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Requiem sous le Rialto

Requiem sous le Rialto

Titel: Requiem sous le Rialto Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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assis dans son bureau, est de savoir si cette affaire relève de nous.
    Après que le colonel Reski eut informé le poste de police sur la place Saint-Marc, les agents avaient aussitôt prévenu leur supérieur. Sur le lieu du crime, il ne fit plus aucun doute que l’éventreur de Venise avait de nouveau frappé. La jeune femme avait été étranglée, ligotée, puis étripée. Cette fois, l’assassin avait déposé l’organe sur la rambarde de la plate-forme panoramique. De retour au poste de police, Tron et Bossi avaient interrogé le colonel Reski et dressé un procès-verbal – le tout de manière informelle, bien entendu, puisque la garde civile n’était pas habilitée à entendre les officiers autrichiens. La question était maintenant de savoir comment présenter cette nouvelle au commandant de police. Spaur devait arriver d’une minute à l’autre. Il était presque midi et demi.
    L’inspecteur fronça les sourcils.
    — Pour quelle raison cette affaire ne relèverait-elle pas de nous ?
    — Parce que le campanile est un terrain militaire, répondit son supérieur. Le baron pourrait tenter de faire valoir ce point de vue.
    — Pour avoir un crime de moins dans les statistiques ?
    Le commissaire acquiesça.
    — Je suppose qu’il va aussi nous interroger sur le rôle du colonel Reski dans toute cette histoire, ajouta-t-il.
    — Reski dispose d’un alibi parfait, répliqua son subalterne. Il est resté à la roulette du Ridotto jusqu’à trois heures. Une demi-douzaine de croupiers peuvent en témoigner. Or le Dr Lionardo est formel : à ce moment-là, la jeune femme était déjà morte depuis au moins cinq heures.
    Le commissaire s’appuya contre le dossier de sa chaise et réfléchit un instant.
    — Depuis le début de l’enquête, nous avons négligé un aspect pourtant évident.
    — Lequel ?
    — S’il ressort que l’éventreur appartient à l’armée autrichienne, il s’agirait dès le départ d’une affaire ne relevant pas de la garde civile.
    — Nous aurions ainsi quatre crimes en moins dans nos statistiques ?
    — Ces meurtres relèveraient d’une procédure interne à l’armée. Spaur pourrait respirer.
    — Seulement, l’alibi du colonel n’est pas difficile à vérifier, insista Bossi.
    — Je ne manquerai pas de le rappeler à Spaur, dit Tron. Malgré tout, je pense que Reski nous cache quelque chose.
    — Quoi ?
    — Les officiers autrichiens n’ont pas pour habitude, que je sache, de monter à l’aube en haut du campanile pour admirer le lever du soleil.
    — Si le colonel n’a pas commis ce meurtre, mais qu’il ne voulait pas non plus admirer le lever du soleil, pourquoi s’est-il introduit dans le campanile ?
    Le commissaire haussa les épaules.
    — Je l’ignore.
    — Un chagrin d’amour ? suggéra l’inspecteur.
    Il fallut un moment à Tron pour comprendre l’hypothèse de son adjoint. Il arrivait de temps à autre qu’un jeune homme éperdu se jette du haut de la plate-forme et offre quelques secondes plus tard une vue assez fâcheuse. Bizarrement, c’étaient toujours des jeunes gens, jamais des demoiselles, qui mettaient fin à leurs jours de cette manière. Tron se demanda à quoi cela tenait. Parce qu’elles avaient moins de chagrins d’amour ? Peu probable. Parce qu’elles étaient coquettes ? Tout aussi impossible. À moins de supposer, songea-t-il, que les femmes étaient plus coquettes que les hommes. Mais il suffisait de penser à Bossi ou au neveu Julien pour mesurer l’absurdité de cette hypothèse.
    — Le colonel Reski n’avait pas l’air d’un homme qui souffre de chagrin d’amour, conclut-il.
    Bossi allongea la jambe gauche pour éviter qu’une poche ne se forme au niveau du genou.
    — Des dettes au jeu ? Il a passé la nuit à la roulette, après tout.
    Visiblement, l’inspecteur n’était pas prêt à lâcher la thèse du suicide.
    Tron secoua la tête.
    — Dans ce genre de cas, les officiers se servent de leur arme de service et se tirent une balle dans la tempe. Ne serait-ce que pour éviter de salir leurs habits, poursuivit-il avec un regard sur l’uniforme impeccable de son adjoint.
    Bossi n’eut pas l’occasion de riposter car, au même moment, quelqu’un frappa à la porte. C’était le sergent Kranzler, le préposé à l’antichambre de Spaur, aussi chargé du café et des provisions de bouche.
    — Le commandant souhaite vous parler à tous les deux, annonça-t-il, la mine

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