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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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la vit à genoux, celle qui tenait le rôle du prêtre ne s’embarrassa point de formules vaines. Elle lui demanda d’emblée de nommer l’élu de son cœur. « Seigneur prêtre, répondit la fausse pénitente, c’est celui dont le nom retentit par tout le pays. Quand gronde l’orage et qu’il tonne, on doit prononcer son nom. Jamais alors la foudre ne tombera sur la maison ! – C’est une grave faute que de croire en de telles niaiseries ! s’écria le faux prêtre. Tu as eu beau le nommer bien des fois, cela ne t’a pas protégée des coups de foudre ! Jamais son nom ne t’aurait garantie, et je sais bien qu’il ne t’a pas épargnée pour autant ! – Plaise au Ciel que je retrouve ce genre de coups sans me plaindre de leur nombre et de leur vigueur ! – Tais-toi ! Tu n’es qu’une impudente pétrie de luxure ! Dis-moi le nom de ton amant ! – Son nom est Énéour au cœur généreux. C’est lui qui fait frémir toute l’île de Bretagne. » Celle qui tenait le rôle du prêtre sourit malgré elle à la pensée de l’homme prodigieux que nommait chacune de ses amies. Pas une seule fois, il n’avait été question d’un autre ! Quand toutes se furent confessées, elles vinrent en chœur retrouver Gwladys. « Dame, lui dirent-elles, maintenant que nous avons toutes fait notre aveu, nous aimerions savoir ce que tu en penses. Laquelle d’entre nous a, selon toi, l’ami le mieux pourvu en qualités ? – Il n’est certes pas difficile de répondre à cela ! s’écria Gwladys avec colère. Vous avez toutes prononcé le nom d’un seul et unique chevalier ! Vraiment, il nous a couvertes de honte ! Car il est inutile que je vous le cache : vous avez toutes les onze le même amant ! »
    « En entendant ces paroles, les femmes s’entre-regardèrent avec stupeur, et cette révélation parut les laisser incrédules. « J’ajouterai mon propre aveu, dit alors Gwladys. Moi aussi, je l’aime et je me suis donnée à lui, comme vous toutes ! Voilà une chose bien étrange et bien pénible, je vous assure. Mais le coupable est Énéour. Il le paiera sans plus attendre ! – Mais comment nous venger de pareille offense ? – Nous allons nous promettre que la première qu’il ira trouver lui fixera rendez-vous dans ce verger. Elle nous avertira ensuite du moment choisi, et nous viendrons toutes, sans exception. Que chacune apporte un couteau bien effilé : nous ferons payer très cher cette duperie à celui qui prétendait aimer chacune et qui la trompait sans vergogne avec toutes les autres ! » Après s’être engagées par serment solennel, les dames sortirent du verger, le cœur plein de tristesse et de chagrin.
    « Cependant, Énéour, ne se doutant de rien, s’en alla trouver, au moment propice, celle des douze à qui il avait donné rendez-vous. Plein de joie et de désir, il la serra contre lui et l’embrassa à plusieurs reprises, mais il ne put rien obtenir de plus. « Douce amie, dit-il, comment se fait-il que tu te montres si distante ? – Seigneur, je ne suis pas distante mais inquiète. J’ai peur qu’on ne m’ait épiée. Mieux vaut que nous nous rencontrions une autre fois. Promets-moi de venir dimanche prochain me retrouver dans le verger de dame Gwladys. C’est un endroit bien clos où personne ne pourra nous voir. – Comme il te plaira, répondit Énéour, je t’obéirai volontiers. » Et il prit congé aussitôt.
    « La dame s’empressa d’avertir les autres et, le dimanche prévu, elles allèrent se poster dans le verger, toutes munies de couteaux bien tranchants cachés sous leurs manteaux et fermement résolues à s’en servir. Celle qui avait organisé l’embuscade s’installa ostensiblement au milieu du verger, de façon qu’Énéour la vit dès son arrivée. Elle avait ouvert la petite porte qui permettait d’entrer dans le verger et laissé la clef dans la serrure.
    « Énéour survint à l’heure dite, sans se cacher, le cœur tout joyeux. Il referma la petite porte à clef et s’approcha de son amie. Ils allèrent s’étendre sous un arbre et la dame serra le chevalier dans ses bras, tandis qu’il lui prodiguait les marques les plus brûlantes de son amour. Mais elle ne voulut rien lui accorder, car son désir s’était évanoui. C’est alors qu’enflammées de rage et de colère, les onze autres femmes sortirent de leur cachette et se précipitèrent vers eux. Énéour se leva brusquement, tout décontenancé. « Que

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