Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
corps à se porter à marches forcées sur Troyes.
Le comte Grouchy, avec la division d'infanterie du général Leval et trois divisions du deuxième corps de cavalerie, passait à la Ferté-sous-Jouarre.
Les avant postes du duc de Trévise étaient entrés à Soissons.
Le 17, à la pointe du jour, l'empereur a marché de Guignes sur Nangis. Le combat de Nangis a été des plus brillans.
Le général en chef russe Wittgenstein était à Nangis avec trois divisions qui formaient son corps d'armée.
Le général Pahlen, commandant les troisième et quatorzième divisions russes et beaucoup de cavalerie, était à Mormant.
Le général de division Gérard, officier de la plus haute espérance, déboucha au village de Mormant sur l'ennemi. Un bataillon du trente-deuxième régiment d'infanterie, toujours digne de son ancienne réputation, qui le fit distinguer il y a vingt ans par l'empereur aux batailles de Castiglione, entra dans le village au pas de charge. Le comte de Valmy, à la tête des dragons du général Treilhard venant d'Espagne, et qui arrivaient à l'armée, tourna le village par sa gauche. Le comte Milhaud, avec le cinquième corps de cavalerie, le tourna par sa droite. Le comte Drouot s'avança avec de nombreuses batteries.
Dans un instant tout fut décidé. Les carrés formés par les divisions russes furent enfoncés. Tout fut pris, généraux et officiers : six mille prisonniers, dix mille fusils, seize pièces de canon et quarante caissons sont tombés en notre pouvoir. Le général Wittgenstein a manqué d'être pris : il s'est sauvé en toute hâte sur Nogent. Il avait annoncé au sieur Billy, chez lequel il logeait à Provins, qu'il serait le 18 à Paris. En retournant, il ne s'arrêta qu'un quart d'heure, et eut la franchise de dire à son hôte : «J'ai été bien battu ; deux de mes divisions ont été prises ; dans deux heures vous verrez les Français.»
Le comte de Valmy se porta sur Provins, avec le duc de Reggio ; le duc de Tarente sur Donnemarie.
Le duc de Bellune marcha sur Villeneuve-le-Comte. Le général de Wrede, avec ses deux divisions bavaroises, y était en position. Le général Gérard les attaqua et les mit en déroute. Les huit ou dix mille hommes qui composaient le corps bavarois étaient perdus, si le général L'héritier, qui commande une division de dragons, avait chargé comme il le devait ; mais ce général, qui s'est distingué dans tant d'occasions, a manqué celle qui s'offrait à lui. L'empereur lui en a fait témoigner son mécontentement. Il ne l'a pas fait traduire à un conseil d'enquête, certain que, comme à Hoff en Prusse et à Znaïm en Moravie, où il commandait le dixième régiment de cuirassiers, il méritera des éloges, et réparera sa faute.
S. M. a témoigné sa satisfaction au comte de Valmy, au général Treilhard et à sa division, au général Gérard et à son corps d'armée.
L'empereur a passé la nuit du 17 au 18 au château de Nangis.
Le 18, à la pointe du jour, le général Château s'est porté sur Montereau.
Le duc de Bellune devait y arriver le 17 au soir. Il s'est arrêté à Salins : c'est une faute grave. L'occupation des ponts de Montereau aurait fait gagner à l'empereur un jour, et permis de prendre l'armée autrichienne en flagrant délit.
Le général Château arriva devant Montereau à dix heures du matin ; mais dès neuf heures le général Bianchi, commandant le premier corps autrichien, avait pris position avec deux divisions autrichiennes et la division wurtembergeoise, sur les hauteurs en avant de Montereau, couvrant les ponts et la ville. Le général Château l'attaqua ; n'étant pas soutenu par les autres divisons du corps d'armée, il fut repoussé. Le sieur Lecouteulx, qui avait été envoyé le matin en reconnaissance, ayant eu son cheval tué, a été pris. C'est un intrépide jeune homme.
Le général Gérard soutint le combat pendant toute la matinée. L'empereur s'y porta au galop. A deux heures après-midi, il fit attaquer le plateau. Le général Pajol, qui marchait par la route de Melun, arriva sur ces entrefaites, exécuta une belle charge, culbuta l'ennemi et le jeta dans la Seine et dans l'Yonne. Les braves chasseurs du septième débouchèrent sur les ponts, que la mitraille de plus de soixante pièces de canon empêcha de faire sauter, et nous obtînmes le double résultat de pouvoir passer les ponts au pas de charge, de prendre quatre mille hommes, quatre drapeaux, six pièces de canon, et
Weitere Kostenlose Bücher