Retour à l'Ouest
nation…). L’envoyé spécial du
Times
écrit le lendemain :
« J’ai vu… plus de trois mille bombes incendiaires lancées en plus de
trois heures. Les types d’avions utilisés étaient de lourds avions de
bombardement, des Junkers 52, ainsi que d’autres appareils Heinkel III, à
vitesse moyenne et des avions de chasse Heinkel 51. Moi-même, j’ai essuyé le
feu des mitrailleuses de six de ces appareils… ». Des aviateurs allemands
sont tombés dans les lignes basques. Un nommé Hans Joachim Wendel, 23 ans, silésien,
a été pris. Son journal portait : « Guernica, 26 avril, jour de la
destruction de cette ville. »
M. Noël Monks, correspondant du
Daily Express
écrit le 11 mai :
« J’ai vu bombarder Guernica… Mes confrères et dix mille habitants de
Guernica ont vu… trente avions de bombardement… le 26 avril à 4 heures de l’après-midi… »
Le père Ossaindia, chanoine de Valladolid, a vu. Quatre infirmières ont vu et
elles clament, ces femmes naïves : « Ceci est prouvé par deux mille
morts… » Des milliers de rescapés ont vu.
En foule, des intellectuels catholiques ont signé, après ces
choses atroces, un appel à la conscience du monde… [142]
(Et le socialisme tout entier signe avec eux. Mais pourquoi
ne signez-vous rien, Mauriac, Maritain, Madaule [143] , Pierre Seigneur,
Luigi Sturzo, devant les massacres de Badajoz et de Malaga, devant les
bombardements de Madrid ? Chrétiens, chrétiens ! Le sang des catholiques
est-il plus sacré à vos yeux que celui des travailleurs même anarchistes ?
Dans quel Évangile avez-vous appris ce comportement ?)
Voilà les faits. Et voici le mensonge. Un monsieur Max
Massot, dans le
Journal
du 8
mai raconte en détail comment la soldatesque rouge mit le feu à Guernica. Ce
sont les Basques eux-mêmes, voyez-vous, qui ont détruit leur ville sacrée. La
Gazetta del Popolo
de Rome écrit le 3
mai que « le bombardement de Guernica a été une opération essentiellement
militaire, nécessitée par les circonstances… » On n’a pas encore songé à
nier le bombardement. Radio-Burgos, le 15 mai, impute le crime à l’aviation
marxiste contre laquelle les nationaux auraient victorieusement défendu
Guernica ! Seulement, le 4 mai, le
Corriere
della Serra
(Rome) avait mieux menti encore, atteignant au comble, avec
ces lignes étourdissantes :
« Il n’y a eu de bombardement de Guernica que dans la
fantaisie des Basques, des Français, des Anglais. »
À Paris,
Le Jour
,
quotidien dirigé par M. Léon Bailby reprend la thèse
de M. Massot : ce sont les rouges qui ont incendié Guernica.
Le Jour
donne des citations tronquées d’un
correspondant du
Times.
M. David
Scott du
Times
, lui donne
aussitôt un démenti que M. Bailby ne publie pas. Il continue, au contraire,
à affirmer le mensonge. D’autres journaux l’imitent. Une discussion technique s’engage.
Il n’y a pas de trous de bombes à Guernica. Mais les bombes incendiaires n’en
font pas !
L’Action française
prend
hautement la défense de la Vérité à majuscule, la Vérité des généraux
nationalistes bien entendu.
« Guernica a été dévorée par les incendies que les
Russes y avaient méthodiquement allumés… »
En vain,
L’Aube, la
Flèche,
le
Times
,
le gouvernement de Bilbao – et ce n’est pas un gouvernement comme un autre, puisque
c’est celui d’un petit peuple que l’on assassine – multiplient-ils les
témoignages comme celui-ci d’un envoyé du
Times
:
« Un journaliste qui m’accompagnait a ramassé lui-même trois éclats de
bombes incendiaires de fabrication allemande et portant la date 1936. » En
vain. Le mensonge d’abord, le mensonge persévère, le mensonge, imprimé par les
rotatives à des millions d’exemplaires, se fait arrogant, informé, bruyant, vengeur…
Comment s’y retrouvera l’homme de la rue, le pauvre bougre qui achète son
journal et croit encore que ce qui est imprimé est vrai, parce qu’il ne peut
pas concevoir, lui qui est honnête comme n’importe qui, quels empoisonneurs d’esprits
dirigent aujourd’hui la presse des puissances financières ? Il paie ses
huit sous sans se douter qu’on lui asphyxie l’intelligence pour lui prendre
demain sa vie.
Deux héros
10-11 juillet 1937
Nous vivons tous au milieu des turpitudes ; et
prisonniers nous-mêmes de nos minuscules intérêts, dévorés jusqu’à l’âme par
les travaux, les luttes, les peines, les contraintes
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