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Retour à l'Ouest

Retour à l'Ouest

Titel: Retour à l'Ouest Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Victor Serge
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paysan.
    En 1939, l’État s’aperçoit que les cultivateurs commencent
parfois à jouir d’une petite aisance, qu’ils doivent surtout à leur parcelle
individuelle. En mai, un arrêté intervient pour empêcher que les cultivateurs
ne s’attribuent des terres des kolkhozes. Il ne change rien. Le paysan
considère le travail pour l’exploitation collective comme une corvée et il s’en
acquitte le moins possible. En août, la loi nouvelle porte un coup droit aux
derniers cultivateurs restés indépendants des kolkhozes ; l’impôt
progressif qu’ils payeront absorbera jusqu’à 25 % de leur revenu.
    La même loi taxe les paysans des kolkhozes sans en excepter
les plus pauvres, ce que l’on fit toujours jusqu’à présent. Un revenu de 1000
roubles payera 50 roubles d’impôt. L’échelle progressive prévoit pour les
membres des kolkhozes une imposition individuelle qui peut aller jusqu’à 13
pour cent du revenu, – ceci indépendamment des sommes versées à l’État par le kolkhoze
lui-même.
    Mais comment connaîtra-t-on les revenus d’Ivanov, de Sidorov,
de Pétrov ? Va-t-on leur demander des déclarations ? On n’y a pas
songé. Va-t-on pour les évaluer consulter les livres et les calculs de l’administration
du kolkhoze et tenir compte de l’avis des intéressés ? Nullement. Les
revenus du paysan seront évalués par les autorités d’après des moyennes
régionales établies par les services du gouvernement. En d’autres termes, c’est
l’État qui évaluera les revenus du contribuable et taxera ce dernier en
conséquence.
    Un autre trait saisissant de la nouvelle loi est celui-ci :
sont exemptés de l’impôt, outre les invalides, les vieillards, les soldats en
service actif, ce qui était déjà de règle, les instituteurs, les agronomes, les
vétérinaires, les techniciens de l’agriculture, les directeurs et les membres
des administrations locales. On voit que l’exemption est réservée au personnel
technique et bureaucratique jouissant en général d’une aisance véritable.
    Nous ne saurions mieux faire que citer ici le commentaire du
camarade A. Iougov : « Pour la première fois, écrit-il, l’État
soviétique, tout en frappant les paysans dont l’aisance s’accroît, encourage
ouvertement l’enrichissement de la bureaucratie dirigeante… C’est nettement une
loi politique ». Pour assurer sa stabilité, le régime stalinien doit s’efforcer
d’enrichir la bureaucratie qui le maintient. Mais les événements internationaux
vont sans doute l’obliger à se souvenir du paysan. Il serait trop dangereux de
lui faire payer des impôts trop lourds et trop injustes quand on lui prend ses
fils pour démembrer la Pologne, défendre la Mongolie annexée, assaillir la
Finlande, tenir garnison en Lituanie…

L’échec des Russes en Finlande *
    9 janvier 1940
    La guerre de Finlande, dans sa première phase tout au moins,
devient pour Staline un cuisant échec. Que de mensonges, d’abord, pour la
déclencher ! On forge un incident de frontière, coup classique, et l’on se
refuse à l’éclaircir. On fait faire ensuite, dans l’URSS entière, une campagne
de meetings pour dénoncer à la population « l’agression finlandaise ».
On forme enfin un gouvernement Kuusinen, à la tête duquel se trouve le
secrétaire de l’Exécutif de l’Internationale communiste, réfugié à Moscou
depuis vingt ans. Trait significatif : sur le cliché représentant Kuusinen
signant le traité d’amitié que Staline vient de lui dicter, on voit Staline, Vorochilov,
Motolov, Jdanov, quatre Russes ; mais on n’a pas trouvé un second réfugié
finlandais à photographier avec eux, de même que l’on n’a pas trouvé un second
Finlandais tant soit peu connu pour participer au gouvernement de Térioki… Le
traité signé par cet exécutant docile, l’armée stalinienne franchit la
frontière finlandaise, « à la demande du nouveau gouvernement populaire »
qui s’est constitué sous l’égide du Guépéou dans un village abandonné à dix
kilomètres des avant-postes soviétiques.
    Sait-on que ces procédés inqualifiables sont mis en œuvre
contre une petite république gouvernée par le plus authentique front populaire ?
Il convient de le rappeler. Aux élections de juillet 1939, le Parlement de
Helsinki vit se former une majorité comptant 85 socialistes et 56 paysans sur
un total de 200 mandats.
    La Finlande assaillie, ses villes bombardées sans merci,

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