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Retour à l'Ouest

Retour à l'Ouest

Titel: Retour à l'Ouest Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Victor Serge
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syndicaliste, le POUM communiste d’opposition,
étaient irréductiblement hostiles. (Le PSUC, ou parti socialiste unifié de
Catalogne, ne s’appelait socialiste que par antiphrase ou souci de camouflage
puisqu’il était affilié à la III e Internationale et dirigé par elle.)
La Catalogne tombée, il s’avéra que les chefs militaires staliniens les plus
réputés, un Modesto, un Líster, un Campesino – qui
avaient évincé tous les autres –, n’avaient pas su la défendre ; qu’un
ministère dans lequel le parti stalinien exerçait une influence trop souvent
prépondérante, n’avait pas su organiser le salut de sa capitale ; et cette
défaite, s’ajoutant à beaucoup d’autres, obligeait désormais à porter un
jugement sévère sur la politique de répression suivie à l’arrière contre les
éléments les plus combatifs de l’antifascisme. On a bien le droit de penser, car
la preuve en est faite, que les syndicalistes et les poumistes qui
remplissaient les prisons de Barcelone eussent vraisemblablement mieux tenu le
front que les gardes civils, supérieurement équipés et dressés à des opérations
de police, qui lâchèrent pied en toutes circonstances ou passèrent à l’ennemi…
    La Catalogne tombée, ce n’est pourtant pas l’heure de
récriminer ; il faut penser à sauver Madrid, ou à obtenir, par une
résistance efficace, des conditions de paix satisfaisantes. Et cela reste
possible. Mais c’est à ce moment que M. Negrín, rendu impopulaire par les
staliniens qui l’ont compromis et – quelle que soit sa valeur personnelle – discrédité,
en tant que chef, par la défaite, procède à un remaniement inattendu du
commandement des troupes de la zone centrale, afin de confier les postes les
plus importants à des militaires dits « communistes ». On saisit très
bien pourquoi un parti qui avait pris sur lui – contre tous les autres, en
réalité – de si écrasantes responsabilités, eût voulu, au dernier moment, tenir
bien en mains tous les leviers de commande, la TSF, la presse, la caisse, la
police, l’armée, les moyens d’évacuation. C’était là, de sa part, une suprême
et raisonnable manifestation de ce que d’aucuns ont appelé d’un mot frappant :
« l’impérialisme de parti » – « 
el imperialismo partidario
 ». On saisit aussi
pourquoi la réaction unanime des autres partis, socialiste – la droite de
Besteiro, la gauche de Caballero, d’accord ce jour-là –, syndicaliste-anarchiste,
républicain bourgeois, fut immédiate et se traduisit de la seule façon possible,
par la destitution du gouvernement Negrín. Le lendemain éclatait la sédition
stalinienne : des régiments se soulevaient contre la nouvelle Junte de
défense, accusée de trahir et de préparer une capitulation ; mais à partir
du moment où l’on se battit dans Madrid affamée et aux trois quarts encerclée, il
devint évident qu’on ne pourrait plus se battre pour défendre Madrid : le
parti qui se soulevait ainsi contre une capitulation probable, en tout état de
choses, la rendit en réalité inévitable et dans les pires conditions ; il
rendit même impossible la négociation utile avec l’ennemi puisque l’ancienne
capitale en proie aux batailles de rue se trouva en fait à la merci de Franco…
    Dans une lettre, âpre de ton et pleine de colère contenue, qu’il
adressait le 4 avril à M.  Martínez Barrio , président
des Cortès, Luis Araquistain , militant socialiste
espagnol, qui fut ambassadeur à Paris, dresse contre le parti « communiste »
– stalinien, bien entendu – un réquisitoire impressionnant… Il cite le mot d’un
ministre socialiste du gouvernement Negrín, le citoyen Zugazagoitia ,
qui s’exclama que « s’il avait été à Madrid, il se serait joint au soulèvement ».
« Les injustifiables nominations de la dernière heure, écrit Luis
Araquistain, mettaient en fait tous les commandements de l’armée entre les
mains du parti communiste, ce qui provoqua le soulèvement justicier du peuple
et de l’armée à Madrid et dans le reste de l’Espagne républicaine… » Et il
conclut : « le ressort profond et la raison dernière de cette immense
défaite c’est la stupide et brutale dictature communiste, laquelle a dirigé
cette guerre malheureuse et nous a conduits à ce tragique dénouement… » Le
fait que cette « dictature » n’ait été ni directe ni avouée, mais
exercée par une série de chantages

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