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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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bibliothèque, dit aimablement le jeune homme, s’interdisant de profiter de l’émoi de Zélia qu’il devinait prête à tous les abandons.
     
    « C’est peut-être ce que subodorait cette perverse d’Adry, quand elle proposait que Zélia me tînt compagnie », se dit-il en suivant la jeune fille dans le dédale des couloirs.
     
    Il avait cru bon de tirer discrètement de son bagage et de glisser dans sa ceinture la dague autrefois offerte à Venise par son ami le comte Ugo.
     
    Le séjour d’Axel à la bibliothèque, où l’abandonna Zélia en promettant de revenir le chercher une heure plus tard, ne dura que quelques minutes. Axel désirait visiter seul le château et, surtout, découvrir l’origine de ces bruits d’atelier, perçus derrière une certaine porte. Il erra longtemps dans les corridors, traversant des salles vides qui succédaient à des salons meublés de façon hétéroclite. Il se cachait dans une encoignure chaque fois qu’un bruit de pas se faisait entendre. Il vit, sans être vu, circuler ces étranges moines à robe courte, souvent chargés de petits sacs de toile qui paraissaient pesants. « Que transportent-ils ainsi ? Certes pas le saint sacrement ! » se dit Axel, de plus en plus intrigué.
     
    Il finit, en descendant un escalier, par reconnaître le palier du premier étage où donnait la porte qui l’intéressait. Elle était hélas verrouillée. Après avoir remonté quelques marches, il se blottit derrière une statue, espérant qu’un domestique se présenterait, qui ouvrirait la pièce close. La chance le servit. Il n’était pas dans son poste de guet depuis dix minutes que deux moines, portant, sur une sorte de petit brancard, un coffre de fer, s’arrêtèrent devant la porte, y frappèrent d’une certaine manière. Le battant pivota largement pour livrer passage aux porteurs et à leur charge. Une odeur âcre de bois ou de charbon en combustion parvint aux narines du guetteur, qui entrevit derrière la porte une sorte de balcon, sur lequel s’engagèrent les moines. Des lueurs de forge montaient d’une salle située en contrebas du palier.
     
    « On se livre ici à des travaux qui font appel au feu », se dit Axel, dont la curiosité s’exacerbait.
     
    Il revint à la porte mystérieuse, avec le vague espoir qu’elle ne serait plus verrouillée. Elle l’était toujours. Lui vint alors l’idée d’essayer la porte voisine. Le battant s’ouvrit et il pénétra dans une chambre obscure. Il alluma, avec son briquet à mèche d’amadou, la queue-de-rat dont il s’était prudemment muni et découvrit un débarras, où s’empilaient des caisses vides et des meubles réformés. L’oreille aux aguets, il ne perçut aucun bruit particulier venant de la pièce contiguë, mais un rai de lumière, sous une armoire adossée au mur, attira son attention. Quatre hommes robustes eussent employé toutes leurs forces pour déplacer ce meuble massif. Par chance, les portes de l’armoire s’ouvrirent en grinçant. Le meuble se révéla vide et dépourvu de rayonnages. Axel s’y introduisit, imaginant que l’armoire pouvait obstruer une ouverture qui donnerait dans la pièce inaccessible. À l’aide de la dague ancestrale des Malorsi – il imagina un instant le comte Ugo à son côté –, Axel parvint, non sans difficulté, en provoquant des craquements importuns, à disjoindre et enlever les minces panneaux de bois qui constituaient le dos du meuble. Il dégagea ainsi un œil-de-bœuf, clos par une vitre sale, derrière laquelle frissonnaient des lueurs d’incendie. Le temps de trouver une caisse pour se hisser à bonne hauteur, de tirer la targette qui fermait la fenêtre ovale et Axel, le cœur battant, se pencha, le souffle coupé, sur un des cercles de l’Enfer chanté par Dante.
     
    Un Vaudois, homme de sang-froid par nature, aimable sceptique, jouit d’une lucidité placide. Il y regarde à deux fois avant de croire ses yeux. Devant tous les phénomènes réputés inexplicables, sa raison s’insurge et licencie l’émotion au profit du doute. Familier des caprices et subterfuges de la nature, il se défie des apparences surnaturelles. Prodiges, merveilles, miracles ont peu de chances, au pays de Vaud, d’être admis tels qu’ils se présentent. De la même façon qu’il n’attribue pas à Bacchus, mais à son propre travail, la générosité de la vendange et le goût du vin nouveau, le vigneron vaudois tient l’orage pour accident

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