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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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père – entra en production.
     
    Les fruits étaient d'abord épluchés, débarrassés de leurs écailles végétales épineuses, purgés des yeux qui gâtaient leur aspect. Les meilleurs, ayant acquis une forme cylindrique adaptée aux boîtes, étaient plongés entiers, pendant dix minutes, dans des bassines de cuivre pleines de sirop de sucre de canne chaud, puis placés dans les boîtes que le sertisseur fermait à la presse. Les fruits de deuxième qualité, découpés en tranches, ceux de troisième qualité, réduits en cubes, bénéficiaient aussi d'une immersion dans le sirop avant emboîtage. Des apprentis collaient ensuite, sur chaque boîte, l'étiquette colorée, dessinée par Malcolm Murray : une couronne d'ananas au-dessus de la mention « Cornfield and Co., Bahama Islands ».
     
    L'entreprise mise en route avec succès, lord Simon demanda à Charles de s'intéresser aux autres propriétés qu'il possédait dans les îles, car il s'était peu soucié jusque-là de leur rentabilité. À bord de son brick Apollo , maintenant aménagé comme un yacht de croisière, Charles, ayant choisi Lewis Colson comme capitaine, proposa une tournée dans le sud de l'archipel.
     
    – Ne vous attardez pas. Maoti-Mata est pour une fois d'accord avec le père Taval pour dire que les ouragans, retardataires cette année, pourraient, après deux saisons trop paisibles, se révéler violents, avertit lord Simon.
     
    Puis il remit à Charles copie des actes de propriété des lieux que l'ingénieur allait visiter, et des certificats d'actionnaire au cas où les gérants de ces domaines mettraient en doute son autorité.
     
    Desteyrac quitta Cornfield Manor en sifflotant. Cette croisière en compagnie de Lewis Colson, capitaine capable de déjouer toutes les traîtrises des courants et de tenir un bateau à l'écart des plus sournois récifs, allait rompre, pour un temps, la confortable monotonie de son existence entre famille et chantiers. Quand vint le moment du départ, à la fin d'un été jusque-là exempt de fortes tempêtes, il fit à Ounca Lou de tendres adieux. Ce n'était pas la première fois qu'il s'éloignait d'elle et de Pacal, mais son absence, d'une durée imprévisible, pourrait être longue.
     
    – Je ne suis pas comme Eliza Colson, femme de marin, habituée aux absences d'un mari toujours à courir les mers. Toute séparation d'avec vous me pèse comme un amas de craintes, reconnut-elle en conduisant Charles au port oriental.
     
    Ils se séparèrent sur le quai, au pied de l'échelle de coupée de l' Apollo . Coque blanche, pont de teck fraîchement poncé, lisse d'acajou vernissé, cuivres aux reflets vermeil, beaupré pointé comme une lance, le deux-mâts déployait déjà ses voiles de manœuvre.
     
    Sitôt la terre perdue de vue, Lewis Colson choisit de faire route au sud, plein océan, hors de la manade des îles et îlots. Après Mayaguana Island, le navire embouquerait Caicos Passage pour se rabattre vers Great Inagua Island, au sud-ouest de l'archipel, à soixante-cinq milles de Cuba et à deux cent trente milles de Soledad, soit à deux jours de navigation. Charles et Lewis avaient en effet décidé de commencer leurs visites par les salins de Great Inagua.
     
    Sur le chemin du retour, ils feraient escale à Acklins Island où vivait autrefois la plus importante colonie des Arawak, puis à Crooked Island où poussait en abondance la cascarille au parfum entêtant, second lieu de débarquement de Christophe Colomb, d'après les indigènes. Cette île avait été colonisée par des loyalistes, venus en 1783, avec un millier d'esclaves, pour établir une quarantaine de plantations et tenter, sans succès, d'y faire pousser le coton. Tous avaient peu à peu renoncé à cette culture et quitté l'île. Depuis 1865 s'installaient à leur place des réfugiés sudistes, autre génération de planteurs privés d'esclaves.
     
    En remontant vers Soledad, l' Apollo toucherait Ragged Island, dont les marins affirmaient qu'elle avait été le refuge favori du pirate Barbe-Noire. Simon Leonard Cornfield y possédait des parts dans les petits salins.
     
    Le brick n'eut à affronter qu'un orage tropical, au cours duquel le voilier offert par lord Simon à son gendre prouva, à la grande satisfaction de Colson, « son comportement doux et bien réglé ». Le navire, ses passagers et son équipage furent reçus à Great Inagua, avec beaucoup d'égards, par un régisseur de la

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