Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
délai la régence par une loi. Unissez-vous tous pour le salut public et pour rester une nation indépendante.
NAPOLÉON.
Paris, 22 juin 1815.
Réponse de l'empereur à une députation de la chambre des représentans, envoyée pour le féliciter sur sa seconde abdication.
Je vous remercie des sentimens que vous m'exprimez ; je désire que mon abdication puisse faire le bonheur de la France, mais je ne l'espère point ; elle laisse l'état sans chef, sans existence politique. Le temps perdu à renverser la monarchie aurait pu être employé à mettre la France en état d'écraser l'ennemi. Je recommande à la chambre de renforcer promptement les armées ; qui veut la paix doit se préparer à la guerre. Ne mettez pas cette grande nation à la merci des étrangers. Craignez d'être déçus dans vos espérances. C'est là qu'est le danger. Dans quelque position que je me trouve, je serai toujours bien si la France est heureuse.
Paris, 23 juin 1815.
Discours de Napoléon aux ministres, en apprenant que la chambre des représentans venait de nommer une commission de gouvernement composée de cinq membres.
Je n'ai point abdiqué en faveur d'un nouveau directoire ; j'ai abdiqué en faveur de mon fils. Si on le proclame point, mon abdication est nulle et non avenue. Les chambres savent bien que le peuple, l'armée, l'opinion, le désirent, le veulent, mais l'étranger les retient. Ce n'est point en se présentant devant les alliés, l'oreille basse et le genou à terre, qu'elles les forceront à reconnaître l'indépendance nationale. Si elles avaient eu le sentiment de leur position, elles auraient proclamé spontanément Napoléon II. Les étrangers auraient vu alors que vous saviez avoir une volonté, un but, un point de ralliement ; ils auraient vu que le 20 mars n'était point une affaire de parti, un coup de factieux, mais le résultat de l'attachement des Français à ma personne et à ma dynastie. L'unanimité nationale auraient plus agi sur eux que toutes vos basses et honteuses déférences.
La Malmaison, le 25 juin 1815.
PROCLAMATION.
Aux braves soldats de l'armée devant Paris.
Soldats !
Quand je cède à la nécessité qui me force de m'éloigner de la brave armée française, j'emporte avec moi l'heureuse certitude qu'elle justifiera par les services éminens que la patrie attend d'elle, les éloges que nos ennemis eux-mêmes ne peuvent pas lui refuser.
Soldats ! je suivrai vos pas, quoiqu'absent. Je connais tous les corps, et aucun d'eux ne remportera un avantage signalé sur l'ennemi, que je ne rende justice au courage qu'il aura déployé. Vous et moi nous avons été calomniés. Des hommes indignes d'apprécier vos travaux ont vu, dans les marques d'attachement que vous m'avez données, un zèle dont j'étais le seul objet ; que vos succès futurs leur apprennent que c'était la patrie pardessus tout que vous serviez en m'obéissant ; et que si j'ai quelque part à votre affection, je la dois à mon ardent amour pour la France, notre mère commune.
Soldats ! encore quelques efforts et la coalition est dissoute. Napoléon vous reconnaîtra aux coups que vous allez porter.
Sauvez l'honneur, l'indépendance des Français ; soyez jusqu'à la fin, tels que je vous ai connus depuis vingt ans, et vous serez invincibles !
NAPOLÉON.
Paris, 25 juin 1815.
Discours de l'empereur à un membre de la chambre des représentans, en apprenant que MM. de Lafayette, de Pontécoulant, de Laforêt, d'Argenson, Sébastiani et Benjamin Constant (ce dernier en qualité de secrétaire), étaient nommés par le gouvernement provisoire pour se rendre auprès des souverains alliés.
.........Lafayette, Sébastiani, Pontécoulant, Benjamin Constant ont conspiré contre moi ; ils sont mes ennemis, et les ennemis du père ne seront jamais les amis du fils. Les chambres, d'ailleurs, n'ont point assez d'énergie pour avoir une volonté indépendante ; elles obéissent à Fouché. Si elles m'eussent donné tout ce qu'elles lui jettent à la tête, j'aurais sauvé la France ; ma présence seule à la tête de l'armée aurait plus fait que toutes vos négociations ; j'aurais obtenu mon fils pour prix de mon abdication ; vous ne l'obtiendrez pas. Fouché n'est point de bonne foi. Il jouera les chambres, et les alliés le joueront. Il se croit en état de tout conduire à sa guise ; il se trompe : il verra qu'il faut une main autrement trempée que la sienne, pour tenir les rênes d'une nation, surtout lorsque
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