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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Floride et Nassau 3 , dit Murray.
     
    – Belle idée ! Où prendra-t-on l'argent ? Cette année, le revenu de l'archipel est inférieur d'un tiers au coût de la garnison entretenue par la Couronne. Ce n'est pas quand on ne peut plus payer les fonctionnaires, que le Royal Victoria Hotel est à l'abandon, faute d'acheteur, et qu'on n'allume plus les lampadaires sur Bay Street, pour économiser l'huile de houille, que l'on trouvera des actionnaires pour une entreprise coûteuse et de profits incertains, fulmina lord Simon.
     

    Pressée de revoir ceux qui, à Soledad, pleuraient sa demi-sœur, lady Ottilia choisit, pour regagner Nassau, la malle de la Jamaïque, le navire le plus rapide et le moins confortable. Aussi personne ne l'attendait au port occidental, ce matin de janvier 1867, quand elle descendit du bateau-poste affecté au service des Out Islands.
     
    Le commandant du port la fit aussitôt conduire à Cornfield Manor, où son père lui révéla les détails des drames vécus en son absence.
     
    – Ah ! Rosebud ! Vous savez maintenant quels douloureux moments nous avons vécus en votre absence, conclut le lord, encore ému à ce rappel.
     
    – Je vais proposer à Charles de me charger de l'éducation de Pacal pour suppléer à l'absence de sa mère, décréta aussitôt Ottilia.
     
    – Vous verrez cela avec lui. Jusqu'ici, il s'en tire assez bien. Il domine son chagrin, travaille comme un forcené et continue à vivre avec Pacal de qui Lamia s'occupe beaucoup depuis qu'elle est veuve. Et il a fait brûler par Timbo et Adila toute la garde-robe de sa femme, eut l'air de s'étonner lord Simon.
     
    – Je comprends ça. Conserver ces toilettes était impossible, et les offrir un geste impensable, dit Ottilia.
     
    – Il aurait pu les faire vendre à New Providence où les femmes les plus coquettes n'hésitent pas, m'a-t-on dit, à porter des vêtements ayant appartenu à d'autres, observa Simon, ennemi de tout gaspillage.
     
    – C'est ça ! Et, un jour, Charles eût croisé une femme portant une robe d'Ounca Lou ! Mon pauvre père, vous ignorez tout ce que représente, pour un homme, les toilettes d'une morte. Une robe vide se souvient des formes de celle qu'elle vêtit : la voir, la toucher éveillent de très intimes réminiscences. Manqueriez-vous à ce point de cœur ? répliqua Ottilia, choquée.
     
    Furieux d'être pris en flagrant délit d'insensibilité, Simon émit un grognement et, penaud, quitta la pièce.
     

    Les travaux de remise en état d'Exile House étant achevés, Otti rentra chez elle, déplora la perte de sa coiffeuse en bois de rose, de plusieurs bibelots, de quelques robes, et fit reproche à Mortimer, l'âme damnée de Malcolm, et aux servantes de n'avoir pris aucune précaution avant l'arrivée, toujours prévisible, des ouragans. Ayant manifesté sa mauvaise humeur, elle annonça son intention de rendre visite à Desteyrac.
     
    – Je suis certaine qu'Ounca Lou aurait souhaité me savoir attentive à la consolation et au bien-être de ceux qu'elle a si brutalement quittés, dit-elle, provoquant chez Malcolm un haussement de sourcils voltairien.
     
    – Ma chère, vous me paraissez en effet la mieux placée pour prendre soin du veuf... enfin, jusqu'à un certain point ! fit-il, goguenard.
     
    – Vous êtes incapable d'apprécier un sentiment noble !
     
    – Nous nous connaissons assez pour reconnaître, chacun chez l'autre, ce que vous nommez un sentiment noble. Mais attention, Otti, Charles est mon ami, mon seul ami sur ce caillou. Alors, tenez-vous-en, avec lui, aux nobles sentiments ! avertit Murray d'un ton sec, qu'elle dédaigna d'un haussement d'épaule.
     
    – Où puis-je le trouver ?
     
    – Depuis les funérailles d'Ounca Lou, je l'ai peu vu. Il s'abrutit de travail sur la voie du chemin de fer, en attendant d'aller chercher, à Portsmouth, la locomotive de Simon. En fait, il se tient à l'écart de la société, et nous respectons cet isolement volontaire.
     
    – Où puis-je le trouver ? insista Ottilia.
     
    – Quand il n'est pas à Eleuthera, à la conserverie d'ananas, il séjourne souvent dans ce qui fut, à Southern Creek, sa maison de chantier pendant la construction du pont de Buena Vista : Little Manor, comme nous l'avions baptisée. C'est là que vous aurez le plus de chances de le rencontrer, quand il n'est pas à Valmy avec Pacal, expliqua Murray.
     
    Ottilia fit aussitôt atteler son cabriolet et, après un

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