Qui ose vaincra
sont
surpris. Dans un réflexe, ils sautent à l’abri. Les gosses se mettent à courir,
tandis que Constant se jette entre les soldats et ses fils qui fuient.
De la gauche, une arme
automatique se déclenche. Plouchard est criblé de balles ; il s’effondre, tué
sur le coup. L’adjudant Marie-Victor est atteint d’une balle dans l’épaule, d’une
autre dans le gras de la cuisse. Il parvient pourtant à se traîner jusqu’au mur
et à le passer.
« Parachutistes, sortir !
braille à nouveau l’Allemand.
— Ne sortez pas !
Tout va bien, les gosses sont loin », gueule Constant.
Les coups partent. Le
brave paysan tombe à genoux. Les Allemands s’acharnent, tirent encore. Constant
bascule ; il gît mollement, expire dans un ultime soubresaut.
« Salopards ! »
hurle La Grandière dans un cri déchirant. Il se saisit du fusil mitrailleur qu’il
cale sur la saignée de son bras gauche. Sa main droite crispée sur la crosse, il
passe le mur et avance en tirant. Il se tient droit, marche à grandes enjambées.
« Reviens, crie Le
Gall, reviens, Roger ! C’est de la folie ! »
La Grandière n’entend
pas. Il avance. Maintenant il distingue des cibles. Trois Allemands, tombent
sous ses coups de feu. D’autres, plus téméraires, ripostent. La Grandière est
atteint d’une balle à l’aine. Il s’effondre. À terre, il change le chargeur du
fusil mitrailleur. L’arme a conservé son trépied déployé. Le sous-lieutenant s’en
sert comme d’un appui ; il soulève le fusil mitrailleur, l’avance de
quelques centimètres, puis de sa jambe droite encore valide, il pousse son
corps pour se retrouver en position de tir. il est insensible à la douleur de
sa blessure. Il n’a qu’une idée : avancer sur les Allemands. Dans leur
langue, il vocifère des insultes, tire, et reprend sa progression de crabe. Il
parvient à répéter trois fois l’opération avant de recevoir un nouveau chapelet
de balles en pleine poitrine.
Sa main droite se crispe
sur la crosse du fusil mitrailleur qui se vide dans la direction du bois. Puis,
doucement, La Grandière s’affale, pesant sur la culasse ; le canon se
soulève lentement et les derniers coups partent vers le ciel.
Sans arme, Le Gall
bondit à son tour. Il court à découvert en direction du sous-lieutenant. Trois
balles l’atteignent à la poitrine, l’épaule et la jambe. Par miracle, aucune n’est
mortelle.
Il est tombé à deux
mètres à peine de son chef, il tente en vain de ramper jusqu’à lui.
Roger de la Grandière s’est
retourné. Dans son mouvement, il a fait basculer le fusil mitrailleur qui lui
cale le dos, le maintient dans une position presque assise. Sa respiration n’est
plus qu’un râle sourd ; son menton et son cou sont maculés du sang qui s’échappe
de sa bouche.
Un groupe d’Allemands
déborde derrière le mur, constate la seule présence de l’adjudant Marie-Victor,
blessé et inoffensif.
Un second groupe s’avance
vers La Grandière et Le Gall. Ils vont les achever, quand un lieutenant
intervient.
Dans son poing il serre
un Parabellum. Les S.S. relèvent leurs armes.
La Grandière plonge son
regard dans les yeux du lieutenant allemand. Il n’a pas la force de parler, et
pourtant l’Allemand comprend lorsque le regard pâle du mourant se porte sur Le
Gall. Dans sa langue, le S.S. affirme :
« Ils seront
traités comme des prisonniers de guerre. »
La Grandière baisse les
paupières à deux reprises. Il a compris. Pourtant une ultime épreuve l’attend :
les trois fils Leguéné reviennent. En pleurant, ils marchent, inconscients, vers
eux, après s’être agenouillés près du corps de leur père. Le lieutenant S.S. hurle
un ordre ; en français un des soldats le traduit :
« Partez, les
enfants ! Allez vite ! Gourez ! Partez, vite… vite !… »
Les trois gamins
semblent sortir d’un cauchemar. Brusquement ils font volte-face et se mettent à
courir. Dans un effort surhumain. La Grandière les suit du regard.
Le lieutenant S.S. à son
tour regarde le sous-lieutenant français. À plat dans sa main, il présente son
Parabellum.
D’un signe des paupières,
La Grandière acquiesce. Puis son regard Hou tente une dernière fois d’apercevoir
les enfants dans leur fuite : ce ne sont plus que trois minuscules points
noirs qui dansent dans les blés.
Tiré à bout portant, le
coup de grâce lui fracasse la tempe.
Le Gall ferme les yeux ;
deux
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