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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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connaît pas ce refus de la guerre. Les garçons s'enrôlent avec enthousiasme, sans être sollicités, parce que notre cause est bonne. Les fils de planteurs – car personne, chez nous, ne fuit son devoir – s'en vont faire la guerre avec leur nègre comme ordonnance, débita fièrement Varina.
     
    – On m'a dit que leurs officiers ont bien du mal à faire admettre à ces jeunes gens qu'un domestique ne peut pas monter la garde à la place de son maître, objecta Malcolm, narquois.
     
    À la fin du repas, avant que les hommes ne se retirent pour aller fumer leur cigare, Edward Carver fit tinter son verre avec sa cuiller. Aussitôt le silence s'établit et tous les yeux se tournèrent vers le major. Quand il dressa sa frêle silhouette derrière sa chaise, il parut à tous de dix années plus jeune que la veille. Mince et sec comme un sous-lieutenant, serré dans son habit bleu à boutons dorés, teint frais, regard vif, il caressa les toupets de cheveux blancs qui cernaient son crâne chauve, tic connu qui fit sourire tous les convives.
     
    – Mes amis, je dois vous annoncer ce qui est pour moi une heureuse nouvelle. Lady Lamia Cornfield, sœur de mon vieil ami lord Simon, accepte enfin de devenir ma femme. Vous me direz qu'il n'était que temps, compte tenu...
     
    Il fut interrompu par les applaudissements et les vivats. Tous les hommes se levèrent dans une sorte de tumulte bon enfant. Lord Simon, informé depuis plusieurs jours, fit le signe qu'attendait Pibia. Les détonations du champagne débouché ponctuèrent les félicitations et les vœux adressés à Lamia et au major.
     
    Fish Lady, peut-être pour la première fois de sa vie en proie à un accès de confusion, baissait la tête pour cacher son émotion, secouant les boucles de sa toison léonine que les lumières des lustres argentaient.
     
    – On dit les lanciers du Bengale gens obstinés et intrépides. Mon vieil ami Edward illustre bien les vertus de cette arme. Il a eu mon incommode sœur à la persévérance ! lança lord Simon en levant son verre.
     
    Quand Lamia se redressa, ses yeux de sorcière, entre escarboucle et diamant noir, flamboyaient.
     
    – Edward m'a eue à la fidélité, Simon. Un jour, il y a bien des années de cela, la veille de partir pour Bombay rejoindre le 3 e  lanciers, il m'a dit : « Je n'épouserai jamais une autre femme que vous. » Aujourd'hui, je suis heureuse de l'aider, à ses risques et périls, à tenir parole, dit-elle, s'abandonnant à l'enlacement du major.
     
    – À quand le mariage ? demanda Ounca Lou.
     
    – Avant la fin de cette année. À mon âge, on compte en semaines, dit Carver.
     
    – Par ma faute, il y a eu tant d'années, et peut-être de bonheurs perdus, souffla Lamia à sa filleule, venue l'embrasser.
     

    En quittant Cornfield Manor tard dans la nuit – car, après l'annonce du mariage d'Edward et de Lamia, les libations s'étaient prolongées –, Charles, enfreignant la consigne de lord Simon, rapporta à Murray que Bertie III voulait divorcer. Murray n'en fut pas surpris, car Desteyrac n'avait rien à lui apprendre.
     
    – J'ai trouvé, en rentrant à Soledad, un cartel du plus jeune fils de Bertie III, Franklin Davis Cornfield. Ce garçon, né de l'avant-dernier mariage de Bertie, est actuellement occupé à faire la guerre. Il me provoque en duel, en lieu et place de son vieux père, et propose une rencontre, dès la fin du conflit, sous les chênes, au bord de l'Ashley ! dit l'architecte en riant.
     
    – « Le fils dégénère qui survit un moment à l'honneur de son père », cita Charles.
     
    – Ce fils, mon cher, a contribué à détruire l'honneur paternel. Varina m'a rapporté – car rien n'égale sa franchise niaise et impudique – que ce Franklin, qui doit avoir aujourd'hui une vingtaine d'années, a été son amant. Il la poursuivait, semble-t-il, « langue pendante et regard humide » – ce sont ses termes –, d'une admiration désespérée. Elle lui aurait cédé un soir, par pitié. « Que voulez-vous, m'a-t-elle dit, j'en avais assez d'être couchée dans un grand lit à côté d'un vieil homme toujours fatigué, qui passait son temps à faire des comptes et s'endormait au milieu d'une phrase ! » Elle a reconnu s'être bien divertie en guidant ce qu'on peut appeler les premiers pas d'un beau-fils puceau sur la voie du plaisir ! s'exclama Murray.
     
    – Quelle femme ! soupira Charles.
     
    – C'est donc par

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