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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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calamité, dit Charles.
     
    – Weston Clarke et Uncle Dave ont isolé le malheureux Hocker mais – cela m'ennuie de vous le dire – il a demandé à vous voir, révéla avec réticence Ounca Lou.
     
    – Me voir, moi ? Eh bien, je présume qu'on ne refuse pas une visite à un malade qui vous réclame. Je vais aller à l'hôpital, dit Charles.
     
    – Cela ne me plaît guère. Ne l'approchez pas de trop près !
     
    – Yellow Jack ne vous saute pas dessus comme une puce, ma chérie. Je verrai d'abord Uncle Dave, ne soyez pas inquiète, assura Desteyrac.
     
    Charles fit atteler et se rendit à l'hôpital, réputé le plus moderne et le mieux équipé de l'archipel. Uncle Dave, de qui c'était le jour de consultation, le reçut dans le hall où figuraient un buste de la reine Victoria et un portrait en pied d'Alister, quatrième lord de la lignée Cornfield, père de Simon Leonard, à qui l'établissement était dédié. Aussitôt, le médecin entraîna le visiteur dans le service réservé aux marins de la flotte Cornfield. Contrairement à son habitude, il ne semblait guère porté à la plaisanterie.
     
    – Ah ! vous venez voir ce pauvre Hocker. Je sais qu'il vous a demandé. Pourquoi vous, hein, qui n'êtes pas, je crois, de ses intimes ? Les malades sont souvent bizarres. Cependant, il ne délire pas – pas encore. Curieuse, n'est-ce-pas, cette demande ? Plus étrange encore la visite que lui a faite, ce matin, lady Ottilia. Inattendu, n'est-ce pas, cet intérêt d'une dame pour notre écrivain de marine ?
     
    – C'est un officier de la flotte de son père, et vous savez qu'elle est chargée des bonnes œuvres de lord Simon. N'est-il pas normal qu'elle s'intéresse aux malades ? fit observer Desteyrac.
     
    – C'est bien le premier marin hospitalisé qu'elle honore de sa visite. Enfin ! Je vais vous conduire à Michael. Vous allez le trouver changé, maigre et jaune comme un Chinois ; à cause de l'ictère, bien sûr.
     
    – Est-ce vraiment la fièvre jaune ?
     
    – Pas de doute, mon ami. Il a dû attraper ça à Nassau. Très forte fièvre, maux de tête, vomissements sanguinolents, douleurs dans les reins et les muscles du cou. Et, symptôme caractéristique, le pouls, qui battait la chamade quand on me l'a amené, est maintenant presque imperceptible. Nous en sommes au cinquième jour. On dit : « Au cinquième jour, la vie reprend son essor ou renonce devant la mort. » Si le malade doit s'en tirer, la fièvre tombe. Mais, chez Hocker, aucun signe d'amélioration, au contraire, révéla Uncle Dave.
     
    – N'existe-t-il aucun remède efficace ? s'enquit Charles.
     
    – Difficile de combattre ce sacré Yellow Jack. Le quinquina, les boissons acidulées et glacées, les tisanes d'hellébore, les emplâtres d'herbes aromatiques ne donnent rien. On a même frictionné le pauvre garçon avec du jus de citron et on lui a passé au cou un collier d'araignées ! Ce sont les remèdes préconisés par mon vieil ami Maoti-Mata. Aucun effet, si ce n'est un rafraîchissement passager du sang, dû au citron.
     
    – On dit, à Wilmington, qu'un malade sur trois succombe, dit Charles.
     
    – C'est hélas vrai, mon ami ; et je m'attends à voir Michael délirer ou entrer dans le coma d'un moment à l'autre, diagnostiqua Uncle Dave.
     
    – Est-ce une maladie contagieuse ?
     
    – On dit que non. Mais à New Orleans, où la maladie est endémique, on conseille tout de même l'isolement des fiévreux. Ne lui serrez pas la main. Je suis de ceux qui pensent que les humeurs mauvaises passent aussi par l'exsudation, acheva le médecin à voix basse.
     
    Puis il poussa la porte de la chambre où reposait l'écrivain de marine. Charles contrôla son saisissement en voyant le visage émacié et jaune de Michael Hocker. Le drap qui recouvrait son corps amaigri avait déjà la ductilité du linceul. À l'entrée du visiteur, le malade eut un vague sourire. Son regard bleu, brillant de fièvre, devint implorant quand il fit signe à Charles d'approcher une chaise et de s'asseoir près de son lit, tandis que le médecin quittait la chambre.
     
    – Je sais, mon cher Desteyrac, que je n'en ai plus pour très longtemps. J'ai vu assez de victimes de Yellow Jack pour être sans illusion sur mon cas.
     
    – Voyons, voyons, Michael, on vous soigne. Vous n'en êtes pas là, protesta Charles.
     
    Le malade négligea cette dénégation, la prenant pour ce qu'elle était, et

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