Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
de tuer quatre à cinq mille hommes à l'ennemi.
Les escadrons de service de la garde débouchèrent dans la plaine. Le général Duhesme, officier d'une rare intrépidité et d'une longue expérience, déboucha sur le chemin de Sens ; l'ennemi fut poussé dans toutes les directions, et notre armée défila sur les ponts.
La vieille garde n'eut qu'à se montrer : l'ardeur des troupes du général Gérard et du général Pajol l'empêcha de participer à l'affaire.
Les habitans de Montereau n'étaient pas restés oisifs ; des coups de fusil tirés par les fenêtres augmentèrent les embarras de l'ennemi. Les Autrichiens et les Wurtembergeois jetèrent leurs armes. Un général wurtembergeois a été tué. Un général autrichien a été pris, ainsi que plusieurs colonels, parmi lesquels se trouve le colonel du régiment de Collorédo, pris avec son état-major et son drapeau.
Dans la même journée, les généraux Charpentier et Alix débouchèrent de Melun, traversèrent la forêt de Fontainebleau et en chassèrent les cosaques et une brigade autrichienne. Le général Alix arriva à Moret.
Le duc de Tarente arriva devant Bray.
Le duc de Reggio poursuivit les partis ennemis de Provins sur Nogent.
Le général de brigade Montbrun, qui avait été chargé avec dix-huit cents hommes, de défendre Moret et Fontainebleau, les avait abandonnés et s'était retiré sur Essonne. Cependant la forêt de Fontainebleau pouvait être disputée pied à pied.
Le major-général a ordonné la suspension du général Montbrun et l'a envoyé devant un conseil d'enquête.
Une perte qui a sensiblement affecté l'empereur est celle du général Château. Ce jeune officier, qui donnait les plus grandes espérances, a été blessé mortellement sur le pont de Montereau, où il était avec les tirailleurs. S'il meurt, et le rapport des chirurgiens donne peu d'espoir, il mourra du moins accompagné des regrets de toute l'armée, mort digne d'envie et bien préférable à l'existence, pour tout militaire qui ne la conserverait qu'en survivant à sa réputation, et en étouffant les sentimens que doivent lui inspirer dans ces grandes circonstances la défense de la patrie et l'honneur du nom français.
Le palais de Fontainebleau a été conservé. La général autrichien Hardeck, qui est entré dans la ville, y avait placé des sentinelles pour le défendre des excès des cosaques, qui sont cependant parvenus à piller des portiers et à enlever des couvertures dans les écuries. Les habitans ne se plaignent point des Autrichiens, mais de ces Tartares, monstres qui déshonorent le souverain qui les emploie et les armées qui les protègent. Ces brigands sont couverts d'or et de bijoux. On a trouvé jusqu'à huit et dix montres sur ceux que les soldats et les paysans ont tués : ce sont de véritables voleurs de grands chemins.
L'empereur a rencontré dans sa marche les gardes nationales de Brest et du Poitou. Il les a passées en revue : «Montrez, leur dit-il, de quoi sont capables les hommes de l'Ouest ; ils furent de tout temps les fidèles défenseurs de leur pays, et les plus fermes appuis de la monarchie.»
S. M. a passé la nuit du 19 au château de Surville, situé sur les hauteurs de Montereau.
Les habitans se plaignent beaucoup des vexations du prince royal de Wurtemberg.
Ainsi, l'armée de Schwartzenberg se trouve entamée par la défaite de Kleist, ce corps en ayant toujours fait partie, par la défaite de Wittgenstein, par celle du corps bavarois, de la division wurtembergeoise et du corps du général Bianchi.
L'empereur a accordé aux trois divisions de la vieille garde à cheval cinq cents décorations de la légion-d'honneur ; il en a accordé également à la vieille garde à pied. Il en a donné cent à la cavalerie du général Treilhard, et un pareil nombre à celle du général Milhaud.
On a recueilli une grande quantité de décorations de Saint-Georges, de Saint-Wladimir, de Sainte-Anne, prises sur les hommes qui couvrent les différens champs de bataille.
Notre perte dans les combats de Nangis et de Montereau ne s'élève pas à plus quatre cents hommes tués ou blessés, ce qui, quoique invraisemblable, est pourtant l'exacte vérité.
La ville d'Épernay ayant eu connaissance des succès de notre armée, a sonné le tocsin, barricadé ses rues, refusé le passage à une colonne de deux mille hommes et fait des prisonniers. Que cet exemple soit imité partout, et il est à présumer que bien peu d'hommes des
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