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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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combat qu’il escomptait employer.
    La situation fut renversée. Le désordre porté au-delà du front permit la lourde
    et continue progression des blindés alliés.
    Le major-général R. N. Gale,
    commandant de la Ist Air-borne Corps, écrira :
    « Les exploits des
    parachutistes français constituent une chose dont la France doit légitimement
    être fière. Les résultats obtenus au cours de l’opération Amherst sont un
    exemple classique de ce type d’opérations. »
    L’opération Amherst aura
    pourtant une conséquence inattendue : elle provoquera l’un des ultimes
    accès de fureur de Winston Churchill.
    En prenant connaissance,
    vers la mi-avril, d’un compte rendu dithyrambique sur l’héroïsme et l’efficacité
    des parachutistes français en Hollande, paru en première page du London Evening
    News, le Premier britannique convoqua le maréchal Montgomery :
    « Quelle idée
    saugrenue vous a poussé à employer des Français dans une opération d’une telle
    importance ! Une opération au cours de laquelle il était prévisible qu’ils
    se montreraient efficaces et spectaculaires.
    — C’est pour cette
    raison que je les ai choisis, monsieur, répliqua Montgomery. Et cela me semble
    logique.
    — S’il arrive que
    la guerre se montre logique, la politique ne l’est jamais. J’ai fait prévenir
    tous les organismes de presse. J’exige que l’opération Amherst soit étouffée.
    — Je vous comprends
    mal, monsieur. L’action des Français en Hollande peut être considérée comme un
    succès sans précédent dans l’histoire des parachutages de masse dans les lignes
    ennemies.
    — C’est bien la
    raison pour laquelle j’ordonne qu’on fasse toute la discrétion possible autour
    d’elle. Nous arrivons à l’heure des comptes. Vous semblez ne pas connaître de
    Gaulle ! Il est foutu de prétendre que la guerre n’a été gagnée que grâce
    à l’intervention de ses parachutistes. En tout cas, comptez sur lui pour que l’héroïsme
    de ces deux régiments pèse sur le plateau de la balance dix fois le poids qu’il
    mérite.
    — S’il pèse seulement
    le poids qu’il mérite, croyez-moi, monsieur, il est à considérer.
    — Raison de plus !
    Black-out sur l’opération Amherst ! »
    À l’annonce de ces
    consignes formelles, le brigadier-général Calvert constatera : « Aux
    Pays-Bas, nous ne fûmes que les gages des dieux. »
     

50
    Lucien Neuwirth s’est laissé tomber à terre en bordure d’un chemin qui traverse la forêt. Recroquevillé dans la position d’un fœtus, il sanglote, la tête enfouie dans ses bras.
    « You lost your mother, sonny ? » Doucement Neuwirth lève la tête. À travers ses larmes il distingue deux officiers allemands qui le dévisagent, narquois, pistolet P 38 au poing.
    La honte chasse le désespoir, la rage la douleur. Neuwirth crie : « Murderers ! » en une interjection qui charrie toute la haine et tout le mépris du monde.
    Les Allemands ont une curieuse réaction, ils semblent en proie à un vague malaise. Tranquillement l’un d’eux déclare, toujours en anglais : « Allez, debout, et marchez devant. » Neuwirth se relève. Ses deux blessures de la cuisse et de la cheville, celle de l’épaule sont devenues beaucoup plus douloureuses. Mais la hargne lui fait surmonter l’intolérable souffrance que déclenchent ses mouvements. Il avance, dérisoire et émouvant, à petits pas boiteux.
    « Les mains en l’air », ordonne l’un des officiers. Le second intervient brièvement, en allemand : « Vous pouvez baisser vos bras », reprend en anglais le premier officier.
    Très vite le trio traverse un village tout proche. Il est 6 heures de l’après-midi ; quelques Hollandais prudents assistent, silencieux, au passage du prisonnier. Un chemin sous bois les amène à un pavillon luxueux, Lucien Neuwirth est conduit dans un accueillant living-room ; dans l’âtre, un feu de bois crépite gaiement. Neuwirth est prié de s’asseoir dans un confortable fauteuil. Les Allemands débouchent une bouteille de cognac, en offrent un verre au parachutiste et, à leur tour, s’installent dans les sièges voisins.
    « Maintenant, si vous nous racontiez ce qui vous est arrivé ? »
    La première réaction de Neuwirth est de décliner son identité et son numéro matricule, en taisant bien entendu sa nationalité. Mais il réalise qu’en faisant le récit de la tuerie, les seuls secrets militaires qu’il risque de trahir sont ceux de

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