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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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l'envoi de renforts militaires et la formation à La Havane d'un corps contre-révolutionnaire.
     

    Quand Malcolm Murray revint sain et sauf à Soledad, la veille des fêtes de fin d'année, il se montra moins enthousiasmé par une révolution républicaine, en butte à une répression espagnole violente et à des exécutions sommaires de partisans, que par les jolies Cubaines, amies de Varina.
     
    – Jamais connu de femmes ayant pareille connaissance de la gamme amoureuse ! En plus, elles sont intelligentes, élégantes et gaies, glissa-t-il à Charles, quand l'ingénieur s'empressa de lui rendre les clefs de son cabinet de curiosités.
     

    Au repas de Noël 1868, à Cornfield Manor, le maître de maison fit servir les premiers pigeons à couronne blanche tirés par Pacal, au cours d'une de leurs parties de chasse.
     
    – Ce sera un bon fusil, dit Simon Leonard avec fierté.
     
    Au moment des cadeaux, il offrit à Fish Lady la dernière invention d'un armurier américain : un fusil à harpon.
     
    – Que voilà un cadeau bienvenu, Simon, car à cinquante-trois ans révolus, j'ai de moins en moins de force pour harponner les requins blancs, et mes pêcheurs d'éponges n'ont plus autant confiance en ma protection, dit Lamia.
     

    Au fil des mois, parce qu'il ne pouvait en être autrement dans une si petite communauté coloniale, Ottilia se fit de plus en plus présente dans la vie de Charles Desteyrac. Sans s'être concertés, l'un et l'autre prenaient garde à ce que leur relation franche et affectueuse ne pût faire jaser ou susciter le genre de ragots dont étaient friandes les dames du Cornfieldshire comme Dorothy Weston Clarke et Margaret Russell. Dans les tea-parties , trop souvent réunions de jury moralisateur, on se contentait de laisser entendre que des veufs encore jeunes, comme Charles Desteyrac et le commandant Lewis Colson, ne pourraient pas vivre longtemps sans épouse. Ils ne devaient certes pas se priver des plaisirs de la chair, quand ils séjournaient à Nassau où l'on trouvait des courtisanes à tous les prix, mais cela n'annihilait pas les espérances des mères de filles à marier. De lady Ottilia, les commères n'osaient dire mot, sinon qu'elle s'occupait beaucoup du petit-fils du lord, lequel se trouvait d'ailleurs être son neveu.
     
    Excellente cavalière, Otti dédaignait l'amazone et montait, comme un homme, un demi-sang impétueux. Elle accompagnait souvent dans leurs chevauchées son père et Pacal. On les voyait galoper sur les plages, au ras des vagues où à travers champs, sauter les buissons d'hibiscus ou de lauriers, lancés à la poursuite d'un cochon sauvage comme s'il se fût agi d'un renard dans les bocages du Kent.
     
    Empruntant un alezan aux écuries de Cornfield Manor, Charles se joignait parfois au trio. Le groupe poussait alors jusqu'au village des artisans où l'on demandait l'aumône d'une collation au docteur David Kermor, à moins que, prenant de vitesse le train du matin dont le ferraillement énervait les chevaux, les cavaliers allassent jusqu'au village des pêcheurs. Ils étaient assurés, chez Sima, de se régaler d'un mérou et de beignets de conches accompagnés de poivrons doux, d'oignons et d'une purée de tomates. Il arrivait aussi que, las de trotter sous la pluie, ils s'arrêtassent chez un fermier de l'intérieur. Sans annoncer son intention, lord Simon achetait un ou deux poulets et, le marché conclu, demandait à la fermière de les cuire sur-le-champ. Fière de recevoir à sa table le maître de l'île, la paysanne servait la volaille avec du riz relevé d'un curry bahamien, à la fois sucré et piquant, où entraient, avec les épices, noix de coco émincée et limette.
     
    Ces journées créaient, pour Pacal et Charles, un rassurant climat familial. Entourés de ceux qu'ils aimaient et de leur chaleureuse affection, le père et le fils retrouvaient le plaisir de vivre dans l'univers étroit mais protégé de Soledad.
     
    Quand Charles travaillait seul à Little Manor au projet de phare, la visite d'Ottilia constituait toujours un intermède distrayant. La fille du lord apparaissait souvent en fin de matinée, s'asseyait sur la galerie, interdisait à Timbo de signaler sa présence afin de ne pas interrompre l'ingénieur. Quittant sa planche à dessin, Charles avait alors la surprise de trouver Otti, qui sirotait un jus de fruits et se balançait, rêveuse, sur un rocking-chair. Le bavardage les conduisait à l'heure du repas,

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