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Révolution française Tome 1

Révolution française Tome 1

Titel: Révolution française Tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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tocsin », déclare Cambon, fils d’un riche marchand d’étoffes de
Montpellier, député à la Législative et à la Convention et qui, chargé des
questions financières, pense aussi que le « pillage », le « butin »
peuvent enrichir la République, et même la nourrir !
    Mais il faut répondre vite à l’impatience populaire.
    Alors juger le roi, le condamner, l’exécuter, c’est aussi le
moyen commode de montrer au peuple que la République est impitoyable avec les
puissants, dont le roi devient l’incarnation, le symbole.
    Si on le tue, quel riche fermier, quel agioteur, quel
financier, quel député ou ministre pourrait être à l’abri du châtiment ?
     
    On ne sait comment combattre la misère, mais on sait juger
et décapiter le roi.
    Et le sang de Louis XVI peut étancher un temps, espère-t-on,
la soif de justice et d’égalité du peuple.

     
     
    37
    La Convention va donc juger le ci-devant roi Louis XVI.
    Et le mardi 13 novembre 1792 – il pleut et il fait frais, presque
froid –, c’est le plus jeune des conventionnels qui prend la parole.
    Il siège avec les Montagnards. C’est un exagéré, dit-on, proche
de Robespierre, mais la plupart des députés ignorent jusqu’à son nom : Saint-Just.
Et les murmures couvrent les premiers mots de ce jeune homme à la voix fervente,
qui dit :
    « J’entreprends, citoyens, de prouver que le roi peut
être jugé… »
    Mais il suffit de quelques phrases pour que le silence s’établisse,
que les sans-culottes des tribunes se penchent en avant, comme pour mieux
saisir les propos de Saint-Just, et commencer d’acclamer celui qui dit :
    « Les mêmes hommes qui vont juger Louis ont une
République à fonder…
    « Et moi je dis que le roi doit être jugé en ennemi, que
nous avons moins à le juger qu’à le combattre…
    « Un jour peut-être les hommes, aussi éloignés de nos
préjugés que nous le sommes de ceux des Vandales, s’étonneront de la barbarie d’un
siècle où ce fut quelque chose de religieux que de tuer un tyran…
    « On s’étonnera qu’au XVIII e siècle on ait
été moins avancé que du temps de César : là le tyran fut immolé en plein
Sénat, sans autre formalité que vingt-trois coups de poignard, et sans autre
loi que la liberté de Rome. Et aujourd’hui on fait avec respect le procès d’un
homme assassin d’un peuple, pris en flagrant délit, la main dans le sang, la
main dans le crime ! » Saint-Just s’interrompt, reprend son souffle, laisse
les applaudissements déferler, s’épuiser puis lance :
    « Pour moi je ne vois point de milieu : cet homme
doit régner ou mourir… Il doit mourir pour assurer le repos du peuple, puisqu’il
était dans ses vues d’accabler le peuple pour assurer le sien. »
    Les mots de Saint-Just résonnent maintenant dans un silence
de nef :
    « On ne peut point régner innocemment, dit-il : la
folie en est trop évidente. Tout roi est un rebelle et un usurpateur… Louis XVI
doit être jugé comme un ennemi étranger. »
    Saint-Just lève la main pour retenir la tempête d’approbation
qui s’annonce, roulant depuis les tribunes, entraînant la Montagne, puis toute
la Convention.
    « Il doit être jugé promptement… Il est le meurtrier de
la Bastille, de Nancy, du Champ-de-Mars, des Tuileries : quel ennemi, quel
étranger nous a fait plus de mal ?
    « On cherche à remuer la pitié, on achètera bientôt les
larmes, on fera tout pour nous intéresser, pour nous corrompre même. »
    Saint-Just se hausse sur la pointe des pieds, les bras
tendus, les mains agrippées à la tribune :
    « Peuple, si le roi est jamais absous, souviens-toi que
nous ne serons plus dignes de ta confiance et tu pourras nous accuser de
perfidie. »
    Les sans-culottes des tribunes se lèvent et leur ovation
emplit la salle du Manège.
    La voix de Saint-Just ne s’efface pas.
    Elle est encore dans toutes les mémoires quand le ministre
de l’intérieur, le Girondin Roland, annonce, le
    20 novembre, qu’on vient de mettre au jour, dissimulée sous
les lambris des Tuileries, une armoire de fer.
    C’est le serrurier Gamain qui l’a construite avec le
ci-devant roi, et c’est lui qui est venu en révéler l’existence. Elle contient
la correspondance du roi avec les tyrans, avec ses frères et ses ministres émigrés
– Calonne, Breteuil –, avec – la voix de Roland tremble – Mirabeau, et « tant
d’autres qui ont siégé parmi nous », et auxquels le

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