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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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enjouée.
     
    – Ils forment en effet un assez joli couple, reconnut Ounca Lou.
     
    Dans l'après-midi, Myra, suivie par toute la compagnie, tint à accompagner le capitaine Maitland jusqu'à son bateau. Le Hawk , chaudières déjà sous pression, devait appareiller pour Cuba. Au bas de l'échelle de coupée, la jeune fille, assez émue, remercia le marin pour le service insigne qu'il venait de lui rendre en l'épousant.
     
    – Tant que je porterai votre nom, il sera à l'abri de tout outrage, dit-elle en lui tendant sa main.
     
    – Vous me le rendrez quand bon vous semblera, dit John en s'inclinant.
     
    De Nassau, lord Simon fit expédier une copie de la licence de mariage à Clarendon House, avec une lettre précisant que l'épouse de John Maitland résiderait à Cornfield Manor quand son mari naviguerait au service de Sa Très Gracieuse Majesté la reine Victoria.
     

    Parmi les projets soumis par Charles Desteyrac à lord Simon, pour faire face à la crise économique de l'archipel, figurait, en priorité, la construction d'une conserverie d'ananas, à Eleuthera. Il ne faisait qu'imiter en cela un Américain de Baltimore, Henry Evans, qui, depuis 1857, exploitait à Governor's Harbour une entreprise où l'on mettait, sans préparation, les ananas en boîte. Le sertissage artisanal des récipients de fer blanc, au maillet, n'assurant pas toujours une fermeture hermétique, Charles convainquit lord Simon de commander aux États-Unis une presse à sertir les boîtes métalliques.
     
    Stimulé par la réussite d'un Anglais, un certain Preston, venu du Hertfordshire en 1858, qui produisait, sur des terres acquises sur la côte nord d'Eleuthera, tomates, oignons, ananas, mangues, oranges et bananes, qu'il exportait en caisses aux États-Unis et aux Bermudes, lord Simon entendait faire de ses vergers et de ses potagers la première exploitation agricole de l'île. En 1864, vingt ans après l'arrivée des premiers ananas bahamiens à Londres, sur le marché de Covent Garden, Eleuthera avait expédié 229 226 douzaines de ces fruits exotiques pour la valeur de 21 299 livres sterling. Charles était persuadé qu'on pouvait faire mieux en livrant les ananas en conserve, car un fort pourcentage des fruits expédiés en caisse, même avant pleine maturité, se révélait inconsommable à leur arrivée à New York, après huit jours de mer. Augmenter la production était chose aisée, car l'ananas jouit d'un procédé naturel de reproduction. Dès qu'un fruit, qui met huit mois à mûrir, est cueilli, se développent au pied de la plante plusieurs surgeons. On réserve le plus vigoureux, qui produira un fruit l'année suivante, tandis que les autres sont coupés et mis en terre pour donner naissance à de nouveaux pieds producteurs.
     
    Jusque-là, les ananas destinés à l'Angleterre étaient cueillis avec leur tige et leurs feuilles, disposées en rosette, afin d'assurer aux fruits une meilleure conservation pendant près de trois semaines de voyage.
     
    « Ils seront, sans aucun doute, mieux appréciés, sortis d'une boîte hermétique et prêts à la consommation », avait dit l'ingénieur.
     
    Dès que la sertisseuse, livrée en un temps record grâce à l'intervention de Robert Lowell auprès du fabricant de Pittsburgh, fut installée, et que l'approvisionnement en boîtes de fer blanc parut assuré, Charles envisagea d'embaucher des femmes pour préparer les fruits, des hommes pour la manutention et l'emballage. Mais, avant d'engager du personnel, l'ingénieur dut encore convaincre lord Simon de renoncer au Truck System , trop souvent utilisé dans l'archipel par les colons pour payer leurs ouvriers et leurs domestiques. Cette pratique, que les Américains nommaient Store Order System , n'était, aux yeux du Français, qu'une résurgence du troc en usage dans les sociétés primitives. Le Truck System permettait de remplacer le salaire en espèces par une distribution de produits de première nécessité : farine, sucre, riz, café, tabac et parfois vêtements.
     
    – Nous devons payer nos gens en bonne monnaie anglaise et non plus les traiter comme des assistés de la Mission chrétienne de William Booth 7 . Il y va de leur dignité ! dit Charles.
     
    Lord Simon grogna comme un vieil ours, mais se rendit aux raisons de Desteyrac. Dès la fin de l'été, la conserverie Cornfield and Co. – car elle conditionnait aussi les ananas récoltés sur les terres d'Ounca Lou, associée de son

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