Quelque chose en nous de Michel Berger
beaucoup. Il était très généreux », rappelle de Bosson. « Michel, il fallait toujours deviner ce qu’il voulait dire, c’était à toi à comprendre, raisonne Pérathoner. Il fallait rentrer dans son univers, c’était un examen de passage pour travailler avec lui. D’autant plus sa vie personnelle. On devinait qu’il voulait passer à autre chose. Il avait fait son studio Face B à trois cents mètres de chez lui où on avait réalisé Tycoon, puis l’album de Céline Dion, c’était un bel endroit moderne dans sa conception, son architecture : pas de cabine et de studio, très convivial, très technologique. Il ne nous donnait pas le lieu, mais il était fait pour nous. Il voulait nous dire : “Vous avez la quarantaine maintenant, vous êtes tous compositeurs, arrangeurs, réalisateurs, allez-y.” On a d’ailleurs fait ça avec France après sa mort. Elle nous le louait une misère, on a fait beaucoup de productions là, pendant quelques années. »
Michel répond aussi à une de mes questions de l’époque concernant sa boulimie de projets, son activisme. Je la lui pose en 1986, et ne prendrai la mesure de la prescience de sa réponse énigmatique que six ans plus tard, malheureusement. « Ça nedurera pas éternellement. Je ne sais pas où je veux en venir. J’ai énormément travaillé pour en arriver là, et le jour où ça sera fini, ça sera vraiment fini. Ce que je trouve formidable, c’est que je ne suis pas obligé de faire un album tous les ans : j’ai huit ans devant moi. »
A French Man in New York
« Je veux me présenter comme compositeur, comme musicien. Je veux d’abord m’intégrer au milieu des musiciens et des gens qui font des disques aux États-Unis. C’est un peu ce que j’ai fait en France. J’ai fait un disque qui s’appelle Puzzle, un disque instrumental pour commencer, et puis, peu à peu, j’ai eu envie de dire des mots et de dire des choses aux gens parce que j’ai appris à les connaître. Il faut que ça se fasse en plusieurs étapes et je veux le même itinéraire là-bas. J’avais envie d’avoir une aventure américaine complètement faite aux États-Unis, avec des musiciens américains, des artistes américains. Je trouve ça plus intéressant de faire un album à thème avec un concept, plutôt qu’un album de chansons traduites en anglais, et vraiment je n’ai pas été déçu : ça été passionnant et je crois que je vais continuer. C’est un premier album. Malheureusement, je n’ai pas tellement pu y aller après pour faire connaître le disque. Il marche un peu sans moi, mais par rapport au métier américain, c’est difficile. Pourtant, j’ai très envie d’y retourner et de voir un petit peu ce qui se passe.
» Je ferais sans doute un second album qui sera toujours un album concept et là peut-être vais-je commencer à chanter, peut-être en duo avec des Américains. Il faut avoir un peu de temps, mais c’est envisageable. »
Michel Berger est encore très enthousiaste, mais déjà partagé, concernant sa première expérience d’artiste « américain », lorsqu’il me présente en direct, une nuit de 1982 dans Rock à l’œil, peu après être venu y faire ma connaissance, son album Dreams in Stone . « Il avait dans l’idée de faire un truc là-bas, relate aujourd’hui Bernard de Bosson. C’est nous qui avons produit. Ça devait déboucher sur une carrière américaine qui ne s’est jamais faite, mais il y avait un scénario, longtemps mûri avec Philippe Rault et Nesuhi Ertegun, qui était très impliqué dans le projet. WEA International était convaincu, et nous avons insisté pour que l’album sorte sous étiquette Atlantic parce que c’est ce qu’il y avait de plus beau. »
Au départ, l’album devait s’appeler A French Man in New York, inversion de Un Américain à Paris de Gershwin que Michel aimait tant et qui l’avait tellement inspiré. « Pendant toute la durée de la production, c’était le titre de travail, se remémore Philippe Rault. C’est Atlantic qui a exigé que cela devienne Dreams in Stone, pour coller à cette pochette représentant une œuvre de Stanislas Zagorski directement inspirée de Magritte, des gratte-ciel minéraux sectionnés et flottant dans l’espace, “rêves de pierre” en question. Michel avait envisagé ce disque avant tout comme un concept album, constitué de vignettes orchestrales et évidemment d’une majorité de chansons interprétées par différents
Weitere Kostenlose Bücher