Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
jalousie, plus que pour défendre, comme il le prétend, l'honneur de son père sénile, que ce garçon veut se battre avec moi. En attendant, je ne suis pas mécontent d'avoir, avec une seule femme, fait deux cocus – le père et le fils – dans la même famille ! conclut Malcolm, égrillard.
     
    – Avec une femme aussi facile que Varina, vous n'avez pas eu grand mérite. Pourvu qu'il fût un peu entreprenant, le premier venu en eût obtenu autant, mon cher.
     
    – Sans doute. Et pour vous prouver que, moi aussi, je sais mon Cid , je reconnais volontiers qu'« à vaincre sans péril on triomphe sans gloire » ! Mais je suis prêt à rendre raison à cet olibrius... si les Nordistes le laissent entier ! lança Murray avant de monter dans sa voiture.
     

    Trois jours plus tard, Ounca Lou apprit à Charles que Varina avait reçu une lettre de l'avocat de Bertie III Cornfield, qui lui faisait part de la volonté de ce dernier de rompre légalement leur mariage. Le solicitor demandait à l'épouse de lui faire connaître le juriste par elle choisi pour défendre ses intérêts devant le tribunal des divorces de Wilmington. Il signifiait aussi que Bertie III, ne souhaitant pas revoir son épouse, ferait expédier, où elle voudrait, ce qui lui appartenait en propre : meubles, bibelots et toilettes se trouvant encore à Clarendon House.
     
    Sitôt reçu cet avis, Varina s'était précipitée à Exile House pour demander conseil à Malcolm Murray. Ce dernier l'avait invitée à aviser sans tarder lord Simon afin d'éviter tout quiproquo.
     
    Bientôt, tous les membres du petit cercle du Cornfieldshire furent au fait de l'événement, et ceux qui approchèrent Varina les jours suivants constatèrent qu'elle ne paraissait nullement affectée par sa brutale répudiation. Winnie confia à Ounca Lou, en visite chez Ann, qu'en épousant Bertie III Cornfield, qui avait trois fois son âge, elle s'était assuré une position sociale en Caroline du Sud, et avait surtout échappé à une famille d'un puritanisme dépassé.
     
    – Ma mère emmaillote encore les pieds des pianos et appelle le coq mari de la poule. Elle m'interdisait la lecture de romans français et proscrivait de la conversation tous les mots pouvant évoquer la virilité masculine. Comme pour beaucoup de jeunes filles de ma condition, le mariage, loin d'être une sujétion, fut une libération.
     
    – Comment vos parents, tels que vous les décrivez, vont-ils prendre l'annonce de votre divorce ? demanda Ounca Lou.
     
    – Ils vont y voir un vrai scandale, comme tous les puritains, pronostiqua Ann.
     
    – Ils prendront ça comme ils voudront ! D'ailleurs, je suis certaine que mon cher époux a déjà dû les informer de sa décision en commentant ce qu'il nomme, d'après son avocat, « des turpitudes » qui m'eussent « autrefois valu la lapidation des femmes adultères ».
     
    – Dieu merci, de nos jours, le divorce suffit ! s'exclama Ounca Lou.
     
    – Maintenant, chères amies, je suis une femme libre. Les puritains ne me recevront plus, les femmes dites honnêtes me tourneront le dos, mais je ne manquerai jamais de chevaliers servants prêts à s'amuser. Ma marraine m'a légué une jolie fortune dont je n'ai – heureusement – pas confié le placement à Bertie, mais à une banque anglaise. Je compte aussi obliger le cher Bertie à me restituer les sommes que j'ai investies dans Clarendon alors qu'il courait à la faillite. Je vais me rendre à Nassau pour consulter l'avocat anglais que m'a recommandé lord Simon, lequel, entre nous, est bien plus aimable avec moi depuis que mon époux m'a rejetée, expliqua Winnie.
     
    – Lord Simon est veuf. Ce pourrait être un nouveau parti pour vous, suggéra l'infirme avec malice.
     
    – Plus jamais de mari, Ann ! Ni jeune ni vieux ! Des amants, oui, à condition qu'ils soient de bonne éducation, riches, beaux si possible, et décidés à partager sans contrainte tous les plaisirs que la vie offre à ceux et à celles qui n'ont pas vocation de sainteté.
     
    – Voilà une profession de foi de courtisane Grand Siècle ! Je vois mal, dans ce rôle, une femme de votre qualité. Vous parlez aujourd'hui sous le coup d'une cruelle déception. Le cœur reprendra sa domination sur les sens, et vous irez, nous le souhaitons, vers un nouveau bonheur, dit Ounca Lou.
     
    – En attendant, je compte voyager, voir des pays et des gens, en somme profiter de ma liberté,

Weitere Kostenlose Bücher