents hommes, n'en font que douze mille huit cents. En supposant que les six demi-brigades
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