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Retour à l'Ouest

Retour à l'Ouest

Titel: Retour à l'Ouest Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Victor Serge
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de la guerre
civile. La République espagnole en sortira avec une production en partie ruinée,
en partie hypertrophiée (celle des industries de guerre), sans réserves de
matières premières. La pénurie des vivres et des articles de consommation
courante ne manquera pas de se faire sentir cruellement. Il n’y aura à ces maux
qu’un double remède : économie dirigée et rationnement. Déjà les biens des
capitalises et des propriétaires complices de la sédition fasciste ont été
confisqués au profit de la nation. Déjà la Généralité de Catalogne a décrété le
24 octobre, avec l’acquiescement des radicaux, la collectivisation des
entreprises industrielles et commerciales qui occupaient au 30 juin dernier
plus de cent ouvriers. En fait, ces entreprises sont paisiblement gérées par
les travailleurs depuis plusieurs mois.
    Mais économie dirigée par qui, au profit de qui ? Il n’est
qu’une réponse à cette question. Par et au profit de la classe qui aura fait, pour
le salut du pays, les plus grands sacrifices – acquérant ainsi le droit et la
force – et ce ne peut être que la classe ouvrière autour de laquelle se
rassembleront tous ceux qui, paysans, techniciens, intellectuels, bourgeois
ralliés, voudront participer à la reconstruction. La justice l’exige, la
réalité l’imposera. Du seul fait de sa résistance victorieuse au fascisme, fauteur
de guerre civile, on verra, on voit une république démocratique s’acheminer
inéluctablement vers le socialisme.
    Dans l’hypothèse d’une victoire fasciste, l’économie dirigée
s’imposerait également, mais sous d’autres formes, sans atteinte au principe de
l’exploitation capitaliste. Réduite à faire appel aux capitaux des puissances
fascistes, l’Espagne deviendrait leur vassale au sens économique du mot et
tomberait dans une sujétion semi-coloniale.

Au dernier Congrès des Soviets *
    12-13 décembre 1936
    Le dernier congrès des Soviets de l’URSS s’est tenu à Moscou
fin novembre-début de décembre. C’est le dernier, car la nouvelle Constitution
adoptée supprime ces congrès et, de façon générale, ne laisse plus subsister de
Soviets qu’au titre de municipalités. Essayons d’en retracer la physionomie.
    Staline parut, le 24 novembre, dans la grande salle du trône
du Kremlin, bondée de délégués et d’invités. Le corps diplomatique occupait des
places réservées. Des Esquimaux, des Turkmènes, des Ouzbeks, des Iakoutes, des
Samoyèdes en costumes nationaux siégeaient à leurs bancs. Quand Staline fut à
la tribune, la salle entière se leva pour l’acclamer. Cette ovation, à nulle
autre pareille dura, d’après un observateur attentif, treize minutes et
vingt-quatre secondes. Celui qu’on appelle désormais « le chef des Peuples »
était botté et souple dans une simple tunique militaire sans insignes. Sa
simplicité contrastait ainsi avec les uniformes chamarrés des maréchaux et des
chefs de la Sûreté générale aux poitrines constellées de décorations. On note
qu’il a maigri et grisonne. Il parla pendant près de deux heures, presque sans
gestes, de la nouvelle Constitution. À un moment donné, il se tourna vers la
délégation espagnole pour lui crier : « Le communisme triomphera dans
le monde entier ! » Cette exclamation fut d’ailleurs supprimée dans
les comptes rendus radiodiffusés.
    Des délégations, venues de tous les points du pays, lui
avaient apporté des présents. Les prisonniers d’un camp de concentration
vinrent lui offrir une horloge géante, qui fait paraître en sonnant l’heure, les
trois figures de Lénine, de Staline et de Iagoda. Ce dernier n’étant plus
commissaire à l’Intérieur et haut-commissaire à la Sûreté générale (il a été
limogé à la suite du récent procès de Moscou), on peut bien dire que l’horloge
n’est plus à l’heure, l’heure politique du moins. Ce doit être néanmoins un
chef-d’œuvre et il faut espérer qu’un certain nombre de détenus entendront, grâce
à elle, sonner un peu plus tôt l’heure de la libération…
    Staline souligne que la Constitution ne tolère qu’un seul
parti, le parti communiste. « C’est là son plus grand mérite », dit-il.
    Le congrès ovationna longuement, à la séance du 28, le
maréchal Blücher, commandant de l’armée spéciale d’Extrême-Orient, qui lui fit
part de la mise en exploitation d’une nouvelle voie stratégique construite à
travers la Sibérie

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