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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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détour par Valmy, où elle ne trouva que des domestiques encore éplorés, prit au trot rapide de sa jument la route du Sud.
     
    Sur le rivage de Pink Bay, le cottage de Desteyrac avait été ravagé par les vagues, lors des ouragans, et Timbo, aidé de Sima, s'était appliqué à le rendre à nouveau habitable. L'Arawak, occupé à peindre la nouvelle véranda qui remplaçait celle que la tempête avait emportée, vint au-devant de la visiteuse.
     
    – Mossu Cha'les est au chantier du t'ain. Y va bientôt veni', m'ame. Sû' qu'y se'a content vous voi', m'ame, dit Timbo.
     
    Et il invita Ottilia à prendre place dans un rocking-chair, sur la petite galerie. Comme il servait, sans en avoir été prié, un jus d'ananas, Ottilia le retint.
     
    – Il y a des mois que je ne me suis pas baignée. Je vais me mettre à l'eau. Rentre au cottage, ordonna-t-elle.
     
    Habitué aux fantaisies parfois incongrues des Blancs, l'Arawak s'exécuta tout en se demandant si la lady avait un costume de bain sous sa robe.
     
    Ottilia n'en avait pas, mais elle se dévêtit, ne conservant qu'une culotte à volant de dentelles et une brassière, puis, observée à la dérobée par Timbo, elle traversa la plage de sable rose, entra dans l'océan, s'ébroua et se mit à nager.
     
    « Si va loin, mo'due par les sha'ks 4  », pensa Timbo.
     
    Il alla quérir le long harpon des pêcheurs bahamiens, dont il connaissait le maniement, et s'assit sur le sable, décidé à se jeter à l'eau pour secourir l'imprudente. Comme toujours quand il n'était pas occupé, l'Arawak sombra dans une somnolence béate, d'où le tira la voix de son maître.
     
    – Tu crois que les mérous vont venir à toi sur le sable ? dit Charles.
     
    – Lady Ottilia est là-bas, dans l'eau. J'a peu' pou' elle. Les sha'ks sont toujou's pa'-là, dit-il en désignant la nageuse.
     
    De loin, Otti échangea un signe de la main avec l'ingénieur et se mit à nager vers le rivage.
     
    – Rentre et prépare des serviettes, ordonna Charles à Timbo.
     
    La naïade, surgie de l'eau entre deux vagues, lui rappela sa première rencontre avec Ounca Lou. Il avait vu la filleule de Lamia, au même endroit, séduisante apparition, sortir de l'océan après le naufrage de sa barque. Le rappel de cette scène inoubliable le troubla au point qu'il accueillit fraîchement son amie. La lingerie de batiste, rendue transparente et moulante par l'eau, dévoyait, en l'accentuant, la nudité vénusienne d'Otti.
     
    – Êtes-vous venue d'Angleterre à la nage ? lança-t-il, narquois.
     
    Puis il se retourna pour gagner son bungalow, moins par respect pour la pudeur d'Otti que parce qu'il doutait soudain de l'innocente spontanéité de cette baignade.
     
    Alors que sa relation amoureuse avec Ounca Lou était déjà connue, lady Ottilia n'était-elle pas venue les surprendre, à Pink Bay ? Ce jour-là, les voyant tous deux sortir nus de l'eau, main dans la main, elle s'était effondrée en larmes sur le sable. « Un couple de commencement du monde », avait-elle lancé. Le soir, Charles avait appris à Buena Vista ce que Lamia avait nommé « l'exception physiologique » de sa nièce.
     
    Voir Ottilia se substituer, effrontée et sans délicatesse, au souvenir d'Ounca Lou, pour une parodie triviale d'un bonheur anéanti, scandalisa l'ingénieur. Connaissant toutes les insupportables frustrations de la jeune femme, il ne pouvait cependant s'empêcher, dans l'instant, de lui en tenir rigueur.
     
    Quand elle fut séchée et habillée, Otti demanda une tasse de thé, que Timbo s'empressa de préparer et qu'il servit en même temps que le yellow bird réclamé par Charles.
     
    Ce dernier ne fit ni allusion ni commentaire, et, après quelques banalités sur le séjour d'Otti en Angleterre, l'avenir de Pacal fut leur principal sujet de conversation.
     
    – Je suis prête à venir m'installer à Valmy pour tenir la maison et m'occuper de Pacal. Ounca Lou m'a dit un jour, me voyant mélancolique : « Vous êtes la seule à qui je confierais mon fils », osa-t-elle rappeler.
     
    – Je souhaite ne rien changer à l'organisation de notre vie. Pacal, très mûr pour ses bientôt dix ans, n'est pas un orphelin larmoyant. Il étudie les matières nécessaires pour suivre, un jour, en France, les cours du collège qui le préparera au concours d'entrée à l'École polytechnique et aux Ponts et Chaussées. Car, après avoir voulu se faire marin, pêcheur d'éponges puis

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