Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
besoin de nurse ? dit-elle.
     
    – Je la crois capable de trouver, seule, le mari qui lui convient, dit Charles en riant.
     
    Il savait par Timbo combien Adila, un tantinet sainte-nitouche, paraissait sensible aux attentions répétées du fils aîné de Sima.
     

    Comme chaque année, les orages tropicaux, souvent annonciateurs d'ouragans, se succédaient depuis la mi-juin. Ils rendirent hasardeuse la navigation entre les îles, et Charles mit à profit les jours de mauvais temps pour travailler au plan du phare qu'il espérait bâtir au Cabo del Diablo, sur Buena Vista. Il n'exposerait son projet à Fish Lady qu'une fois sûr de ses calculs et de l'assentiment de lord Simon. Cornfield devrait en effet financer non seulement des travaux de maçonnerie difficiles et coûteux, mais l'importation de France, pour assurer l'éclairage du phare, d'un tambour à panneaux lenticulaires assortis de miroirs, invention d'Augustin Fresnel 5 , ingénieur des Ponts et Chaussées.
     

    Pour son onzième anniversaire, Pacal reçut de lord Simon son premier fusil, un Purdley léger.
     
    Quelques jours après la célébration familiale, Charles, penché sur sa planche à dessin, à Little Manor, entendit les pas d'un visiteur qui dévalait le talus, derrière la maison. Sortant sur la galerie de son bungalow, il reconnut Marc Tilloy.
     
    – Rudement matinal ! fit l'ingénieur.
     
    – Je veux que vous soyez le premier à connaître la nouvelle : Ann marche ! Oui, mon ami, Ann marche ! Oh, elle n'a fait que cinq pas, soutenue par Uncle Dave et moi, mais elle lance ses jambes. Ne manque à ses muscles atrophiés que la force de la porter, mais nous avons bon espoir que cela change. Elle marchera !
     
    – Rien ne pouvait me faire plus plaisir, Mark. Vous vous êtes donné beaucoup de mal pour l'aider à triompher de la paralysie, avec Maoti-Mata et Uncle Dave, dit Charles.
     
    – Oui, si elle marche, comme nous l'espérons, ce sera notre récompense. Voir cette femme de vingt-neuf ans, que j'ai aimée, que j'aime encore, belle et gaie, condamnée à l'immobilité, me désolait. Étant donné nos relations passées, j'étais le seul à pouvoir la porter dans mes bras pour la baigner. Cela fit un peu jaser, et Weston Clarke allait répétant : « Uncle Dave et ce pauvre Tilloy se dépensent en vain, comme le vieux sorcier des Arawak qui, à chaque pleine lune, fait fumer la pauvre Ann comme un jambon », développa Mark en imitant le ton nasillard du médecin.
     
    – Le docteur Kermor et Maoti-Mata imaginaient que le mental pourrait peut-être agir sur le physique. Qu'un déclic du cerveau pourrait faire se mouvoir les jambes d'Ann, rappela Charles.
     
    – Le déclic, Charles, je crois être celui qui l'a donné. Après les premiers bains, quand je sentais le buste d'Ann, ferme contre ma poitrine, et, dans mes bras, le poids de ce corps nu, que mes mains ont souvent parcouru, le désir me prenait. Un matin, j'ai dit à Ann : « Je suis prêt à vous épouser infirme, comme je vous aurais épousée ingambe si vous n'aviez pas rompu nos fiançailles pour épouser un autre homme, un peu par versatilité juvénile, beaucoup pour sauver les affaires de votre père », rapporta Mark.
     
    – C'est généreux de votre part, reconnut Desteyrac.
     
    – Savez-vous comment elle a reçu mon offre ? Avec le regard brûlant d'autrefois, quand nous nous aimions à perdre haleine, elle a dit : « Je ne veux pas être épousée par pitié. Je ne veux pas d'un époux garde-malade. Mais, si je marche, je serai avec joie votre femme. » Et elle m'a donné un baiser qui m'a rappelé d'heureux moments. « Marchez, je vous en prie ! » lui ai-je dit. Deux jours plus tard, elle a fait un premier pas. N'est-ce pas merveilleux ?
     
    – Ounca Lou avait pour vous une grande affection et plus d'une fois, vous voyant pousser le fauteuil d'Ann, elle m'a dit : « Ces deux-là étaient faits l'un pour l'autre. Méchant destin qui réunit sans unir », cita Desteyrac.
     
    – Maintenant, j'ai confiance en sa guérison, lança Mark en quittant Charles avec la même célérité qu'il avait mise à paraître.
     

    L'été s'acheva, sans que les ouragans blessent l'archipel, et, à la fin d'un après-midi pluvieux, Charles rencontra Malcolm Murray sur le chemin d'Exile House.
     
    – J'aimerais vous entretenir d'un projet. Venez prendre un pink gin chez moi et, si vous n'avez rien de mieux à faire, nous dînerons

Weitere Kostenlose Bücher