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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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irlandais, gaillards de stature impressionnante.
     
    Avant de faire descendre, le long de la coque du Phoenix , l'échelle de corde dite de pilote, Mark Tilloy prévint les arrivants que ne monterait à bord que leur commandant.
     
    – C'est à nous, de la marine des États-Unis, de décider, mon garçon. Je suis le second du Storm et mes hommes monteront avec nous sur votre bateau, dit un lieutenant qui portait veste ouverte sur une chemise dépourvue de cravate et deux pistolets passés dans la ceinture.
     
    – Le commandant Lewis Colson me prie de vous réitérer que seul sera admis à bord l'officier le plus élevé en grade. Et cela par pure courtoisie, car ce n'est pas une obligation. Notre yacht est un navire de plaisance naviguant sous pavillon de Sa Très Gracieuse Majesté la reine Victoria. Allez le dire à votre commandant... mon garçon, insista Tilloy, persifleur.
     
    Et il donna l'ordre de relever l'échelle de pilote, ce qui déclencha la colère de l'Américain.
     
    – Assez parlé. Allons-y ! Pas besoin de votre échelle. Lancez un grappin sur ce rafiot et montez tous à bord. On va bien voir ! ordonna-t-il à un quartier-maître.
     
    Celui-ci, fort adroitement, lança le grappin fixé au bout d'un filin. Les griffes de l'engin d'abordage se plantèrent dans l'acajou de la lisse.
     
    – Ça alors ! Capitaine, on va pas les laisser faire ? intervint Tom O'Graney, prêt à décrocher le grappin et à en découdre.
     
    – Attendons un peu qu'il y en ait un ou deux suspendus au filin, dit le maître d'équipage avec un clin d'œil à Tilloy.
     
    Déjà, un premier marin, s'aidant de la corde à nœuds, s'élevait le long de la coque du Phoenix . Tom attendit qu'un second l'eut empoignée pour entreprendre à son tour l'escalade. Sur un signe de Tilloy, l'hercule irlandais, sans effort apparent, souleva le grappin, la corde et ceux qui s'y trouvaient, suspendus comme araignées à leur fil. Ayant ainsi libéré la lisse de la griffe de l'engin, il éloigna celui-ci du bordage et lâcha prise, laissant choir dans la mer, entre la baleinière et le voilier, les deux marins américains. À bord de leur embarcation, furieux, les camarades des baigneurs armèrent les fusils et mirent en joue O'Graney. Ils paraissaient décidés à tirer sur les gens du Phoenix quand le commandant Lewis Colson apparut au côté de Tilloy.
     
    La calme détermination, la tenue stricte et élégante autant que le regard acéré de l'officier impressionnèrent le lieutenant, de qui on pouvait craindre qu'il commandât le feu.
     
    – Vous outrepassez vos droits vis-à-vis d'un bâtiment britannique, donc neutre, qui s'est spontanément arrêté à votre approche. Vous avez endommagé la lisse de mon bateau, vous menacez mon équipage de vos armes : ce sont là des mœurs de flibustiers. Seraient-elles aussi celles la marine des États-Unis ? L'affaire du Trent ne vous a donc pas servi de leçon ? lança Colson, d'un ton sec.
     
    Le discours rendit le lieutenant perplexe. L'arraisonnement du Trent avait failli, un an plus tôt, déclencher la guerre entre la Grande-Bretagne et l'Union. Ce yacht luxueux ne pouvait qu'appartenir à un armateur influent. On risquait peut-être un nouvel incident diplomatique. Comme l'homme cherchait une réplique qui ne venait pas, Mark Tilloy intervint.
     
    – Dites à vos hommes d'abaisser leurs armes et allez chercher votre commandant. L'Angleterre n'est pas en guerre avec votre pays.
     
    Aussitôt, la baleinière s'éloigna. Un quart d'heure plus tard, elle revint, ayant à son bord le capitaine du Storm , un homme jeune qui portait avec aisance un uniforme bien coupé. Voyant qu'il aurait affaire à un officier de bonne tenue, Tilloy fit remplacer l'échelle de pilote par l'échelle de commandement, véritable escalier, que l'officier gravit seul, tandis que le maître d'équipage du Phoenix lançait à pleine voix la formule d'accueil en vigueur dans la marine de Sa Très Gracieuse Majesté : « Passe du monde sur le bord ! »
     
    Formé à l'Académie navale d'Annapolis, Ellis Follett, rejeton d'une honorable famille de Boston, fut sensible à cette attention. En posant le pied sur le pont, il se tourna vers l'arrière, salua l'Union Jack et se présenta en gentleman. Ce protocole laissa pantois le lieutenant rustaud, resté dans la baleinière avec les marins, qui ne lâchaient pas leur fusil.
     
    – Si vous voulez m'accompagner à la chambre de

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