Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
j'ai depuis passé un accord avec Gertrude, douce et gentille bécasse qui m'est toute dévouée depuis plus de quinze ans. Vous n'ignorez pas qu'elle est la maîtresse, amoureuse – et, paraît-il, ardente – de Murray ? demanda Otti.
     
    Elle usait le plus souvent du nom de famille de Malcolm pour désigner son époux.
     
    – Tous deux se comportent avec assez de discrétion pour que beaucoup l'ignorent, atténua Ounca.
     
    – Tant mieux. Mais si Murray fait un enfant, ce qu'il tente de ne pas faire, Gertrude m'abandonnera le bébé. Étant mariée, je pourrai l'adopter et, sitôt après, je divorcerai. Une loi anglaise, promulguée cette année, permet aux épouses de divorcer... pour non consommation ! précisa Otti, presque goguenarde.
     
    – C'est machiavélique !
     
    – Ne me méprisez pas, chère Ounca. C'est mon nouvel espoir.
     
    L'épouse de Charles évalua combien cette femme, belle et sensuelle, devait être malheureuse. Comme elle se taisait, Ottilia, qui avait recouvré toute son assurance, se pencha vers elle.
     
    – Sarah, l'épouse stérile d'Abraham, offrit à son mari sa servante Agar pour qu'elle procréât à sa place. Liz et Rachel, les épouses de Jacob, lui donnèrent leurs servantes, Zilpa et Dilha, afin qu'il fût père. La Bible est pleine de bons exemples, croyez-moi ! dit-elle, passant des larmes au rire.
     

    La construction de la maison destinée à Charles et à sa famille, que l'ingénieur voulait de pur style colonial des West Indies, ce qui décevait Malcolm Murray, ne commencerait qu'au cours de l'hiver. La saison des ouragans, ouverte en septembre par un assaut violent auquel le pont de Buena Vista résista sans un frémissement, eût rendu les travaux aléatoires. En attendant, Charles avait de longs entretiens avec lord Simon. On avait déjà décidé la création, sur la côte est de l'île, d'une nouvelle route empierrée, qui remplacerait le mauvais chemin de terre battue tracé par les premiers colons, et l'implantation d'un village de bungalows pour les marins et les employés mariés, quand Cornfield, à la fin d'un après-midi pluvieux, entraîna Charles dans son cabinet de travail.
     
    Caressant, d'un geste que Desteyrac savait familier et comme inspirateur, la tête de cristal de roche autrefois arrachée à la fuente del Ángel, lord Simon lui annonça tout à trac qu'il voulait un chemin de fer.
     
    – Il en existe un à Cuba depuis 1837. Il parcourt cent vingt-quatre miles entre La Havane et Limonar. Chaque jour, deux trains transportent les barils de sucre, les boucauts de tabac et les gens. Par saint George, nous ne sommes pas plus empruntés que les Cubains ! Je veux un chemin de fer entre le port occidental et Southern Creek. Une ligne nord-sud qui facilitera le transport des éponges, des écailles de tortue, des matériaux de construction, des marchandises et, bien sûr, des dames du Cornfieldshire qui voudront faire des emplettes au village des artisans, enrichi chaque année de nouvelles boutiques. On pourrait même lui faire franchir votre pont. J'aurais un beau wagon qui me porterait jusqu'à ma résidence de Buena Vista. Étudiez-moi ça cet hiver, mon bon Charles.
     
    – Un train ne pourra en aucun cas franchir le pont, lord Simon. Il faudrait en renforcer et élargir le tablier. En tant qu'ingénieur, je ne prendrai pas le risque d'y faire passer un train, répondit Desteyrac, catégorique.
     
    – Bon, bon ! Arrêtons ce chemin de fer à Southern Creek, si vous préférez, concéda Cornfield, grognon.
     
    – Même en admettant qu'il soit possible d'établir une voie ferrée jusque-là, je prévois déjà une forte opposition de lady Lamia. Elle a le chemin de fer en horreur, à cause des locomotives qui crachent de la fumée et empestent l'atmosphère.
     
    – Mon cher, je suis seul maître sur Soledad et Buena Vista. Je vous l'ai rappelé cent fois. Nous n'allons pas tergiverser comme lors de la construction du pont, hein ? Faites-moi un chemin de fer. Ce sera le premier de l'archipel, ajouta lord Simon, à la fois exalté et enjôleur.
     
    – Je dois d'abord faire une étude très sérieuse du parcours et du sol où poser le ballast. Une locomotive n'est pas une carriole. Avant de me lancer dans une telle entreprise, j'aimerais avoir l'avis d'un spécialiste, dit Charles.
     
    – Consultez qui vous voudrez. D'ailleurs, pour tout ce qui touchera aux travaux, au matériel, aux outils, voyez ça avec

Weitere Kostenlose Bücher