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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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Un décret royal sera promulgué aujourd’hui interdisant l’impression de tout tract sur le sujet. J’enjoins à tous les présents de garder secrète cette affaire et de décourager ceux qui chercheraient à leur soutirer des renseignements, comme on ne manquera pas de le faire. On parle déjà à tort et à travers dans la ville. Ce sont mes ordres et tous ceux qui les enfreindront seront punis. » Sur ce, il se mit sur pied, tandis qu’à côté de lui Browne se hissait de son siège. « La séance est levée sine die . La commission se réunira quand j’aurai recueilli davantage d’indices. Au revoir, messieurs. » L’huissier ouvrit la porte et les deux coroners quittèrent la pièce. Des bavardages se firent immédiatement entendre.
    « Ce ne peut être que l’œuvre du diable. Un spectacle aussi horrible un dimanche. Ce tueur est possédé… » Je me tournai vers le jeune nigaud qui venait de s’exprimer ainsi. On parlait déjà à tort et à travers… La preuve.
    « Cette force inhabituelle. On constate toujours cela dans des cas de possession… »
    Margaret se tourna vers moi. « Il faut que nous sortions ma maîtresse d’ici. » Dorothy paraissait sur le point de s’évanouir, en effet. Je me levai et aidai Margaret à la faire sortir de la salle. Son bras était aussi léger qu’une aile d’oiseau. Se nourrissait-elle ? Nous la conduisîmes jusqu’à un banc où nous l’installâmes. Barak et Guy nous rejoignirent. L’intendant Rowland apparut, l’air furieux. J’espérais qu’il allait venir offrir quelques paroles d’encouragement à Dorothy, mais il se contenta de me faire un signe de tête, avant de s’éloigner vivement, ses chaussures claquant sur les carreaux. Loin de se soucier d’une veuve éplorée, il ne pensait qu’à la réputation et au pouvoir de Lincoln’s Inn. Comme je me retournais vers Dorothy, je me rappelai que l’École allait sous peu la prier de quitter son appartement.
    Elle avait fermé les yeux, mais les rouvrit et se redressa péniblement sur le banc, nous fixant, moi, Margaret, Barak et Guy, l’un après l’autre.
    « Je vous remercie tous les quatre pour votre soutien et d’avoir refusé qu’on tente de vous détourner de la vérité… Ils ne vont pas faire d’enquête, n’est-ce pas ? demanda-t-elle en se tournant vers moi. Ils pensent que le meurtrier s’est enfui et que ça ne vaut pas la peine de le rechercher.
    — Il y a anguille sous roche. Harsnet veut se charger de l’affaire tout seul.
    — Qui est-il, en fait ?
    — Le vice-coroner du roi. Je ne sais rien de lui.
    — Ils veulent enterrer l’affaire, dit-elle amèrement. Pas vrai ?
    — Eh bien…
    — Allons, Matthew ! Je n’ai pas été marié vingt ans à un avocat sans apprendre beaucoup sur le droit. Ils veulent jeter le dossier aux oubliettes.
    — On dirait bien. Et si on perd davantage de temps le meurtrier risque de ne jamais être retrouvé.
    — Je t’en prie, Matthew, veux-tu m’aider ? Je suis une femme et ils ne feront aucun cas de moi.
    — Je te promets que je vais commencer par parler au coroner Harsnet. Guy, voudriez-vous attendre avec Dorothy ? » Je sentais qu’elle faisait des efforts surhumains pour ne pas s’effondrer. Il s’approcha pour la soutenir.
    « Allons-y donc, Barak !
    — Vous endossez là une sacrée responsabilité, déclara-t-il en me suivant jusqu’au perron du Guildhall. J’ai l’impression que tout ce qui lui permet de tenir, c’est l’espoir de retrouver l’assassin. Je ne sais pas ce qui se passera si on échoue.
    — On n’échouera pas », répliquai-je d’un ton ferme.
    Dans la cour pavée j’aperçus la silhouette noire de Harsnet. Il parlait à un homme grand et costaud âgé d’une trentaine d’années. Doté d’une longue barbe cuivrée, il était luxueusement vêtu d’un pourpoint vert aux parements dorés qui laissait entrevoir une chemise ornée d’une très fine dentelle espagnole et coiffé d’un bonnet rouge à plumet blanc incliné avec désinvolture. Il tenait sur le bras un lourd manteau et le fourreau de l’épée accrochée à sa taille était en cuir incrusté d’or. D’habitude je n’aurais pas osé aborder un représentant du roi en public, surtout lorsqu’il était en conversation avec un homme à l’évidence de haut rang, mais, de ma vie, je n’avais jamais été aussi en colère.
    Les deux hommes nous virent nous approcher d’eux. L’homme barbu, dont

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