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Paris, 1199

Paris, 1199

Titel: Paris, 1199 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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répondu plus
sèchement :
    — Le Cœur de Lion m’a vaincu et m’a laissé la
vie, noble sire de Dinant. Il est vrai qu’il m’a éloigné de sa présence, qu’il
a refusé mon hommage et que je ne lui dois donc ni amitié ni allégeance, mais
je ne lèverai jamais la main sur lui.
    — Qui parle de cela ? s’était offusqué
Étienne de Dinant en haussant le ton. Je ne vous demande rien, et un seigneur
normand comme vous n’a pas besoin de justifier sa conduite.
    L’âme damnée du prince Jean était restée un
instant silencieux en examinant les ongles de sa main gauche dont il avait
retiré un gant.
    — Je crois pourtant savoir que Lucas de Beaumanoir
et Albert de Malvoisin n’éprouvent pas les mêmes tourments que vous au sujet de
Richard. Ce sont vos amis. Et si vous leur en parliez ? Si Richard venait
à nous quitter, ce que je ne souhaite nullement, ils retrouveraient bien sûr
leurs charges et leurs honneurs en Angleterre, songez-y… et qu’ils y songent.
Je loge dans la même rue que vous, à l’auberge des Trois Canettes. S’ils le
désirent, nous pourrons en discuter.
    Après le départ d’Étienne de Dinant, Maurice de
Bracy était resté longuement à méditer, submergé par une vague de sentiments
contradictoires, mélange de scrupules, de loyauté, d’ambition et de cupidité.
Finalement, jugeant qu’une discussion n’engageait à rien, il s’était rendu au
manoir du Temple.
    Il avait trouvé Malvoisin et Beaumanoir en train
d’examiner les comptes des moulins et leur avait fait part, sans pudeur ni
détour, de l’infâme proposition de Dinant.
    Les trois hommes étaient de caractères fort
différents et ne s’appréciaient guère quand ils étaient en Angleterre, mais
l’exil avec resserré leurs relations. Albert de Malvoisin avait écouté le sire
de Bracy sans cacher son intérêt. Si le commandeur parvenait à dissimuler ses
mœurs dissolues aux autres Templiers, il n’en était pas moins un homme dépravé
qui souffrait de ne pouvoir satisfaire ses besoins de luxure par manque
d’argent. Les gages que lui versait le Temple étaient certes importants, mais
insuffisants à ses yeux. S’il l’avait pu, il aurait détourné une partie des
revenus des moulins, mais c’était impossible tant les contrôles du receveur
général de la Villeneuve étaient minutieux, et aussi parce que Beaumanoir, qui
connaissait ses vices, le surveillait.
    — C’est notre chance, et il faut la saisir,
avait-il décidé sans hésiter.
    Maurice de Bracy s’était tourné vers le grand maître
dont il voulait surtout connaître la réponse.
    Maigre et ascétique, possédé par un orgueil
démesuré, Lucas de Beaumanoir avait l’absolue certitude d’avoir été choisi par
Dieu pour imposer la foi. Croisé, il avait été un guerrier valeureux, bien que
fanatique, et l’accession à la charge de grand maître de l’ordre en Angleterre
avait comblé son besoin de puissance. Pourtant, désormais, son cœur était plein
d’aigreur, car s’il méprisait la richesse, il souffrait de ne pas être traité
selon son rang par le précepteur de France qui ne le conviait jamais aux
réunions de l’ordre.
    Ayant écouté Bracy, Beaumanoir était resté un
moment indécis. Il méprisait le débauché Malvoisin et il lui répugnait de se
compromettre avec lui. Quant à Bracy, il l’avait toujours trouvé pusillanime et
superficiel. Depuis qu’il était en France, Bracy avait été incapable d’obtenir
la confiance de Philippe Auguste ni de se tailler un fief par une action
d’éclat. Mais Beaumanoir haïssait encore plus Richard Plantagenêt, cause de sa
ruine. Pour se venger, il était prêt à surmonter bien des réticences.
    — Dites à Dinant que je vais y réfléchir,
bien que je ne voie aucun moyen d’y parvenir. Pensez-vous être capable de vous
attaquer à Philippe, Bracy ?
    — Le roi est mon suzerain, avait prudemment
répondu l’Anglais.
    — Pour l’instant, cette discussion est donc
oiseuse, avait conclu Beaumanoir.
    Bracy parti, Malvoisin était retourné dans sa
chambre pour s’installer devant une des fenêtres ouvertes sur la rue du
Chevet-Saint-Gervais. Appuyé contre le dormant, bercé par le brouhaha incessant
de cette rue qui irriguait la circulation entre le port du Temple et les
celliers de l’ordre, Albert de Malvoisin avait laissé son esprit vagabonder.
    Dinant avait raison, la disparition de Richard et
de Philippe provoquerait sans doute l’arrivée

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