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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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larmes glissent entre ses pommettes et les ailes de son nez. Sans bouger
    son bras, il tourne son poignet, jette un coup d’œil sur sa montre, il est 7 h 48,
    le sous-lieutenant Michel de Camaret a près d’une heure d’avance.
    En 1947, en Indochine, un
    bâtiment léger de la Marine nationale fut baptisé Roger-de-La-Grandière. Sans
    en acquérir jamais la certitude, nombreux sont ceux qui restent persuadés que
    la suggestion de ce baptême a pris naissance à Colombey-les-Deux-Eglises.
     

33
    Dans la nuit du 13 au 14
    juillet, le lieutenant Alain de Kérillis, traqué par les Allemands et les
    miliciens, parvient miraculeusement en bordure du bois de Kerlanvau, dans une
    ferme isolée, habitée par la famille Kerhervé.
    Une dizaine de
    survivants se traînent autour de Kérillis : ce sont des hommes en loques, aux
    limites de leurs forces, qui ont pourtant trouvé le courage de transporter leurs
    blessés.
    Alain de Kérillis a reçu
    une balle dans l’avant-bras droit, mais il est accablé par une blessure plus
    profonde et cruelle : il vient d’apprendre la mort tragique de Marienne.
    Le lieutenant Fleuriot
    qui, la veille, s’est joint au groupe, souffre d’un éclatement du foie. Perrin
    est atteint d’éclats de grenade à la cuisse. Terisse a les ligaments de la
    cheville déchirés par un projectile. Les hommes qui sont indemnes sont pratiquement
    vidés de toute ressource : Robert Crœnne, Pams, Francis Decrept, Harbinson,
    le Meur, Pinci, Collobert, Galliou et Pasquet.
    Devant l’arrivée de ces
    spectres échinés, brisés, pitoyables, les Kerhervé oublient toute prudence, ne
    cherchent même pas à se renseigner sur la distance qui sépare les fugitifs de
    leurs poursuivants ; ils les accueillent, les nourrissent, leur proposent
    de les coucher.
    « Ce serait de la
    folie, refuse Kérillis. Les Allemands risquent d’avoir repéré notre piste, mais
    si vous disposez d’une cache sûre je vous laisserai néanmoins le lieutenant
    Fleuriot, il n’est pas en état de nous suivre. »
    Les fermiers distribuent
    aux parachutistes tout le ravitaillement dont ils disposent. Le lieutenant
    Fleuriot est installé dans une grange : s’il y est découvert, il pourra
    toujours tenter de prétendre qu’il s’est réfugié dans cet abri à l’insu des
    braves gens.
    Après une halte d’une
    demi-heure, la petite troupe reprend le chemin des bois. Accompagnés par un
    adolescent, le fils Kerhervé, les parachutistes traqués parcourent huit à neuf
    cents mètres et s’installent, frissonnants, sur la terre imprégnée de rosée. Ils
    s’endorment tous comme des masses, insensibles à l’humidité, à l’inconfort et
    au danger. Ils sont à bout de nerfs, ils dorment.
    Un doux soleil les
    réveille. Il est 8 heures du matin. Depuis leur parachutage, c’est la première
    fois qu’ils se lèvent après l’aube, la première fois qu’ils dorment sans la
    protection d’une sentinelle. Avant de sombrer dans leur sommeil, tous avaient
    eu la même pensée : ils seraient peut-être abattus au gîte, mais leur
    épuisement était tel qu’ils ne s’en étaient guère préoccupés.
    C’est presque avec
    surprise qu’ils prennent conscience du jour, de la quiétude qui les entoure, du
    soleil qui les réchauffe.
    Instantanément l’espoir
    renaît et avec lui la soif de poursuivre.
    Dans les jours
    précédents, le « bilan » du stick de Kérillis a été inimaginable. Ce
    groupe, depuis la bataille de Saint-Marcel, n’a jamais cessé d’agir, de porter
    aux Allemands des coups furieux. Les S.A.S. ont attaqué des convois, ont fait
    sauter un train de munitions et d’armement, détruit des transformateurs électriques,
    coupé à maintes reprises la voie ferrée sur des axes essentiels. Par leur
    efficacité, ils ont porté à son paroxysme la fureur de l’ennemi.
    Le jeune Kerhervé arrive
    porteur d’un récipient de café brûlant. Il le dépose et retourne à la ferme de
    laquelle il revient quelques instants plus tard avec son père. Les deux Bretons
    soutiennent le lieutenant Fleuriot qui a prétendu se sentir en état de
    rejoindre les siens.
    Les Allemands paraissent
    avoir perdu la piste, mais, malgré l’apparente résurrection de ses hommes, Kérillis
    préfère prolonger leur répit et décide de rester sur place une journée de plus.
    À 15 heures, le petit
    groupe est en pleine détente. Pinci, Decrept, Collobert et Galliou ont entamé
    une partie de belote. Ils jouent des

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