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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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fortunes qu’ils ne possèdent pas, des
    femmes imaginaires, des châteaux en Espagne.
    « Ils m’emmerdent
    avec leurs conneries, déclare Terisse, je vais refaire mon pansement. »
    Il s’éloigne en
    claudiquant d’une dizaine de mètres, enjambe les deux officiers qui somnolent
    et va s’asseoir à l’écart, le dos calé contre un arbre.
    Crœnne et Pams sont
    occupés au bricolage d’un poste de radio, dans l’espoir plus qu’incertain de
    parvenir à capter des nouvelles.
    Terisse éprouve des
    difficultés à se défaire de la bande ensanglantée qui entoure sa blessure à la
    cheville. Il crie, râleur, dans la direction de Crœnne :
    « Bébert, salopard !
    Ça te crèverait le cul de venir me donner un coup de main ?
    — Tu vois pas que
    je m’occupe d’un blessé plus important ? réplique Crœnne. T’es pas mourant,
    non ?
    — Ah ! ils
    sont beaux les potes, plaisante Terisse. D’abord, qu’est-ce que t’en sais si je
    ne suis pas mourant ? Ça n’arrête pas de pisser, cette saloperie. J’ai
    perdu au moins vingt litres de sang.
    — J’arrive », concède
    Crœnne qui, suivi de Pams, rejoint son compagnon.
    Terisse a disposé une
    trousse de pharmacie à côté de lui. Il a presque entièrement déroulé le
    pansement dont seule l’extrémité adhère encore au sang coagulé de la plaie
    bénigne. Crœnne s’agenouille et tire le pansement d’un coup sec. Terisse gueule :
    « Nom de Dieu !
    Fumier ! Sadique ! C’est pas possible, ça t’envoie en l’air de voir
    souffrir les autres ! »
    Crœnne et Pams éclatent
    de rire. Pendant que Crœnne soutient la jambe, Pams nettoie la blessure à l’alcool.
    Sans arrêter de rigoler, il lance, narquois :
    « Non, mais mate-la
    un peu sa blessure ! Une égratignure ! Et c’est pour ça qu’il braille
    et qu’il nous dérange !
    — Je voudrais t’y
    voir, pauvre guignol, réplique Terisse. Refais mon pansement et arrête de
    déconner. N’oublie pas qu’il me reste un pied valide à te foutre au cul. »
    Tout en enroulant la
    bande sur elle-même, Crœnne enchaîne.
    « Il va réclamer la
    Légion d’honneur, s’acheter une petite voiture d’invalide pour aller ranimer la
    flamme le 11 novembre. »
    À huit cents mètres, à
    la ferme des Kerhervé, un parachutiste frappe et entre. Sans y être invité, il
    va s’affaler sur une chaise sous le regard de pitié de la fermière.
    « Vous n’auriez pas
    un morceau de pain, madame ? » demande-t-il sur un ton suppliant.
    La mère Kerhervé se
    précipite. Elle sort de la pièce, en revient porteuse d’un quignon de pain et d’une
    boule de fromage frais qu’elle pose sur la table. Le parachutiste se jette sur
    les aliments, tandis que la brave femme retourne au cellier d’où elle
    réapparaît débouchant une bouteille de cidre.
    La bouche pleine, le
    parachutiste explique : « Il y a quarante-huit heures que je n’ai
    rien mangé ni rien bu. J’ai perdu mes compagnons au cours du dernier combat. Depuis,
    je parcours la forêt tout seul à leur recherche. » La fermière sourit :
    « Ne vous inquiétez
    plus, mon gars, ils ne sont pas bien loin ! L’un d’eux a même couché dans
    la grange cette nuit. Mangez et buvez. Après je vous expliquerai comment les
    rejoindre.
    — Eh ben, vous, au
    moins, on peut dire que vous êtes la Providence. Je commençais à désespérer et
    à me faire des idées noires. Bon sang, vous savez, quand on est tout seul… »
    Le parachutiste
    engloutit le fromage entier, la moitié de la miche de pain, boit la presque
    totalité de la bouteille de cidre.
    « Ah ! je me
    sens mieux à présent. Maintenant, si vous pouviez m’indiquer le chemin… »
    La fermière sort sur le
    pas de sa porte et désigne la direction du camp.
    « Vous suivez le
    sentier sur deux ou trois cents mètres. Après, vous prenez à travers bois sur
    votre gauche. Il y a une ancienne haie, vous n’avez qu’à la suivre, vous
    tomberez sur eux. Vous verrez mon mari et mon fils, ils y sont. »
    Le parachutiste fait un
    geste large de la main : une centaine de miliciens sortent du bois de
    Trédion et fondent, silencieux, sur la ferme.
    Le chef Franc-Garde Di
    Gonstanzo et Maurice Zeller sont à leur tête. Le pseudo-parachutiste était le
    sinistre Munoz : son uniforme a, une fois encore, tragiquement mystifié
    une brave patriote.
    La mère Kerhervé est
    poussée violemment à l’intérieur de sa demeure, tandis que la plupart des
    miliciens s’éparpillent

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