Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
une force de quinze a seize mille hommes, et se renferma dans la place.
Le duc de Montebello lui envoya un aide-de-camp porteur d'une sommation ; mais des bouchers et quelques centaines de gens sans aveu, qui étaient les satellites de l'archiduc Maximilien, s'élancèrent sur le parlementaire, et l'un d'eux le blessa. L'archiduc ordonna que le misérable qui avait commis une action aussi infâme, fût promené en triomphe dans toute la ville, monté sur le cheval de l'officier français et environné par la landwehr.
Après cette violation inouie du droit des gens, on vit l'affreux spectacle d'une partie d'une ville qui tirait contre l'autre, et d'une cité dont les armes étaient dirigées contre ses propres concitoyens.
Le général Andréossi, nommé gouverneur de la ville, organisa dans chaque faubourg, des municipalités, un comité central des subsistances, et une garde nationale, composée des négocians, des fabricans et de tous les bons citoyens, armés pour contenir les prolétaires et les mauvais sujets.
Le général gouverneur fit venir à Schoenbrunn une députation des huit faubourgs : l'empereur la chargea de se rendre dans la cité pour porter une lettre écrite par le prince de Neufchâtel, major-général, à l'archiduc Maximilien. Il recommanda aux députés de représenter à l'archiduc, que, s'il continuait à faire tirer sur les faubourgs, et si un seul de ses habitans y perdait la vie par ses armes, cet acte de frénésie, cet attentat envers les peuples, briserait à jamais les liens qui attachent les sujets à leurs souverains.
La députation entra dans la cité, le 11 à dix heures du matin, et l'on ne s'aperçut de son arrivée que par le redoublement du feu des remparts. Quinze habitans des faubourgs ont péri et deux Français seulement ont été tués.
La patience de l'empereur se lassa : il se porta avec le duc de Rivoli sur le bras du Danube qui sépare la promenade du Prater des faubourgs, et ordonna que deux compagnies de voltigeurs occupassent un petit pavillon sur la rive gauche, pour protéger la construction d'un pont. Le bataillon de grenadiers qui défendait le passage, fut chassé par ces voltigeurs et par la mitraille de quinze pièces d'artillerie. A huit heures du soir, ce pavillon était occupé, et les matériaux du pont réunis. Le capitaine Pourtalès, aide-de-camp du prince de Neufchâtel, et le sieur Susaldi, aide-de-camp du général Boudet, s'étaient jetés des premiers à la nage, pour aller chercher les bateaux qui étaient sur la rive opposée.
A neuf heures du soir, une batterie de vingt obusiers, construite par les généraux Bertrand et Navelet, à cent toises de la place, commença le bombardement : dix-huit cents obus furent lancés en moins de quatre heures, et bientôt toute la ville parut en flammes. Il faut avoir vu Vienne, ses maisons à huit et neuf étages, ses rues resserrées, cette population si nombreuse dans une aussi étroite enceinte, pour se faire une idée du désordre, de la rumeur et des désastres que devait occasionner une telle opération.
L'archiduc Maximilien avait fait marcher, à une heure du matin, deux bataillons en colonne serrée, pour tâcher de reprendre le pavillon qui protégeait la construction du pont. Les deux compagnies de voltigeurs qui occupaient ce pavillon qu'elles avaient crénelé, reçurent l'ennemi à bout portant : leur feu et celui des quinze pièces d'artillerie qui étaient sur la rive droite, couchèrent par terre une partie de la colonne ; le reste se sauva dans le plus grand désordre.
L'archiduc perdit la tête au milieu du bombardement, et au moment surtout où il apprit que nous avions passé un bras du Danube, et que nous marchions pour lui couper la retraite. Aussi faible, aussi pusillanime qu'il avait été arrogant et inconsidéré, il s'enfuit le premier et repassa les ponts. Le respectable général O'Reilly n'apprit que par la fuite de l'archiduc, qu'il se trouvait investi du commandement.
Le 12, à la pointe du jour, ce général fit prévenir les avant-postes qu'on allait cesser le feu, et qu'une députation allait être envoyée à l'empereur.
Cette députation fut présentée à S. M. dans le parc de Schoenbrunn. Elle était composée de messieurs le comte de Dietricshtein, maréchal provisoire des états ; le prélat de Klosternenbourg ; le prélat des Écossais ; le comte Perges ; le comte Veterain ; le baron de Bartenstein ; M. de Mayenberg ; le baron de Hafen,
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