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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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sur l’état d’esprit de Roger, il répondit sans hésitation que c’était un homme heureux, gai, respecté dans sa profession, qui avait beaucoup d’amis et auquel on ne connaissait aucun ennemi.
    « Il en avait au moins un, répliqua Harsnet. Un ennemi cruel et astucieux. Cet assassinat a été préparé avec patience et ingéniosité. » Je le regardai attentivement. L’homme était loin d’être un imbécile. « Quelqu’un détestait Roger Elliard, conclut-il, avant de se tourner vers Rowland. Que sait-on de l’avoué qui lui a écrit ?
    — Il n’existe pas, monsieur. Personne n’a jamais entendu parler d’un avoué répondant au nom inhabituel de Nantwich. J’ai fait des recherches dans toute les écoles de droit. Puisque personne ne semblait s’en soucier », ajouta-t-il d’un ton incisif. Harsnet le regarda d’un air réprobateur, mais le vieux grincheux ne cilla pas.
    « Puis-je rappeler quelque chose à la Cour ? demanda tranquillement Guy en se levant.
    — Allez-y ! » lança sèchement Harsnet. J’étais perplexe. Je pouvais comprendre que le coroner se montre quelque peu agacé par les constantes interruptions des témoins, mais la remarque de Rowland n’était pas infondée et l’intervention de Guy ne le serait sûrement pas non plus.
    « Monsieur, même le médecin le plus compétent aurait du mal à évaluer la bonne dose de cette substance à administrer. Le meurtrier doit posséder une certaine expertise en ce domaine.
    — Peut-être bien. Mais une telle constatation ne nous mène pas très loin, hélas ! rétorqua Harsnet. S’agissant d’un acte de vengeance aussi sauvage, je me serais attendu à ce qu’il y eût un évident coupable, or ce ne semble pas être le cas. À cause des retards occasionnés par les fêtes de Pâques, je ne vois pas très bien comment on pourra jamais arrêter le meurtrier. »
    Je le regardai, stupéfait. Ce n’était pas le rôle du coroner de décourager ainsi les enquêteurs. Je le sentais gêné de tenir ces propos. Browne eut un sourire en coin, comme s’il avait prévu cette conclusion.
    « Nous ne devons pas nous faire d’illusions, reprit Harsnet. Je prévois un verdict de meurtre commis par une ou plusieurs personnes inconnues, et je crains qu’elles ne le demeurent. »
    Je n’en croyais pas mes oreilles. Il cherchait clairement à influencerla commission. Or aucun des jeunes gens choisis pour en faire partie n’osa protester.
    J’entendis alors un bruissement d’étoffe. Dorothy s’était mise sur pied et faisait face au coroner.
    « On ne m’a pas donné la parole, monsieur, mais si quelqu’un a le droit de s’exprimer, c’est bien moi. Je ferai tout pour que le meurtrier de mon mari soit arrêté, même si cela doit me coûter jusqu’à mon dernier penny. Et j’y réussirai avec l’aide d’amis fidèles. » Elle tremblait des pieds à la tête mais, bien qu’elle eût parlé à voix basse, le ton était tranchant. Elle prononça ces dernières paroles en se tournant vers moi et je lui répondis en hochant vigoureusement la tête. Elle se rassit.
    Je m’attendais que Harsnet sorte de ses gonds, mais il se contenta de pincer fortement les lèvres, le rouge aux joues. Sa déconfiture faisait ricaner Browne. J’avais envie de me lever et d’aller effacer ce sourire de son visage de crapaud. Harsnet finit par répondre.
    « Compte tenu du désarroi de Mme Elliard, je ne lui ferai aucun reproche. Toutefois, il me semble que, avant que la commission puisse parvenir à un verdict, nous avons besoin d’éléments supplémentaires. C’est pourquoi je ne vais pas lui demander de se prononcer tout de suite. La question va demeurer en suspens pendant que je conduirai ma propre enquête. »
    Je me mis sur pied. « Secondé par la commission, monsieur, je suppose. Selon la procédure normale.
    — Un coroner peut mener une enquête sans l’aide de la commission s’il considère que c’est la manière adéquate de procéder, ce qui me paraît le cas ici. Les membres de la commission, comme le défunt, sont tous des avocats. L’atmosphère sera moins brûlante et plus lumineuse si j’agis seul. Veuillez vous rasseoir, monsieur. »
    Je me rassis en lui lançant un regard noir.
    « Bon. Notez bien tous ceci », reprit-il en parcourant la salle du regard. Il parlait lentement et son accent se remarquait davantage. « Je ne veux pas que des éléments de ce dossier soient colportés de par la ville.

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